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 L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]

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Laelia Antia Protera

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MessageSujet: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeMar 5 Mai - 21:13


L'ART ET LA MANIERE
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8ème jour de Primo Seminare, de l'an 399

« Alors qu’as-tu vu ? ».

La femme se releva de son assise confortable, une main sur le ventre rebondit et le visage neutre. Elle avait attendu là la matinée entière, faute de pouvoir tourner en rond dans sa domus. Ses nouvelles esclaves l’insupportaient, et sans Naïra à ses côtés pour l’aider dans la tâche, les premières heures furent habillées de cris et de remontrances. A elles seules elles avaient brisé un vase, renversé tout un baquet d’eau sur le sol et avait oublié la collation de leur maîtresse. Quoique patiente, sa grossesse arrivant à son terme mettait à mal ses nerfs déjà bien faibles de naissance. Elle dormait mal, Caïus ronflant plus qu’un troupeau entier, et l’étroitesse de sa demeure commençait à lui peser autant que le ciel. Pour autant la charmante ruvienne ne se laissait point abattre. Occupant ses journées comme elle le pouvait, elle espérait s’acclimater les jours suivants. Même la brave petite Octavia ne trouvait guère sa place ici ; Edelmia semblait moins sûre que les riches quartiers de Ruvia, et la mère s’obstinait à lui refuser toute sortie accompagnée. Ils ne pouvaient savoir encore qui se trouvaient être ennemis ou alliés, et en de pareilles circonstances, il était inenvisageable de laisser le seul enfant vivant du Procurator en dehors de ces murs.

« Des tas de choses Domina. La ville est agitée, et dans les petites rues j’ai réussi à trouver cinq ateliers ».
« Des peintres ? »
« Un sculpteur, un potier, deux peintres et un dramaturge ».
Laelia fronça les sourcils. La récolte était bien maigre si les recherches s’en étaient tenues à ça. D’autant qu’il y avait fort à parier qu’au moins la moitié ne valait pas un clou. « Cela est fort peu pour une si grande ville ».

L’esclave aux cheveux grisonnant lui offrit un charmant sourire illuminant ses deux prunelles mordorées. S’il eut été possible d’avoir une seconde mère, Naïra aurait incarné le rôle à la perfection. Esclave de sa mère depuis l’enfance, elle l’avait vu naître – elle et son frère. Après avoir veillé sur Cordelia des années, cette dernière lui avait offerte au regard de l’étrange affection qu’elle lui portait. Outre son titre, c’était ses conseils toujours avisés et sa capacité à penser tout comme elle qui la séduisait. Elle incarnait parfaitement le second dont elle avait besoin pour ordonner les affaires courantes de sa famille. De plus, les années de service lui avaient octroyé la confiance de ses maîtres. Celle qui venait de par-delà la grande mer pouvait se féliciter d’être si bien traitée. Même pas petite Ottavia la reconnaissait à présent comme un membre à part entière de leur drôle de foyer. Ukko les pardonne d’accorder autant de crédit à cette femme, mais elle avait par de très nombreuses fois prouvé sa valeur.

« J’ai dû poser des questions, sur le forum. Les esclaves parlent entre eux, Domina ».
« Et bien ? As-tu pu en trouver d’autres ? »
« Oui Domina, des dizaines. Des philosophes, des poètes… Je suis presque sûre que certains te plairont. Et à tous je leur ai délivré ton invitation ».

Ravie, la bouche de la patricienne s’étira dans un large sourire satisfait. Naïra avait bien agit, comme à son habitude. Bientôt ils afflueraient à la domus sans qu’elle n’eut aucun effort à fournir. Au moins cela l’occuperait une journée ou deux ! Et bien qu’elle n’en ait encore touché mot à son époux, et quoique la négociation pour les rentes serait âpre, elle savait qu’il n’en serait qu’heureux lui aussi. Ce n’était après tout pas dans son seul intérêt qu’elle faisait venir à son chevet tous les artistes de la capitale oncmélienne. Elle usait habilement de la seule politique qu’on autorisait aux femmes, et éveillée à la chose par son oncle, l’empereur lui-même, elle veillerait à lui faire honneur. Des bruits de pas se firent entendre, et un bref regard à sa magister suffit à la faire rire un peu.

« Je crois que c’était là le plus simple Naïra. Combien crois-tu qu’il m’autorisera à dépenser cette fois ? »
« Je ne crois plus rien. Tu saurais lui faire les poches mieux que nul autre, Domina ».
Et elles rirent de concert, un éclat taquin dans le regard. Si le créancier était dur, la belle était presque aussi féroce qu’un lion. Se levant avec difficulté, elle la congédia d’un hochement de tête entendu alors que, de meilleure humeur, elle accueillait le pied ferme le Feles. Et aussi vite qu’elle était arrivée, sa bonne mine disparut dans un souffle alors qu’il apparut au côté d’une jeune femme. Manquant de devenir rouge de colère, sa mâchoire se serra presque aussitôt, prête à abattre le courroux sur le malheureux.
« Qui est-ce ? ».
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeMer 6 Mai - 11:09


De retour du forum, Caïus avait pris la tête de ses licteurs. Au centre du groupe, les deux esclaves qui venaient d'être achetés et qui allaient commencer leur service dès que le Procurator aurait retrouvé son foyer.  Il franchit la porte en adressant un petit signe de tête à ses licteurs pour les congédier pendant la prochaine heure. Ils pouvaient se reposer, se désaltérer ou être relver par leurs camarades, peu importait à vrai dire. Ils s'étaient acquittés de leur mission, libres à eux de profiter de leurs quelques instants de relâche. Il tendit son manteau au premier esclave qu'il croisa dans le vestibule avant de montrer l'une des deux jeunes femmes.

Emmène celle-ci à la Culina.
Oui, Dominus.

L'esclave s'inclina et disparut avec la nouvelle arrivante dans son sillage. Caïus jeta un regard à l'esclave à peau d'ébène qu'il avait raflé sous le nez de la fille du Préteur Sicinius et traversa l'atrium tandis qu'elle avançait un pas derrière lui. Il rencontra Pesca, le magister qui tenait quelques tablettes de cires dans les mains, probablement liées à l'inventaire des réserves de la domus. L'esclave légèrement dégarni et dont le visage trahissait un âge déjà bien avancé s'inclina devant son maître qui l'interrogea sans attendre.

Où est-elle ?
Dans l'oecus, Dominus.
Son humeur ?
Egale à elle-même, Dominus.

La bouche du Procurator se tordit en une moue contrite, puis il congédia le magister d'un geste de la main. Il adressa un regard à la jeune esclave qui le suivait et l'invita à le suivre d'un coup de menton vers l'avant. Quelques éclats de rire lui parvinrent tandis qu'il approchait et il croisa Naïra qui le salua avec un petit sourire sur le visage.  Ils arrivèrent dans l'ouverture qui menait au salon lorsque la voix de son épouse fouetta l'air avec une pointe de jalousie acérée.

Qui est-ce ?

Le regard de Laelia était froid, chargé d'une colère sourde et elle toisait l'esclave avec un dédain hargneux. Soit, Caïus prenait l'option de la provocation et était quitte à essuyer une tempête de mauvaise humeur, soit il s'expliquait immédiatement. Il n'était pas d'humeur à se livrer à une joute verbale pour une mauvaise plaisanterie, aussi prit-il la seconde option.

