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 Làika La Messagère

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Làika La Messagère

Aonghusa

Làika La Messagère

Messages : 14
Date d'inscription : 01/01/2021

Personnage
Âge: 23
Métier: Chaman - Gairm du Loch Seann
Statut: Aonghusa


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MessageSujet: Làika La Messagère   Làika La Messagère I_icon_minitimeVen 1 Jan - 14:51



   


   
Làika La Messagère

 











Nom/Prénom : Làika La Messagère

Âge/ Date de naissance : 23 années, un jour d'hiver.
Sexe : Féminin
Faction : Aonghusa, Peuple Libre.
Liens notables :
- Rhona l'Ancienne, sa grand-mère et son maître lors de son enseignement chamanique
- Sorsha, sa jeune soeur
- et plus largement tous les membres de la communauté religieuse dont elle est issue.

Fonction : Chamane des bords du Loch Seann
Gairm, la Messagère de Tuinn.

Personnage
POSSESSIONS :

Làika ne possède rien de particulier. Tous les biens meubles et immeubles dont elle use appartienne autant à sa famille qu'à elle-même. Elle emprunte les outils rituels à sa grand-mère, ou à sa mère. Quelques objets lui sont complètement dédiés, mais ils n'ont pas de grande valeur marchande. Elle partage même sa cabane au bord du lac avec Rhona et Sorcha. Elle n'est au final pas tellement attachée aux choses matérielles qui représentent peu à ses yeux.
Les seules possessions réellement digne d'intérêt - et dont elle ne se sépare jamais -, sont l'amulette qui pend à son cou et l'appeau rituel. Le bijou est constitué d'une chainette d'argent solide, de bonne orfévrerie. A son centre pend une dent du Tuinncù. Cette dernière mesure un peu moins qu'une main adulte ouverte. L'arrière de la cuspide est souvent badigeonné d'onguant de sa préparation, censés apaiser son esprit et son coeur. L'appeau quant à lui est un instrument banal, taillé dans un os de cervidé. A la base destiné à être un simple essai, il demeure donc très sommaire et cela lui convient bien.

APPARENCE :

Làika ressemble beaucoup à son père. Elle est grande et élancée, sans pour autant être la plus grande ou la plus élancée. Elle tire ses cheveux blonds de sa mère ; un trait qu'elle partage également avec sa soeur. Sa crinière est bien trop indisciplinée lorsqu'elle les laisse lâche, aussi s'attèle-t-elle à les natter régulièrement, ornant son crâne de quelques bijoux simples et de plumes rutuelles. La Messagère n'est pas une jeune femme particulièrement extravagante et, par conséquent, se parre d'atours plutôt simples qu'elle rapièce au besoin. Elle apprécie que ses vêtements durent dans le temps et n'est pas très à l'aise à l'idée d'en changer.

Outre son allure somme toute banale, elle reste une jolie fille. Sans correspondre en tout point aux canons de beauté en vigueur chez les Peuples Libres, elle possède un minois agréable bien que souvent figé dans une expression sérieuse - que d'aucun considérerait austère. L'ensemble de son visage présente un équilibre harmonieux, avec un nez très légèrement mutin et des lèvres pleines. Pourtant, ce qui entretient le plus son charme, ce sont ses yeux en amandes. Ses pupilles sont d'un bleu foncé, semblable aux teintes du Loch Seann en été. Elle arbore souvent des peintures faciales, symbole de son rang de Cairm au sein de sa communauté. C'est aussi comme cela qu'on peut la distinguer facilement lors des cérémonies plus officielles.

PERSONNALITE :

Làika est difficile à cerner. Elle porte en elle la jeunesse brisée, et le poids d'un fardeau sur ses épaules. Aussi, quiconque l'ayant connue enfant la décrira comme une petite fille animée et joviale, emplie de joie de vivre. Elle riait souvent en ce temps-là, et voletait au rythme de son insouciance. Mais cette personnalité flamboyante a rapidement dû céder la place à un comportement plus neutre, en raison de son rang et de l'importance de sa tâche. Si elle se laisse encore parfois aller, elle reste bien plus prudente sur ses mots et ses gestes que n'importe qui d'autres chez les Veilleurs.