Une nouvelle esclave.

Il fit quelques pas pour rejoindre son épouse et déposa un doux baiser sur sa joue en plaçant une main affectueuse sur le giron arrondi où grandissait leur enfant. Il tourna ses yeux vers l'esclave qui était resté à l'entrée de l'oecus.

Approche.

Tandis qu'elle avançait il tourna de nouveau son regard vers Laelia.

Je suis passé sur le forum ce matin et j'ai trouvé deux esclaves pour nous. J'ai envoyé la première en cuisine, mais je pense que celle-ci pourrait aider Naïra à prendre soin de toi pendant que je visiterai mes troupes dans les castrae.

La jeune femme aux cheveux crépus se planta devant le couple, gardant le regard droit sans tomber dans une défiance de mauvais aloi. Caïus poursuivait.

Quand je l'ai vu, elle m'a fait penser à Naïra. Peut-être même qu'elle vient de la même région, qui sait.

Il passa un bras autour de la taille de Laelia et s'approcha d'elle dans une douce étreinte.

Qu'en dis-tu ?
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeMer 6 Mai - 18:19


Non pas insensible aux cajoleries de son époux, elle ne lui concéda qu’un regard aussi bref que doux, préférant soutenir le minois de la nouvelle distraction. Il savait ô combien elle détesta le voir au côté d’une femme, fusse-t-elle juste esclave ou simple pute. Il n’y avait, même au cœur des patriciennes, que les petites mœurs pour tenter de débaucher le seul joyau qu’elle se targuait d’avoir. Et comme toute fourmis, elle n’aimât à partager le labeur d’une vie quand d’un chant la cigale se faisait fort de lui rafler. Voilà pourquoi elle préférait la compagnie des laideronnes. Au moins Caïus ne trouvait rien à redire de leur charme. Elle la détailla un long moment dans un silence irrité, inspectant comme le bétail ses mains et ses pieds, son allure et ses bras. Nul doute qu’il l’avait bien choisi, prenant grand soin de trouver une esclave habile pouvant soulager ses fardeaux – et par extensions ceux de sa magister qui se démenait malgré son âge pour satisfaire une Domina que la grossesse rendait tatillonne. Quoiqu’elle eut toujours été d’humeur taciturne, Laelia avait ses mauvais sangs qui commençaient à peser lourd.

Et le bébé était du même avis que sa mère, envoyant à son flanc un franc coup de pieds qui eut tôt fait de le déformer quelque peu. Craignant de devenir trop faible trop vite, la ruvienne s’avança jusqu’à poser ses doigts sur la jeune femme, continuant son examen minutieux. Il était vrai qu’elle ressemblait beaucoup à sa vieille nurse. Le teint sombre, le nez large et les cheveux noirs n’était pas sans conférer une certaine beauté exotique. Bon, elle n’était guère jolie, mais il y avait tout de même un certain charme, comme ces femmes dont parlaient presque tous les contes de Naïra. Elle devait bien avouer que le Feles la connaissait un peu trop bien, pour savoir qu’elle lui aurait plus d’un regard. Bien moins revêche dans l’intimité qu’il ne l’était de par son titre, il avait toujours d’une grande attention à son égard et quoiqu’elle fusse courroucée souvent, cela ne faisait que grandir ses sentiments de jour en jour.

« Quel est ton nom ? »
« Tindu Domina »
« Tu suppléeras Naïra dans son travail et tu n’approcheras jamais le Dominus, sous aucun prétexte. Ici nos esclaves sont bien traités, pour peu qu’ils nous donnent pleine satisfaction. Me suis-je bien fait comprendre ? »
« Oui Domina ».
Servile, elle parlait calmement. Laelia retourna auprès de son époux, la mine plus satisfaite qu’à son arrivée. « Va, laisse-nous, ta présence m’indispose ».

Sans attendre son reste, la tête basse en regardant le sol, elle s’éclipsa sans un mot de plus. Dans de bien meilleure auspices, la belle se glissa tout sourire dans les bras du procurateur qui bien malgré lui, avait encore une fois supporté le mauvais caractère de sa femme. On disait volontiers que les femelles Julii étaient de toujours des femmes ombrageuses, et la petite Octavia ne dérogeait guère à la règle. Elle donnait bien du mal aux nourrices, et même à ses parents lorsque ceux-ci se mêlaient de trop près des affaires de leur aînée. Plus ravis et amusés qu’offusqués, ils lui laissaient la liberté de la jeunesse sachant que bien assez tôt, ils auraient du travail pour faire d’elle une parfaite patricienne. Là-dessus, d’ailleurs, Laelia entendait à ce que les rôles se jouent équitablement ; Caïus avait de nombreuses vertus qui lui échappaient encore, mais elle possédait un sens bien plus affûté que lui. D’ailleurs, alors qu’elle caressait avec douceur la peau de ses bras, elle profita d’un moment d’intimité trop rare pour engager la conversation.

« Je vais avoir besoin de toi, mon amour ». Laconique, elle espérait bien lui soutirer quatre rentes annuelles, mais les négociations s’annonçaient âpres. Il ne partageait pas tellement son goût du mécénat, et quoiqu’elle l’éveilla un peu à la chose, il était normal de demeurer sceptique quant à assurer une paye une année durant.
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeMer 6 Mai - 20:24


Le regard de Laelia s'adouçit rapidement après que son époux l'ait rejoint. Elle darda l'esclave de ses prunelles ardoise et s'appliqua à inspecter la nouvelle arrivante et à la questionner.

Quel est ton nom ?
Tindu Domina
Tu suppléeras Naïra dans son travail et tu n’approcheras jamais le Dominus, sous aucun prétexte. Ici nos esclaves sont bien traités, pour peu qu’ils nous donnent pleine satisfaction. Me suis-je bien fait comprendre ?
Oui Domina

La remarque qui spécifiait que la jeune femme ne devait jamais s'approcher de lui fit lever les yeux de Caïus vers le plafond, même s'il ne dit pas un mot. La jalousie de sa jeune épouse n'avait décidément aucune limite. Il lui sembla même que la grossesse avait encore amplifié la jalousie de la nièce de l'Empereur.

Va, laisse-nous, ta présence m’indispose.

L'esclave baissa la tête et sortit de l'oecus sans un mot. Blotti dans l'alcôve que formait les bras du procurator, Laelia se laissa aller à quelques douces caresses sur ses bras. Il plongea le nez dans la chevelure de son épouse, humant les effluves florales des huiles et parfums dont elle s'oignait. Pendant ce trop rare instant de calme et de tendresse, (Octavia devait être en train de rendre chèvre ses nourrices dans les cubiculae) Laelia rompit le silence.

Je vais avoir besoin de toi, mon amour.

Les mâchoires de Caïus se serrèrent d'avance. Lorsque Laelia avait quelque chose à demander, elle se montrait mielleuse et douce. Non pas qu'elle se comporta en temps normal comme une gorgone mangeuse d'âmes, mais elle devenait bien plus féline et caline si elle avait une requête, bien souvent pécunière. Sentant venir une discussion longue qui risquait de lui donner une migraine, il préféra raconter sa rencontre au forum, profitant de la volonté de Laelia de se montrer suave.