Elle a, en grande partie, été elevée par Rhona l'Ancienne qui lui a transmis tout le savoir nécessaire pour devenir une personne sage et avisée. S'il demeure des moments d'emportement liés à son âge, la Messagère est avant tout une personne réfléchie et patiente. Afin de ne jamais comettre d'imprudence, elle veillera à attendre le moment opportun pour s'exprimer ou agir. Cette prudence caractéristique ne l'empêche pas pour autant de vivre, bien qu'elle se sente rapidement démunie face à l'imprévu.

Sinon c'est une jeune femme reconnue pour ses augures et son travail de chamane. Elle s'investie pleinement dans son devoir, et y tire un sentiment d'accomplissement et une certaine fierté. Néanmoins elle est particulièrement rancunière, ce qui peut parfois fausser ses jugements et ses actes. Elle n'aime pas non plus les endroits trop bruyants ou trop peuplés ; ils sont une source d'angoisse et surtout, ne lui permettent pas d'agir comme elle l'entend. Car si l'on pourrait qualifier son caractère de plutôt facile à vivre, elle n'en est pas moins la fille du responsable de sa communauté et la Cairm. Elle doit être écoutée et respectée à sa juste valeur, sans quoi elle se ferait dévorer par la frustration et la colère.


HISTOIRE

Les hurlements cessèrent au moment où ses yeux redécouvrirent le monde. Les lèvres sèches et entre-ouverte, la respiration haletante, elle remettait de l’ordre dans son esprit embrouillé. Déboussolée, la mine hagarde, ses doigts serraient la douce fourrure qui couvrait ses jambes allongées. De la fourrure… Puis, l’odeur d’un feu piqua ses narines, et ses paupières papillonnaient ; elle discerna les planches de bois, le crépitement des flammes et le tintement spectral des amulettes qui pendaient çà et là. Sa langue humidifia sa bouche, et sa main crispée se détendit assez pour aller écraser les épaisses gouttes de sueur qui perlaient son front. La pièce était plongée dans un silence relatif, alors qu’au fond se distinguait une silhouette voutée. La vieille femme tenait un pilon, qu’elle frappait dans un rythme régulier, presque hypnotique contre l’épais bol. Elle fredonnait très doucement une mélodie, qu’elle ne reconnaissait pas. Leurs regards se croisèrent une première fois sans pour autant que l’Aînée ne mette fin à son œuvre. Elle avait l’habitude, au fond. Elles ne disaient rien. Se drapant des poils chauds et épais, elle s’extirpa de sa couche, et vint s’asseoir en face. Le mutisme assourdissant vrillait ses tympans de vide et d’angoisse. Pourtant, là, devant le foyer où dansait des langues rougeâtres, elle n’avait plus peur. Elle resta un instant ainsi figée, perdues dans les mouvements imprévisibles des flammes chatoyantes qui caressaient l’air dans un claquement familier.

« Me raconteras-tu ce rêve ? ». La vieille avait cessé de fredonner, et sa voix tremblante résonna dans le vide auquel elle s’était habituée.
« Il était le même que l’autre fois Seanmhair ».
L’ancêtre s’arrêta de marteler sa mixture, un court instant, à peine perceptible. Mais cela fût assez pour lui faire froncer les sourcils de mécontentement. La vieille Rhona n’aimait pas être perturbée lors de ses préparations. Ou bien était-ce l’inquiétude qui faisait se creuser plus encore les rides de son visage ? « Raconte le moi encore une fois, Làika ».