J'ai rencontré la fille du Prêteur ce matin. Je lui ai d'ailleurs raflé la petite Tindu sous le nez. Je lui ai demandé de transmettre une invitation à ses parents pour dans deux jours. J'aimerai que nous rencontrions un de chef des Optimates avant que je parte pour le Limes. Qu'en dis-tu ?

Il sentit le corps de laelia se tendre légèrement entre ses bras à l'évocation de la jeune citoyenne. Il entraîna alors Laelia à ses côtés sur un des lits et se saisit d'un grain de raisin qui trônait au centre d'un plat en bronze. Il releva les sourcils, prenant un air innocent.

Pardonne-moi je t'ai coupé... Pourquoi as-tu besoin de moi ?

Il ne restait plus qu'à voir si sa confession ne ferait pas naître une discussion bien différente de ce que Laelia avait prévu jusque là.
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeJeu 7 Mai - 11:43

« Peste soit ces femmes ».

Les mots prononcés sans détour, elle cala ses mains sur ses hanches, bien moins encline à la cajolerie maintenant qu’il s’était fait fort de l’agacer. Comme une seconde nature, Caïus Protero Feles trouvait toujours le bon mot pour irriter ses nerfs ; à croire qu’il s’agissait d’un jeu ! Ronde comme elle l’était, seule et avec un mauvais sommeil, le procurateur n’avait aucune chance d’emporter ce combat, et plutôt que de l’éviter, il avait sciemment donné l’information. Peste soit-il lui aussi ! S’amusait-il de la voir dans ces états ? Elle le connaissait assez à présent pour savoir qu’il n’était pas du genre à courir la vierge et la pute, mais Laelia ne pouvait réprimer le sentiment bouillonnant qui emplissait ses humeurs. Elle avait toujours été ainsi, et quoi qu’il en coutât beaucoup à la tranquillité de la domus Protero ce n’était en rien une surprise qu’elle jura à l’encontre de la malheureuse qu’elle ne connaissait guère. Cela pouvait être une femme de bien, mariée, cela ne modifiait pas l’aversion qu’elle éprouva au plus profond d’elle-même.

« J’espère qu’elle ne me fera pas l’affront de s’inviter avec son père, auquel cas je crains que son plat ne se trouve trop épicé ». Se renfrognant un peu, le cœur battant à tout rompre dans sa poitrine tant sa colère grandissait, elle tenta de laisser un instant le silence se faire.
En vain. « Et ça, c’est si je daigne ne pas la faire manger avec les esclaves ! ».

Calmée de sa vindicte, mais pas rassasiée avant d’avoir elle-même menacer la petite catin, elle lâcha un petit grognement lorsque son fils se rappela à elle. Il n’était pas bon de se fâcher si fort dans son état, et le garçon qu’elle portait était si vif qu’il ne lui laissait jamais plus d’une heure de répit. Cela l’inquiétait d’ailleurs pour l’avenir : s’il se trouva aussi actif qu’en son ventre, nul doute qu’il donnerait à sa parentèle du fil à retordre. Mais après tout, n’était-ce pas là l’apanage des hommes ? En tout cas le bougre pouvait bien se retrouver béni de Soltar – comme son grand-père – tant il donnait du poing et du pied contre les entrailles d’une mère fatiguée. Dans son souvenir, Octavia avait été bien plus sage et jamais elle n’avait autant voulu que maintenant se délivrer de l’enfant. Alors plutôt que d’offrir une énième semonce à son époux, elle s’installa à ses côtés, bien décidée à ne plus lui laisser la chance de s’enfuir de ses griffes. Elle allait obtenir ce qu’elle souhaitait. Il lui devait bien ça, après l’avoir traînée de force dans ce maudit pays !

« Du reste, tu vas m’accompagner le reste de la journée ». Voilà qui ne laissait guère place aux négociations. Il avait osé assombrir son humeur, alors il en assumerait pleinement les conséquences. « J’ai fait venir à notre maison tous les artistes digne d’intérêt de la ville. Chacun doit amener sa plus belle pièce ». Bien certaine du désintérêt de son époux pour la chose, elle continuait sans se soucier de sa désapprobation plus que sûre de son projet. « Et tu octroieras une rente annuelle aux quatre meilleurs. J’aimerai également proposer aux plus méritants une place dans une agricola. Un endroit non loin d’ici, où ils pourront travailler leur art librement ».
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeJeu 7 Mai - 12:55

En abordant le sujet de la jeune Honoria qui avait respiré le même air que lui pendant quelques instnts, Caïus s'attendait à une déferlante de grondements et de mauvaise humeur. Sa femme ne le déçut pas.

Peste soit ces femmes. J’espère qu’elle ne me fera pas l’affront de s’inviter avec son père, auquel cas je crains que son plat ne se trouve trop épicé. Et ça, c’est si je daigne ne pas la faire manger avec les esclaves !

Les propos de Laelia avaient claqués dans l'air comme le fouet sur le dos d'un légionnaire coupable de vol. Les flamines parlaient souvent de la jalousie d'Hedelma et Laelia avait parfois le comportement de l'avatar de la déesse dans le monde des Hominii. Le Procurator retint un sourire qui n'aurait fait qu'accentuer l'agacement de son épouse, mais il ne pouvait s'empêcher de trouver amusant l'emportement dont elle faisait preuve dès qu'il évoquait le nom d'une autre femme. Elle finit par le rejoindre sur le lit, quelques rides fâchées accentuant toujours ses traits.

Du reste, tu vas m’accompagner le reste de la journée.

Elle aimait penser qu'elle était sa seule préoccupation et priorité et depuis que leur enfant à naître était devenu de plus en plus agité dans son ventre, elle semblait occulté, volontairement ou non, les différentes responsabilités et engagements qu'il devait honorer. Heureusement pour elle (et pour lui), il avait déjà prévu de rester auprès d'elle. Il se félicita silencieusement de cette décision et laissa Laelia poursuivre son discours.

J’ai fait venir à notre maison tous les artistes digne d’intérêt de la ville. Chacun doit amener sa plus belle pièce. Et tu octroieras une rente annuelle aux quatre meilleurs. J’aimerai également proposer aux plus méritants une place dans une agricola. Un endroit non loin d’ici, où ils pourront travailler leur art librement.

Et dire que jusque là, tout allait bien. Ses lèvres se pincèrent et son regard perdit beaucoup de la tendresse qui y baignait jusqu'alors. Ce ton, cette sensation qu'il devait obéir à ses ordres parce qu'elle s'estimait blessé, voilà qui avait le don d'agacer profondément le Feles. Il se redressa, tendu comme un arc avant de répondre, les mâchoires légèrement serrées.

J'octroierai ? ... C'est déjà décidé ?!

Il avait parfois la sensation de n'être vu que comme un esclave de plus, tenant les cordons de la bourse qu'il devait ouvrir aux premiers caprices de la jeune femme. Ses maxilaires battaient au bas de ses joues, tandis qu'il ravalait son envie de rugir. Il prit une grande inspiration pour se contenir avant de reprendre sur un ton moins sec.

Je consens à les recevoir, même si je n'en vois pas l'intérêt. Pour les rentes annuelles, je jugerai sur pièce. En revanche, héberger des ... des pérégrins ... des êtres frappés d'Infamia ... Chez moi ? Hors de question.