La jeune femme blonde qui s’enfonçait un peu plus sous la fourrure soupira. Elle ne pouvait refuser face à l’ordre impérieux de sa grand-mère. C’était ainsi. La Grande Chamane Rhona était la matriarche de leur communauté, et bien qu’elle eut été vieille – certains lui prêtant même une certaine sénilité -, elle demeurait l’instance la plus respectée. Les Veilleurs étaient installés depuis des générations sur les bords calmes du Loch Seann. Cet assemblage hétéroclite de chamans et de druides avaient longtemps partagé le même sang. Aujourd’hui ils étaient une vingtaine d’âmes, bien plus ouverts sur le monde qu’ils ne le furent par le passé. Des pèlerins venaient grossirent les rangs du petit hameau une grande majorité de l’année. C’était malgré tout un endroit paisible, construit à l’orée de la forêt et dont la vue était imprenable : les eaux limpides du lac brillaient de milles éclats au pieds de leurs huttes. C’était un privilège que d’être là, et Làika n’aurait troqué sa vie pour rien au monde. Loin de l’agitation de la capitale toute proche, elle avait grandi ici et prêté serment comme tous les membres de sa famille avant elle. Car les Veilleurs avaient un fardeau qu’eux-seuls étaient capables de porter, depuis les temps immémoriaux.

« Les flots sont déchaînés. La pluie qui tombe du ciel est noire. J’entends sa colère. Mais je ne peux rien faire. Je suis immobile, incapable. Alors je ne peux que contempler l’horreur. La Mort s’en vient. Je la vois traverser les eaux sacrées. Je la vois tout prendre sur son passage. J’entends les hurlements, et les chevaux qui hennissent de rage. Et lorsque la mort le trouve, c’est moi qui suit transpercée d’une flèche ». Làika avait du mal à parler, la gorge nouée. Elle s’était sentie mourir, une deuxième fois. « Et je me réveille ».

Rhona posa son pilon et le bol sur le côté. A présent, ses traits hors d’âge n’exprimaient plus que la profonde inquiétude. Elle avait toujours pris très au sérieux les augures de ses élèves, mais elle portait une attention toute particulière à celles de la Gairm. Elle vivait d’ailleurs dans la même pièce, et veillait sur elle jour et nuit. L’enfant prophétique méritait toutes les attentions. Et voilà la troisième fois qu’elle revenait de l’Eadar en portant les mêmes nouvelles. La Mort qui s’en venait n’était, en soit, pas le plus inquiétant ; il arrivait que certains chamans se trouvent un certain don pour la sentir. Ce qui la troublait d’avantage, c’était la pluie noire et le blasphème des eaux sacrées. Elle était la Messagère. Celle que le Tuinncù avait choisi. Par conséquent, elle partageait avec le gardien du royaume de Tuinn un lien fort et particulier. Quelque chose se préparait, et l’esprit du lac essayait de l’avertir. Làika avait beau avoir reçu la meilleure instruction chamanique, elle était encore jeune – peut-être trop – pour mesurer l’importance de sa charge sacerdotale. Si elle venait à contrarier la Mère Aqueuse, elle en payerait sûrement de sa vie. C’était du moins ce que les légendes disaient. Et Rhona, comme tous les membres de la communauté, avaient appris que les légendes, n’étaient que l’Histoire qui attendait de se réaliser.

Dans un recoin de la pièce, avant qu’elle n’ait pu répliquer quoique ce soit à l’histoire, une petite masse se mis à bouger. Elle était blonde comme les blés, à l’instar de Làika. Le visage tout endormi, elle se frotta les yeux avant de rejoindre la jeune femme. La petite ne devait pas avoir plus de huit années. Elle bailla bruyamment sous le regard réprobateur de la vieille dame. Il était tard dehors. Les étoiles brillaient depuis assez longtemps, et la lune projetait sur le lac des rayons d’argents. Ce n’était pas sage de se lever ainsi en pleine nuit. Frissonnante, elle s’installa sous l’épaisse couverture de poils, elle aussi. La Gairm lui offrit un sourire amusé alors qu’elle se collait un peu plus au feu.

« Retourne te coucher Sorcha »
« Je vous ai entendu parler, Làika et toi ».
« Seanmhair a raison. Si tu veilles trop tard, comment feras-tu pour tenir éveillée demain ? Tu sais que Fingàl te puniras si tu t’endors pendant sa leçon ».
La petite haussa simplement les épaules. Elle n’était de toute façon pas l’élève la plus assidue du Druide, et se faisait souvent corriger pour son mauvais caractère. Une fois de plus ou pas, cela ne changera pas grand-chose. « Il m’ennuie. Moi je veux faire comme Seanmhair et toi ! Je veux protéger le lac et devenir Gairm ».
Làika rit. « Et pour cela tu dois obtenir ton Fàinngàirdean. Si tu ne prêtes pas attention aux enseignements que l’on te donne, alors tu ne deviendras jamais adulte. Et tu ne deviendras pas chamane ».
« Je m’en fiche, moi je veux être Gairm ».
Cette fois-ci, ce fût trop. La matriarche fronça les sourcils de colère et redressa un peu son dos voûté. Elle avait beau être aussi vieille que le monde lui-même, elle était terrifiante lorsqu’elle prenait cet air-là. Làika l’avait assez expérimenté au fil des ans, il ne valait mieux pas contrarier Rhona. « Ce n’est pas un jeu Sorcha ! On ne choisit pas d’être Gairm et ta sœur sera la seule jusqu’à sa mort. C’est ainsi. Cesse de prendre tout cela à la légère, ou nous serons contraints de t’envoyer à la ville ».

Pour qui était né et avait vécu avec les Veilleurs, quitter les bords du Loch Seann était pire que la mort elle-même. Les habitants y avaient tous un rôle particulier, et étaient tous d’habiles religieux. La quiétude des eaux n’était dû qu’à leurs offices, et la qualité de leur travail était reconnu par tous leurs pairs. Pendant des siècles, ils avaient été perçu comme des marginaux. Et même si cela demeurait vrai, aujourd’hui leur notoriété dépassait largement les frontières Aonghusa. Ils étaient ceux qui avaient donné vie à la légende. Depuis personne ne venait plus moquer les contes anciens, et mêmes lors des veillées, on prenait garde aux histoires énoncées. Il était devenu presque impossible d’extraire du mythe la réalité, si bien que tout pouvait être prophétie. Làika ne partageait pas cet avis. Certaines histoires étaient faites simplement pour divertir. Malheureusement pour elle, - ou heureusement -, la sienne n’était pas de celles-là. Vexée, Sorcha se renfrogna un peu. Elle aurait aimé répliquer quelque chose, mais une main discrète de son aînée sur la cuisse l’en dissuada. La petite était plus impulsive que le feu, et cela finirait forcément par jouer en sa défaveur. De longues minutes s’écoulèrent ainsi, dans un silence revenu comme une épaisse chape de plomb.

Les yeux de l’enfant se perdaient dans le brasier qui commençait à perdre en intensité, comme l’avait fait sa sœur un peu plus tôt. Que pouvait-il bien se passer à cet instant dans la tête de Sorcha ? Elle n’en saurait probablement jamais rien. Quoiqu’elles furent proches, il demeurait une distance certaine entre elle et les gens. Victime involontaire de sa propre fonction, elle s’était résignée à vivre ainsi, parfois si près des Hommes et pourtant si loin de leur cœur. Ceux qui ne la craignait pas n’en restaient pas moins prudents. Làika la Messagère devrait vivre avec le poids de la solitude. Instinctivement, ses doigts se portèrent à son cou où pendait l’amulette sacrée. L’émail était froid, et la cuspide principale avait gardé tout son tranchant.

« Comment s’était ? »
Elle arqua un sourcil en reprenant ses esprits, ramenant son attention vers la petite blondinette qui l’observait. « De quoi ? ».
« Comment c’était lorsque tu l’as vu la première fois ? ».