La négociation serait longue et houleuse. Il faudrait de solides arguments pour faire céder les défenses du Procurator et lui faire comprendre quel intérêt elle pouvait avoir pour ces artistes qui lui étaient si chers.
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeVen 8 Mai - 20:00


Elle ne broncha pas quand là, bien tendu sur ses guibolles, le procurateur se jouait de son air le plus sévère. Elle savait que la bataille serait longue, et s’il s’amusait de son mauvais sang, il n’en restait pas moins une tête de mule. Ne voulant pas voir l’intérêt de ces opérations – certes fort couteuses -, il les décrétait sans distinction inutiles. C’était bien à cela que l’on reconnaissait un homme d’arme plutôt que de lettre ; toujours prompt à brandir l’épée, ils étaient bien moins aises lorsqu’il fallait se défendre sans quelconque turgescence. Alors tentant de garder la mesure de son calme, la femme se caressa le ventre avec douceur. A mille lieues de l’emportement de son époux, elle lui offrait un spectacle rare qu’il fallait apprécier à sa juste valeur. Les yeux bien fixes, elle ne laissa pas son front se barrer de la moindre contrariété, et plutôt, lui tint un discours aussi calme que clair.

« Des citoyens. Ce sont des tous des citoyens de l’Empire, des sujets de mon oncle et tes administrés ». L’envie lui manquait de donner une énième leçon de politique. Cet âne bâté ne retenait jamais que ce qui lui plaisait assez. « Mais va donc ! Sûr que le peuple te soutiendra, toi l’étranger qui te pare dans tout ce qu’ils exècrent ».
A la faveur d’un nouveau coup de pied, elle s’étouffa presque. Un signe des Dieux qu’il était venu l’heure de se taire avant de regretter ses mots, une fois de plus. Et plutôt que se faire dévote, sa langue caressa ses dents. « Ou alors donne leur quelque chose qu’ils comprennent. Quelque chose dont ceux qui ont tes faveurs se feront fort d’enjoliver à ton avantage. Tu n’as jamais été très éveillé pour ces choses, mais pour une fois, ne pourrais-tu pas simplement me faire confiance sans grogner comme un bête ? ».
« Serait-ce donc trop facile de me concéder un quelconque talent qui t’échappe sans agir comme un mufle ? ».

Et alors que sa dernière tirade quittait sa bouche, elle ne put réprimer un sourire, rapidement rejoint par un petit rire. Il n’avait certes rien d’un mufle, mais le voir là, les boucles dressées sur la tête, cela prêtait au comique. Peut-être finalement avait-il depuis toujours manqué sa vocation le bougre ! Avec douceur, elle se releva de son assise et anéantit la maigre distance qui les séparait encore. Là, face à lui, elle lui saisit la main et vint y poser un baiser tendre, comme une branche d’olivier porté par la colombe.

« Je te jure de ne pas faire d’extravagance et de n’agir que dans notre intérêt. Si tu te montres bon et généreux avec des petites gens, tu gagneras le cœur de l’Oncmélie avant même d’avoir eu celui de la Curie. La politique se joue aussi dans nos rues mon amour ».
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeVen 8 Mai - 21:37


Il sentait le rouge lui montait aux joues en même temps que la colère. Elle ignora cordialement ses premières interrogations. Jugeait-elle réellement que la décision d'attribuer cet argent était déjà actée, car elle en avait décidé ainsi ? Par Kuo que cette femme pouvait être capricieuse ! Qu'elle s'en renda compte ou pas, ce genre de silence ne faisait que le ramener face à la différence de prestige qu'il y avait entre eux. Même issu d'une vieille famille de renom, le Feles ne pouvait se prétendre être aussi célèbre que les Julii qui régnait sur l'Empire depuis sa création presque sans partage. Elle sentit peut-être qu'elle avait piqué son époux un peu trop vivement, elle se radouçit pour lui répondre.

Des citoyens. Ce sont des tous des citoyens de l’Empire, des sujets de mon oncle et tes administrés.

L'accalmie fut de courte durée qu'elle repartait à la charge.

Mais va donc ! Sûr que le peuple te soutiendra, toi l’étranger qui te pare dans tout ce qu’ils exècrent.

Elle porta la main à son ventre, tandis que l'héritier de Caïus prenait le parti de son père -il n'en doutait pas- en cognant dans le giron de sa mère. Elle retrouva un ton moins acerbe.

Ou alors donne leur quelque chose qu’ils comprennent. Quelque chose dont ceux qui ont tes faveurs se feront fort d’enjoliver à ton avantage. Tu n’as jamais été très éveillé pour ces choses, mais pour une fois, ne pourrais-tu pas simplement me faire confiance sans grogner comme un bête ? Serait-ce donc trop facile de me concéder un quelconque talent qui t’échappe sans agir comme un mufle ?

Une bête, un mufle ... Et elle en riait par-dessus le marché. Elle ne se rendait même pas compte de l'offense qu'elle lui faisait à chaque fois qu'elle se conduisait ainsi. Elle ne se rendait pas compte qu'elle semblait le renvoyait à son inculture. Comme s'il avait eu le temps de s'occuper de la finesse du trait de tel peintre et de la virtuosité de la taille de tel sculpteur pendant qu'il s'échinait à démanteler les complots qui s'ourdissaient autour de son oncle. Elle qui aimait tant se dire nièce de l'Empereur, serait la nièce d'un cadavre depuis des années s'il avait perdu ne serait-ce qu'une journée à se pamer devant la nouvelle mosaïque du palais.

Même si cela lui en coûtait, il ne pouvait qu'admettre qu'elle possédait le talent d'avoir un oeil expert pour déceler les modes et les pièces qui sucitaient l'émerveillement et, parfois, la jalousie des autres patriciens. Il se renfrogna en ravalant sa mauvaise humeur tandis qu'elle venait lui prendre la main et y déposer un baiser. Elle dit alors d'une voix douce.

Je te jure de ne pas faire d’extravagance et de n’agir que dans notre intérêt. Si tu te montres bon et généreux avec des petites gens, tu gagneras le cœur de l’Oncmélie avant même d’avoir eu celui de la Curie. La politique se joue aussi dans nos rues mon amour.

Un petit grognement lui échappa, signifiant clairement qu'il acceptait le rapprochement sans se départir de sa vexation. Il ne put retenir un remarque caustique, tandis qu'elle tentait de lui inculquer une leçon qu'il avait compris seul et bien avant elle.

Tu penses que ce détail m'avait échappé quand j'ai fais remplir les greniers à blé des quartiers populaires de Ruvia ?

Même si elle pouvait se targuer de mieux connaître les moeurs patriciennes et les coulisses de la politique, il savait mieux qu'elle ce qu'était la réalité du terrain et des petites gens. Il n'avait pas gagné le surnom de héros de Ruvia par la volonté de l'Imperator, mais bien par la plèbe qui avait vu en lui en champion du peuple qui se préoccupait d'eux. Les mâchoires toujours serrées, il enroula un bras autour des frêles épaules de son épouse, acceptant la demande de paix qu'elle formulait. Il déclara ensuite.

Et je suis sûr que tu ne feras pas d'extravagances puisque je déciderai de qui aura ou non une rente. Je te fais confiance pour me présenter les meilleurs. Sois assurée que je ne financerais que les meilleurs des meilleurs ... Si je suis convaincu par leur talent ... Uniquement !

Il déposa un petit baiser sur le front de son épouse, retrouvant peu à peu son calme, même s'il n'aimait pas avoir cédé aussi facilement. Pris d'une soudaine bouffée de panique, il releva la tête.

Et tu me jures qu'il n'y a pas de comédiens, n'est-ce pas ?
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeDim 10 Mai - 12:06


Là, lové dans les bras dont elle avait tant besoin, elle laissa s’échapper à nouveau un petit rire. Elle pouvait bien se laisser aller à quelques moqueries à présent qu’elle avait eu gain de cause ! Caïus était certes têtu, mais jamais il ne pourrait égaler la volonté de fer de son épouse. Le sang des Julii, empoisonnant ses filles dans d’horribles humeurs à coup sûr. Lui glissant un regard brillant de malice, elle laissa un instant le doute s’éprendre de son pauvre petit cœur qui avait pourtant eu assez de misère pour la journée.

« Que d’honnêtes citoyens. Et si Naïra s’était fourvoyée, nous le chasserons séance tenante ».

Avec l’habilité des femmes, elle se hissa sur la pointe des pieds pour lui glisser un simple baiser au coin des lèvres. Cette promesse muette laissait entrevoir au procurateur ce qu’il voulait bien y voir ; elle se dédouanait habilement de la mésentente, et offrait plutôt toute la chaleur féline qu’on lui accordait. A la capitale, elle jouissait d’une belle réputation – quoiqu’à peine ternit par le fiel des jaloux et des envieux. Sa sauvagerie attirait et fascinait bon nombre de ses compères, qui s’étonnaient encore que le Héros de Ruvia ne lui ait déjà dégondé la mâchoire. Loin de garder pour elle son avis, elle s’exprimait librement au sein de sa domus et n’avait jamais hésité à remettre correctement à leur place quelques sénateurs malavisés du tempérament de la créature. Chaque jour elle priait les Dieux de lui avoir offert un mari et un père aussi bon et doux ; quoique sa douceur puisse être toute relative. Ces noces de convenance s’étaient rapidement muées en un sentiment profond, de respect et d’affection mêlés.

Des pas claudiquant rompirent finalement le charme, tandis que se découpait déjà non loin la silhouette de la magister suppléée de sa seconde. Sa nourrice devenue vieille, sa principale confidente, demeurait malgré l’âge une belle femme fière, à la tête haute malgré les cheveux grisonnant. La Protera avait beau lui en faire voir de toute les couleurs – encore aujourd’hui -, elle avait pour l’étrangère un amour sincère qu’elle n’osa exprimer. Elle l’avait en partie élevée, et quoiqu’elle demeurait esclave, la domina s’assurait chaque jour de son confort en lui octroyant parfois quelques privilèges bien mérités. Quant à l’autre, elle ne lui accorda pas même une œillade. Elle devrait faire ses preuves, et jusqu’alors elle n’avait ni sa confiance ni son respect.

« Dominii, ils vous attendent au jardin. Nous les avons fait surveiller par les licteurs ».
Sans se départir de l’étreinte, elle se tourna assez pour faire face. « Combien sont venus ? »
« Huit, Domina ».
« Bien. Assure-toi de leur faire servir à boire s’ils le désirent et retire-toi ».

Lorsqu’enfin les esclaves disparurent au détour d’un couloir, elle afficha un sourire radieux. Plus excitée qu’une enfant, et surtout pleinement ravie de passer d’avantage qu’une nuit avec Caïus, elle aurait aussi bien pu sauter sur place si la grosseur de son ventre ne l’avait pas empêché. Elle aimait l’art, c’était vrai. Mais elle appréciait d’autant plus le pouvoir si celui-ci pouvait être partagé par Feles. Elle espérait que ses intrigues lui seraient favorables rapidement auprès de la plèbe ; et si ce n’était guère le cas alors elle essayerait encore et encore jusqu’à obtenir du peuple sa reconnaissance.

« Ne faisons pas attendre nos invités, mon amour. Et je t’en prie, essaye d’y prendre un peu plaisir »
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeDim 10 Mai - 17:29


Que d’honnêtes citoyens. Et si Naïra s’était fourvoyée, nous le chasserons séance tenante.

Il ne prit pas les propos rassurants de son épouse pour une victoire. Il ne se leurrait pas. Il avait cédé à son caprice sans vraiment lui opposer beaucoup de résistance, mais au moins il n'aurait pas à traiter avec des traînes-savates qui déclamaient des textes dans les amphithéâtres ou dans les rues, comme de vulgaires mendiants qui promettaient la fin des Temps.

Naïra les rejoignit avec la jeune Tindu qui la suivait comme une ombre. Le couple Proterii restait enlacé, profitant d'un trop rare moment de proximité entre eux, malgré les griefs qui avaient pu faire monter le ton. La vieille esclave de Laelia, bien trop chouchouté par sa maîtresse selon l'avis de Caïus, inclina légèrement la tête avant de faire son annonce.

Dominii, ils vous attendent au jardin. Nous les avons fait surveiller par les licteurs.
Combien sont venus ?
Huit, Domina.

Les yeux du Procurator roulèrent dans leurs orbites en se dirigeant vers le ciel. Il adressa une supplique à Eka pour qu'il lui apporte son aide en faisant filer le temps un peu plus vite. Laelia ne releva l'attitude de son époux et donna ses instructions en bonne domina.

Bien. Assure-toi de leur faire servir à boire s’ils le désirent et retire-toi.

Pour qui connaissait Laelia, il était simple de déceler l'excitation dans sa voix. Elle quitta la tranquillité de l'étreinte de son époux pour se tourner vers lui, un large sourire illuminant son doux visage.

Ne faisons pas attendre nos invités, mon amour. Et je t’en prie, essaye d’y prendre un peu plaisir.

Elle le connaissait si bien. Il se força à sourire avant d'emboîter le pas de la jeune femme pour se diriger dans le jardin. Un soupir lui échappa en arrivant en vue du groupe d'étrangers qui les attendaient. Il s'humecta les lèvres en passant rapidement sa langue entre elles et sourit en essayant de faire preuve d'un peu de conviction face aux artistes. Il se pencha vers son épouse et lui chuchota.

Je te laisse me guider. Tu sauras sûrement mieux les aborder que moi.

Sur ces mots, le couple s'approcha du premier homme sur leur route. Un homme au visage légèrement ridé et aux cheveux grisonnants sur les tempes. Derrière lui, une grosse amphore peinte trônait sur un petit piédestal.
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeVen 15 Mai - 17:37


Le temps était presque bon. La saison s’amorçait gentiment à présent que les affres de Nix s’étaient passés sur les chemins de l’exil. Le ciel, quoique gris, ne laissait point encore tomber les gouttelettes cristallines qui ornaient habituellement l’air de l’Oncmélie. Voilà qui l’arrangea bien : le jardin de la domus était assez agréable, quoique les plantes qui l’ornaient n’avait rien de particulièrement exotiques. Son enceinte, haute de taille, offrait un cadre parfait pour que chacun des huit chanceux disposent leur attirail sans être trop à l’étroit. Aimable, arborant un sourire affable, elle s’avança en balayant rapidement l’assemblée caquetante du regard. Les licteurs s’étaient chargés de les surveiller, mais pas encore de les faire taire ; tous jacassaient comme au forum, sirotant leur coupe, bienheureux sûrement de l’égard reçu par le procurateur et sa femme. Laelia jubilait déjà car bientôt, la rumeur s’étendrait par-delà l’épais mur de la résidence des patriciens. Ainsi – elle l’espéra du moins – ils s’attireraient un peu de sympathie de la plèbe. C’était là tout l’objectif du jour quoique son compagnon y trouva encore à redire. Et si au passage elle pouvait s’entourer de belles choses, alors elle n’aurait pas perdu sa journée.