Qu’avait-elle ressenti ? Cela lui semblait être il y a une éternité, alors que dix ans à peine s’étaient écoulés. Il ne lui restait plus que des souvenirs flous de ce jour-là. Elle se souvenait très bien avoir détaché la barque, avoir embarqué avec leur père. Il lui faisait verser les offrandes dans le sillage de la petite embarcation. Elle adorait ça, à l’époque. Elle venait à peine de recevoir son bracelet, et pourtant elle s’imaginait déjà être une aussi grande chamane que sa mère et sa grand-mère avant elle. C’était là un devoir sacré que de protéger le lac. C’était leur but, leur tâche et ils s’y pliaient avec la rigueur attendu par les serviteurs de Tuas. Souvent son père, le responsable de leur petite communauté, l’invitait à prendre part aux actions courantes de la vie. Elle déposait les offrandes, brûlait l’encens et se voyait confier quelques petites tâches qu’elle accomplissait avec un plaisir non feint. En vérité, ce dont elle se souvenait le mieux de cette époque était l’apparente insouciance qu’elle avait. Elle riait et jouait, grandissait et s’épanouissait sans jamais penser qu’un jour, sa vie serait bouleversée par ce jour-là. Le temps n’était pas très bon, et une légère brise agitait la surface d’habitude d’huile. Mais dans cette région, l’humeur du ciel changeait vite, trop vite pour que son père n’anticipe la bourrasque qui bourlingua la coque de noix.

Ensuite, il ne lui restait que des brides. Penchée au-dessus de l’eau à semer les offrandes, elle avait basculé avant même de s’en rendre compte. Les eaux étaient froides. Elle ressentait encore l’étrange sensation de ses vêtements lourds collés à sa peau. Elle regardait partout, incapable de discerner le haut du bas, la gauche de la droite. Même dans le Monde Silencieux, les cris étouffés de son père lui parvenaient. Il l’appelait à s’en briser les cordes vocales. Il avait peur. Elle aussi. Lentement, à l’image d’une pierre lancée par un enfant, elle coulait vers les ténèbres. Alors que l’air lui manquait, elle s’abandonna à son sort, adressant une dernière prière à Baran Didom pour qu’il soit clément dans son jugement. Combien de temps s’était écoulé avant qu’elle ne rouvre les yeux ? Elle n’aurait su le dire. Mais lorsqu’elle le fit, il était là, devant elle. Tétanisée, la créature de Tuinn plongea ses yeux plus obscurs que la nuit dans les siens. Il lui semblait qu’il regardait son âme. Elle ressentit quelque chose alors au fond de son cœur. Comme un écrin chaud, et confortable. Comme si, enfin, elle se trouvait complète. Elle n’avait plus aucune idée de comment elle avait su sortir la tête de l’eau, ni même comment ils avaient rejoint la rive. Cela s’était effacé de son esprit, ne laissant plus que l’emprunte certaine de ce face à face avec le Gardien.

Peut-être par pudeur, elle se contenta de répondre laconiquement : « Je ne sais plus. C’était il y a tellement longtemps. J’ai certainement eu peur ».
La petite sœur ne fût pas entièrement satisfaite de sa réponse, mais s’en contenta. Elle savait que Làika ne dirait rien de plus qu’importait l’insistance qu’elle y mettrait. « Et toi, Seanmhair, comment as-tu su que c’était la Gairm ? ». Elle avait beau avoir entendu cette histoire des centaines de fois, elle demandait toujours à ce qu’on lui raconte. Et généralement, tous se pliait à l’exercice. La transmission était une partie importante de leur communauté, et lorsqu’elles disparaîtraient, leurs récits devraient continuer à vivre au travers des générations futures. C’était là une de leur mission.
« Parce que je connaissais les légendes, Sorcha. Parce que c’est notre rôle de les connaitre ». La vielle femme repris son pilon et son mortier, et recommença à frapper dans un rythme lent. « Il y a très longtemps, lorsqu’il n’existait pas les peuples comme aujourd’hui, notre famille s’est vue confier la tâche de protéger le lac ». Doucement, Làika farfouilla non loin d’elle et sortie d’une petite bourse une poudre qu’elle lança dans les flammes. Une agréable odeur s’en dégagea aussitôt, et, bercées par le fracas régulier, elles se laissèrent envoûter par les paroles de l’Ancêtre.