« Montre-nous ta pièce, Citoyen ».

L’homme petit, aux mains calleuses dont les ongles avaient été noircis par la glaise, emmena les bienfaiteurs au-devant de l’amphore. La patricienne laissa courir ses mains habiles sur l’objet sans en départir de sa mine convenue. Elle n’était guère de grande qualité ; quelques irrégularités et un grain trop peu lisse lui laissa à penser que c’était certes un bien bel objet, mais qu’il n’aurait jamais de vocations plus esthétiques. Elle observa quelques secondes la frise prenait place entre les anses, un peu amusée.

« Quel est donc cette scène ? »
« Ruvios devant Soltar, Patricienne Protera ».
Un petit rire échappa de ses lèvres. « Je connais bien cette histoire oui. Sais-tu que l’on dit que les Julius en sont les descendants ? ».
« Je n’en ai jamais entendu parler ».
« Les hommes de la famille ont toujours été sous la protection de Soltar ». Elle s’interrompit un instant, adressant une œillade complice à Caïus à son côté. « Et aujourd’hui encore. Cette histoire remonte si loin… Que penses-tu des héros de notre temps ? ».
Un peu perplexe, l’homme fronça les sourcils alors que le brouhaha s’estompait à la faveur d’un chuchotis plus supportable. Ainsi donc chacun écoutait les bavardages ? Très bien ! Cela ne faisait que mieux son affaire. « Je crois… », il hésita un bref instant à poursuivre. « Je crois qu’on ne peut être un héros que lorsque nos exploits traversent le temps et l’espace ».
Ses dents se dévoilèrent dans une charmante mimique qui n’aurait pu plus jurer avec l’acier de ses mires, brillantes comme le soleil. Bien accordée à son Chat, voilà qu’elle-même attrapait les souris avec une facilité presque injuste pour les félins de cette terre reculée. « Nous voilà bien raccord ! Peut-être aimeriez-vous entendre l’histoire du héros de Ruvia par le héros lui-même ? Je gage qu’après l’avoir écouté, vous vous empresserez de la conter à votre tour ! ».

La voix caressante de la Domina ne tolérai aucun refus, ni de la part du potier – et de ses ouailles qui se trouvaient bien muets à présent -, que de son époux qu’elle avait mêlé malgré lui à ce petit jeu tout à fait charmant.
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeSam 16 Mai - 12:14


Montre-nous ta pièce, Citoyen.

Le petit bonhomme aux ongles noircis par le labeur laissa Laelia s'approcher de son oeuvre avec une pointe de nervosité dans le regard. La grosse amphore peinte ressemblait à toutes ses semblables, à l'exception d'une frise qui l'entourait. Une fioriture bien inutile aux goûts du Procurator qui ne pouvait s'empêcher de n'y voir aucun intérêt. Il dissimulait son scepticisme derrière un sourcil légèrement relevé tandis que son épouse se montrait plus curieuse. Elle était dans son élément, à n'en point douter.

Quel est donc cette scène ?
Ruvios devant Soltar, Patricienne Protera.
Je connais bien cette histoire oui. Sais-tu que l’on dit que les Julius en sont les descendants ?
Je n’en ai jamais entendu parler.
Les hommes de la famille ont toujours été sous la protection de Soltar. Et aujourd’hui encore. Cette histoire remonte si loin… Que penses-tu des héros de notre temps ?
Je crois… Je crois qu’on ne peut être un héros que lorsque nos exploits traversent le temps et l’espace.

Le regard de Laelia coula vers lui avec tendresse. Il comprit où elle voulait en venir et il ne put retenir un sourire gêné en voyant la fierté avec laquelle elle allait amener la discussion sur sa propre renommée. Elle lui donna raison immédiatement en renchérissant aux paroles du potier.

Nous voilà bien raccord ! Peut-être aimeriez-vous entendre l’histoire du héros de Ruvia par le héros lui-même ? Je gage qu’après l’avoir écouté, vous vous empresserez de la conter à votre tour !

Les quelques bavardages qui bourdonnaient dans le jardin s'étaient fait plus discret tandis que chacun tendaient l'oreille pour entendre les paroles des Dominii. Laelia semblait ravie d'avoir entraîné l'auditoire dans l'affaire au même titre que le Procurator qui n'avait d'autre choix que de narrer ses exploits passés. Il prit une profonde inspiration, souriant légèrement avant de s'exécuter.

Ce sont les habitants des quartiers populaires qui m'ont donnés ce surnom.

Il tourna la tête vers le reste du jardin où les artistes avaient même fait silence et s'approchaient lentement pour ne pas manquer le récit de Caïus. Il adressa un regard vif à son épouse, mêlant amusement et remontrance de l'avoir mis dans cette situation. Il était certes ambitieux, voir même arrogant, mais il savait qu'il était facile de passer pour pédant lorsqu'on livrait sa propre légende. Il devait peser ses mots, car aussi vrai que son récit pouvait le servir, il pouvait tout autant l'handicaper. Il devait faire preuve de parcimonie et d'humilité. Il poursuivit.

Il y a des années de cela, les prémices d'une famine se faisaient ressentir dans les quartiers plébéiens de la capitale. Des centaines d'habitants n'avaient plus à manger, les greniers semblaient désespérément vides et les docks sur l'Alania ne recevaient plus de nourriture depuis les provinces. La population s'agitait, les vieillards et les enfants s'amaigrissaient. Une honte pour Ruvia et pour tout l'Empire.

Il s'approcha doucement de Laelia pour passer un bras autour de ses hanches.

La foule en colère était aux portes de la révolte et certains ont même voulu faire brûler la ville entière. C'est d'ailleurs en luttant contre cet incendie que j'ai rencontré ma charmante épouse pour la première fois, en empêchant Ruvia de se consumer sous les flammes.

Il échangea un regard tendre avec sa bien-aimée avant de continuer son histoire.

Il s'est avéré après enquête que plusieurs préfets de Ruvia complotaient contre l'Imperator lui-même et avait fabriqué cette famine de toutes pièces afin de faire monter la grogne contre Paetius. La corruption de ces hauts magistrats étaient un poison qui tuait lentement le peuple pour faire du mal à notre cher Empereur. Les Dieux m'ont accordés leur bienveillance en me permettant de démanteler cette ignominie et de mettre fin à ces sombres agissements. Leur sinistre jeu avaient durés pendant des mois, des années même et lorsqu'enfin, j'ai pu faire réapprovisionner les greniers et permettre à chacun de pouvoir faire son pain et nourrir ses enfants, les plébéiens m'ont surnommés le héros de Ruvia.

En livrant sa propre histoire, il inspectait distraitement les autres oeuvres qui étaient affichaient dans son jardin. Même s'il était peu sensible à l'art, il nota une statuette finement sculptée quelques pas plus loin. Nul doute qu'il prendrait le temps de l'observait de plus près, au contraire de l'amphore qu'il avait sous les yeux et qui ne lui inspirait pas grand chose. Il conclut en posant de nouveau son regard sur le potier aux traits marqués par le temps.

Ironiquement, on m'a collé ce surnom alors que je n'ai fait que mon devoir. Servir l'Imperator et protéger le peuple de l'Empire ... Une mission qui est toujours la même maintenant que je suis ici, en Oncmelia Minor. Une histoire bien plus banale que celle de Ruvios, j'en conviens. Traversera-t-elle les âges ? J'en doute, mais cela ne me détournera pas de mon devoir.

La main qui reposait sur la hanche de son épouse caressa légèrement l'étoffe de la stola raffinée de son épouse avant que son regard ne retourna vers la statue non loin. Quelques sourires étaient apparus sur les visages des artistes qui ne manqueraient pas, il en était convaincu, de se servir de son récit pour s'adonner à quelques flatteries aussi inutiles qu'agaçantes lors des prochains échanges. Il adressa un hochement de tête et un sourire aimable au potier, avant de faire quelques pas vers l'artiste suivant. Celui-ci avait quelques tablettes de cire gravées sous le bras et souriait à pleines dents. Le Feles ne put que s'interroger sur ce qu'allait lui présenter cet énergumène grassouillet et aux cheveux blonds.

Ave Procurator. Ave Domina Protera. Je suis Alistopanus, philosophe.

Le Procurator prit une profonde inspiration, un brin exaspéré, rien que par le titre de l'inconnu. La journée allait être longue.


Dernière édition par Caïus Protero Feles le Mar 16 Juin - 12:48, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeLun 15 Juin - 21:11


Une main maternelle sur son giron, elle alla à la suite du Procurator dont la mine – quoique courtoise – cachait bien mal son agacement pour qui le connaissait tout à fait. Pour autant elle ne s’en préoccupa guère ; l’humeur taciturne du patricien n’avait plus aucun secret pour la belle, qui tout au contraire de lui, se trouvait fort à son aise parmi tous ces gens. Et elle l’était non seulement parce qu’elle apprécia les belles choses, mais surtout que c’était là sûrement leur moyen le plus sûr de s’installer à long terme dans les bonnes grâces des gens du pays. L’on conterait bientôt du Nord au Sud, et de l’Est à l’Ouest, toute les bonnes vertus de ces nouveaux arrivants. Elle gageait même que si la chance leur souriait assez, on les dirait plus oncméliens que les natifs. Si elle ne trouvait pas forcément flatteur l’allusion, au moins Laelia savait que cela assiérait assez l’autorité de sa famille pour vivre paisiblement.

Et qui ne rêvait pas de la tranquillité ? Ses doigts se raffermirent un peu alors que flottait ses pensées vers des rives plus ombrageuses. Les Proterii étaient des cibles de choix. Et pour le moment, ni Caïus ni elle ne jouissait d’assez d’arguments pour ne pas paraître comme un simple gibier. Elle ne connaissait que trop bien les mœurs des ambitieux. Et puis, n’était-ce pas le sang des Julii qui coulait dans ses veines ? Quiconque s’en prenait à eux, s’en prenait directement à l’Empereur. Son cœur se serra quelque peu en songeant à son oncle, et à sa vie d’avant. Ruvia était une cour qu’elle maîtrisait bien avec le temps : des ânes bâtés aux agneaux, elle s’était fait fort de conduire son mariage en savant berger. Un bref sourire à son époux acheva son trait d’esprit silencieux. Nul doute qu’il aurait à redire sur la dernière affirmation, mais elle aimât à ce que ses réflexions muettes ne souffrent d’aucune contestation. D’ailleurs, elle appréciait ne pas se faire contester du tout, jamais.

Portant ses perles grises vers le philosophe aimable, elle s’intéressa à l’intriguant personnage. La philosophie – au même titre que la poésie – faisait partie de ces Arts utiles, rapidement. Quand une statue ou un vase n’avait qu’une influence symbolique, la parole quant à elle avait cette sensation d’urgence. Comme si, impérieusement déclamé, tout texte se faisait habiter d’une vocation instructive, affirmative et de changement. Et puis à la différence des autres, les proclamateurs de l’Art Vivant gagnaient en notoriété bien plus rapidement. La plèbe avait tout le loisir de se faire une idée ; les joutes sur le forum, les pamphlets haranguant la foule… Nul ne pouvait bien longtemps ignorer les appels de ces maîtres des mots. Tout aussi curieuse qu’avec le potier, elle attrapa le bras du Procurator.

« Et de quelle école es-tu Alistopanus, philosophe ? »

« J’aime à me croire proche de Giasgor, mon maître à penser avec lequel je me suis formé à la capitale ; lorsque je suis revenu ici, sur les terres de ma jeunesse, je n’aurais jamais cru y voir arriver le héros de Ruvia ».

Bien contente de le savoir venir de chez eux, la maîtresse de maison savait d’ores et déjà qu’il leur serait utile. Il avait connaissance de la renommée de Caïus, et ses prises de paroles ne pourraient qu’être bienvenue le moment opportun. « Et pourquoi requiert-tu notre protection, Alistopanus ? En étant l’élève d’un tel homme, nul doute que ta gloire est toute assurée. Nous ne pourrons t’offrir davantage, je le crains. Quel serais ton intérêt ? ».

L’œil brillant d’intelligence du bonhomme ne l’inquiétait guère. Elle n’était certes pas la plus sage de tous, ni ne possédait le moindre don pour les savoirs. Pour autant, elle avait la main sur l’homme qui l’avait sur la bourse et en cela, elle ne craignait trop rien à s’aventurer plus avant avec le curieux personnage. Il fallait qu’il la séduise autant que le réfractaire râleur à sa droite, et pour cela, il devrait sans aucun doute montrer toute l’étendue de sa verve sous peu.
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeMar 16 Juin - 14:02


Et de quelle école es-tu Alistopanus, philosophe ?

Laelia avait enroulé son bras autour de celui de Caïus, l'enserrant comme un serpent qui jouait avec sa proie. Il avait tant envie de s'éloigner de cette bande de gaillards à la mine triste et au corps frêle. Il avait du mal à cacher son désintérêt pour cet après-midi et ce, même s'il s'efforçait à chaque instant de faire bonne figure comme il l'avait promis à son épouse. Il semblait qu'Eika s'acharnait à ralentir les grains de sa clépsydre et à ralentir la course d'Aurin dans le ciel nuageux au-dessus de la domus.

J’aime à me croire proche de Giasgor, mon maître à penser avec lequel je me suis formé à la capitale ; lorsque je suis revenu ici, sur les terres de ma jeunesse, je n’aurais jamais cru y voir arriver le héros de Ruvia.

La jeune femme hochait de la tête avec un sourire d'ores et déjà conquise par le philosophe, avant même qu'il n'ait eu l'opportunité de prononcer une phrase de plus. Le Procurator jeta un coup d'oeil en coin vers Laelia avant de reposer son regard sur l'orateur. Il était prêt à parier qu'elle ferait de cet être maigrelet un de ses favoris du jour. Elle anticipa la question qui brûlait les lèvres de son époux. Elle le connaissait par coeur, ou elle manoeuvrait avec habilité pour que le sophiste en vienne à convaincre un Feles rétif.