« Les Anciens l’ont vu dans l’Eadar. Il existe un passage. Un unique portail qui mène au Naom. Il a été créé par la colère, par la rage et la trahison. Car bien avant que nous ne marchions sur cette terre, Lochran, le Guerrier de Feu, convoitait Tuinn, la Mère Aqueuse. On dit qu’il souhaitait la posséder car son corps cristallin était la chose la plus belle qu’il n’ait jamais vu. Mais Lochran était tempétueux. Son caractère ardent s’opposait tant à celui de Tuinn, qu’il était impossible pour lui de la conquérir. Chaque jour, elle le repoussait. D’abord avec politesse, elle déclinait ses invitations. Puis lorsqu’il fût plus entreprenant encore, elle le fuit. Si bien que les deux Dias ne se virent plus pendant très très longtemps ».
« Mais l’on ne peut sous-estimer la persévérance d’un cœur épris, car lorsque Tuinn réapparut, après s’être armé de patience, Lochran lui sauta dessus. Si elle était aussi forte que lui, son corps, plus frêle, ne put se débattre. Ainsi à sa merci, il la prit. C’était sa récompense pour avoir attendu, son trophée. Peut-être même que le Guerrier de Feu s’était lassé d’elle, mais il ne pouvait laisser cette chasse immémoriale impunie. Alors qu’il la violait, des larmes jaillirent des yeux de la Mère Aqueuse. Des larmes de rage qui s’écrasèrent sur notre monde pour créer les lacs. La première à toucher la terre fût celle du Loch Seann. Dedans, elle y avait versé toute sa colère et sa haine, si bien qu’une entrée pour le Noam fût créée, afin que quelqu’un puisse lui venir en aide ».
« Lorsqu’il eut fini, Lochran la laissant gisante. Elle pleurait toujours mais, consciente de ce qu’il adviendrait si quelqu’un franchissait le passage, elle récupéra sur son doigt une unique goutte de son sang virginal. Elle la laissa tomber dans le Loch Seann, créant ainsi une créature gardienne qui devrait empêcher quiconque de s’aventurer dans le Royaume des Immortels. Il était l’incarnation même de la fidélité, un monstre que les Flots nourriciers protégeraient en retour ».
« La légende raconte qu’un jour viendrait où le Gardien fidèle de Tuinn trouverait un interlocuteur. Qu’il existerait dans notre monde une unique personne capable de le comprendre. Cette personne serait le Gairm. Le Tuinncù répondrait à ses appels, et le Gairm aurait à charge d’accomplir la volonté de sa maîtresse avec dévotion. Si jamais le Gairm échoue dans sa tâche, les eaux se déchaîneront, et ce serait le début des Âges Sombres. Il est l’enfant élu de la Mère Aqueuse, et de sa bouche sortira la vérité. Son cœur devra rester pur et il ne devra jamais céder aux excès du Feu. Tel est le poids qui repose sur le Messager
».

Làika demeurait silencieuse, l’esprit un peu embrumé par les effluves mystiques. Elle savait tout cela. Comme sa jeune sœur, on lui avait raconté ces histoires. Tout cela n’aurait pas dû lui arriver. Parfois elle se laissait aller à l’amertume. Elle n’était pas à la hauteur pour la tâche qui était sienne, et elle n’avait jamais demandé à devenir cet enfant. D’ailleurs, lorsqu’elle était revenue au hameau après l’accident personne ne l’avait cru. Elle se souvenait du regard grave de Rhona quand elle avait décrit le Tuinncù, que personne n’avait jamais vu jusque-là. Même elle, la sagesse même de leur communauté, avait douté du récit de la petite. Alors, afin de s’assurer de la sincérité des propos, on avait préparé durant de long jour un rituel. Alors que la nuit tombait, sa mère lui avait fait ingérer des champignons. Vêtue de blanc, portant les marques rouges pour les Tuas, on l’avait mené jusqu’à la plage. Là, elle avait lancé un dernier regard, et avait même supplié à genoux les instances des Veilleurs de bien vouloir la croire. Elle ne voulait pas retourner dans les eaux sacrées. Rhona avait d’abord cru que la peur dissuaderait l’enfant de dire des mensonges, et qu’elle reviendrait sur ses paroles. Mais jamais elle n’avait changé de version. Tout ce qu’elle avait dit était vrai à ses yeux.

Des chants furent entonnés, et ni sa mère ni sa grand-mère ne détourna le regard lorsqu’elle s’avança vers l’eau. Elle devait marcher jusqu’à ne plus avoir pieds. Le clapotis des vaguelettes qui lui léchaient les orteils lui tirèrent un frisson. Mais elle n’avait pas le choix : Làika devait avancer. Elle ne sentait presque plus sa peau, tant le lac était glacial, et bientôt, sa tête fût engloutie. Et même là, complètement immergée, elle devait lutter ; la tentation de remonter à la surface était grande. Pourtant elle devait prouver qu’elle ne mentait pas. Et si les eaux de la Mère Aqueuse l’emportaient, cela n’était pas grave. Elle aurait prouvé à tous sa valeur. Son esprit asphyxié divagua très vite. Et là encore, il ne lui restait plus que quelques images ancrées à jamais dans sa mémoire. Elle m’avait revu. Il l’attendait. Son cœur faillit cesser de battre. Ses dents acérées étaient à peine à quelques mètres de son corps. Pourquoi ne l’attaquait-il pas ?  Puis, lorsqu’elle reprit connaissance, elle était sur la rive. Elle vomissait de l’eau alors que tous s’étaient massés autour d’elle. Ses cheveux blonds dégoulinaient et un silence pesant régnait. Eux aussi, ils l’avaient vu.

Ce n’est que bien plus tard qu’elle apprit à l’appeler au travers d’un appeau. Si aucun son ne sortait de l’instrument, elle savait que le Tuinncù l’entendait. Elle lui donnait elle-même les offrandes, s’immergeant jusqu’à la taille. Il ne s’approchait jamais du rivage, et ne se montrait que lorsqu’elle était là. C’était le privilège de la Gairm. Mais si un jour elle échouait à sa tâche, il la dévorerait, elle et son âme. Quelques druides étaient venus de tous les peuples frontaliers afin d’attester du miracle. Elle était une véritable légende ; la Messagère de Tuinn. Depuis, elle avait fini sa formation chamanique et faisait son office avec autant d’application que les autres. Elle voulait demeurer une femme normale.

« Puisse les Tuas veiller sur toi, ma fille ».

Sorcha s’était endormie. La vieille avait planté son regard bleu dans le sien. Qu’adviendrait-il quand Rhona ne pourrait plus veiller sur elle ? Les Tuas seraient-ils seulement suffisants ? Une conviction intestine l’apaisait ; si le futur n’était jamais vraiment distinct, même pour les druides ou les chamans, quelque chose lui prêtait sa force. Elle était persuadée que son cœur battait à l’unisson avec celui du Tuinncù et que le Gardien veillerait aussi jalousement sur elle que sur l’entrée du Royaume des Immortels. Ils partageaient un lien si puissant, si unique, qu’elle était presque capable de ressentir son âme. Ils communiquaient, en silence. Làika tourna la tête et se laissa observer les reflets d’argent sur l’eau. Là, dans la nuit, on entendit le bruit de la créature résonner.

« Il le fera ».

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MessageSujet: Re: Làika La Messagère   Làika La Messagère I_icon_minitimeDim 3 Jan - 18:15



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MessageSujet: Re: Làika La Messagère   Làika La Messagère I_icon_minitimeDim 3 Jan - 18:25

Tout ce que je peux dire, c'est qu'il va falloir faire un petit BG sur la communauté des Veilleurs du Loch Seann maintenant :3
VALIDATION
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Te voilà enfin validé par l’équipe administrative. Nous te souhaitons tous la bienvenue officielle parmi nous. Afin de te faciliter la tâche, voici quelques liens qui pourraient t’être utiles très prochainement :
Demande de RP : Si tu souhaites te lancer séance tenante il n’y a pas mieux. Les joueurs se feront un plaisir de partager un bout d’aventure avec toi.
Journal de bord : Afin de garder une trace de tes différents rps, et aussi pour te permettre d’établir une timeline claire pour toi et tes partenaires, nous t’invitons vivement à créer ton journal de bord où tu pourras archiver tes pérégrinations.
Si jamais tu as encore des questions, n’hésite pas à contacter l’équipe administrative ou à poser tes questions dans le sous-forum adéquat.
Bon jeu !
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