Et pourquoi requiers-tu notre protection, Alistopanus ? En étant l’élève d’un tel homme, nul doute que ta gloire est toute assurée. Nous ne pourrons t’offrir davantage, je le crains. Quel serait ton intérêt ?

Ses lèvres s'étirèrent en un sourire fin et il replaça une mèche rebelle derrière son oreille droite avant de planter son regard dans celui du Procurator. Les traits figés dans un mutisme froid, Caïus soutenait les yeux bleu acier de l'homme d'âge avancé. La voix légèrement nasillarde du philosophe brisa le silence.

Comme me l'a enseigné mon maître, il y a dans toutes situtations, dans tous évènements, un bénéfice pragmatique et rationnel, même si parfois on ne peut en saisir totalement la finalité dès le départ. J'ose te prendre en exemple Procurator. Sans ces comploteurs ourdissant dans l'ombre et affamant les masses, point d'incendie ravageant la ville et point de rencontre avec ta charmante épouse.

Il lorgna avec douceur sur le giron de Laelia qu'elle caressait du bout des doigts sans vraiment y prêter attention. Le philosophe poursuivit sa démonstration.

Et ta descendance ne serait pas. De ces vils agissements de sinistres comploteurs, tu as tiré une gloire et un bonheur conjugual qui t'ont conduit aujourd'hui à un poste de haut magistrat de province. Tu as su profiter, si tu me permets l'emploi de ce mot, de cette situation pour construire ta propre réputation, forger ta destinée et t'élever parmi les patriciens de Ruvia.

Il leva sa main droite avant de prendre une pose d'orateur. L'homme paraissait à l'aise, jouant avec les mots sans élever la voix ni accentuer une phrase plus qu'une autre. Il usait d'un ton qui appelait à l'évidence, piquant l'intérêt de son auditeur sans se donner l'air de faire la leçon. Il tourna son regard vers Laelia en continuant son réquisitoire.

Même si vous êtes arrivé depuis peu, vous avez sûrement remarqué que l'Oncmélie est différente de la capitale. La province est isolée, les nouvelles y parviennent en dernier, de même que les progrès technologiques ou les courants de pensée plus moderne.

Il revint à Caïus sans se départir de son aimable et doux sourire.

J'ai eu vent de ton discours à la Curie il y a quelques jours. Il m'a paru inspiré et teinté de cette modernité tout à fait ruvienne. Les habitants de la province sont, sans aller jusqu'à employer le mot "réfractaires", plutôt traditionnalistes et sont plus ouverts à une pensée traditionnelle et mythologique. Là où à Ruvia, le nom de mon maître est reconnu et ou le sophisme est pris en compte avec grand intérêt, je me heurte régulièrement à une certaine défiance et je pense que toi aussi, Procurator, tu risques de t'y heurter malgré ta volonté d'oeuvrer pour le bien de tous. Et c'est là que je me suis fait connaître auprès de ton envoyé. Si nous désirons l'un et l'autre apporter de la modernité dans la province, nous pourrions unir nos savoir-faire. Avec la protection et le soutien d'un Diumvir, la défiance envers ma pensée se dissipera et puisque nous souhaitons tous deux moderniser la province, tu trouveras en moi un allié lors des joutes oratoires sur le forum. Je n'irai pas jusqu'à prétendre que tu as besoin de moi mais j'ose affirmer que nous pouvons agir ensemble pour mener à bien notre but commun.

Il parlait bien, le Feles devait le reconnaître. Il avait utiliser beaucoup de mots pour dire bien peu de choses, tel un sénateur qui argumentait pour faire passer l'édit dont il était l'auteur. À défaut des autres artistes qui s'était présenté cet après-midi là, il avait l'avantage de pouvoir se montrer utile dans l'immédiat. Il hocha la tête en direction d'Alistoplanus avant de déclarer doucement.

Cela mérite réflexion. Nous te ferons savoir notre décision de t'accorder ou non notre protection et notre mécénat.

Il tourna la tête avant de se diriger vers le suivant. Les sourcils de Caïus se levèrent malgré lui en apercevant la sculpture qui attendait derrière l'inconnu. Un casseur de cailloux. Aussi vrai qu'il s'en fichait comme de sa première paire de calcei, Laelia semblait, elle, bien plus intriguée et intéressée par l'oeuvre du bonhomme. Le Procurator ne parvint même plus à offrir un sourire de façade à l'étranger. Cette fois, ce serait Laelia qu'il faudrait convaincre, car lui était prêt à passer son chemin avant que le moindre mot ne quitte les lèvres du sculpteur.
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeMer 15 Juil - 21:43

Elle écouta avec attention le discours du philosophe. Aussi vrai qu’ils étaient sapiens, ils n’en restaient pas moins très inégaux selon leurs écoles. Laelia, pour qui ces choses-là avait bien moins de sens que pour Caïus, trouva l’Edelmien ni bon ni mauvais. Pouvait-on dès lors en croire quelques gages de qualité ? Plutôt elle s’attarda à détailler son allure lorsqu’il s’exprimait. Il avait – pour sûr – une voix assurée et ferme, mais doucereuse à la fois. Le genre qui vous faisait stopper net, et permettait à l’auditoire le plus dissipé de porter une oreille curieuse. Car mine de rien, elle eut envie d’en apprendre davantage sur le curieux bonhomme sans que celui-ci ne brilla par sa verve ; à croire finalement que le vrai talent de l’orateur ne résidait pas dans les mots qu’il employait, mais plutôt dans la manière de les exprimer. Et c’était là un talent tout masculin. Elle lorgna une brève seconde son époux, l’imaginant avec ferveur devant le sénat. Quoique mesuré, le Chat avait su se montrer bien persuasif avec elle, pour qu’elle ne cède enfin à la raison. Là, au milieu des patriciens ébahis, le soleil jouant sur sa peau et dans ses iris qu’elle seule aurait aimé avoir le bonheur de contempler à cet instant.

Distraite de son activité, elle ne rougit même pas lorsque, revenant à la réalité, elle n’avait plus entendu un traitre mot de l’échange. Cela avait dû se remarquer mais elle s’en moqua bien ; qu’aucun ne lui fasse la moindre réflexion ! Plus féroce qu’une légion entière selon les dire de son propre frère, la grossesse pouvait rendre son humeur mauvaise à la moindre contrariété. Et à tout réfléchir, être exilée en était une suffisante pour qu’on lui céda le moindre de ses désirs pour la dizaine d’années à venir. La Protera offrit tout de même un sourire poli à Alistopanus. Il venait sans doute de décrocher sa rente. Il pourrait bien servir des tirades moyennes à la plèbe, la qualité importait peu du temps qu’on l’écouta suffisamment. Sa bonne réputation aiderait sûrement leurs projets après tout. Et Caïus, toujours aussi peu enclin à ce petit jeu, s’échappa pour l’artisan qui suivait.

La sculpture, de taille modeste – sûrement pour s’assurer d’un transport facile -, n’était pas encore discernable. L’artiste avait soigneusement recouvert l’œuvre d’un tissu alors qu’il accueillait le couple avec la même mine affable que ses prédécesseurs. L’œil avisé de la ruvienne s’éclaira un brin ; si elle n’était pas la meilleure pour juger d’un homme de sciences, voilà plutôt un domaine où elle excellait. N’avait-elle pas elle-même lancé quelques célèbres sculpteurs à la capitale ? Certains, dans les salons les plus médisants, lui prêtait plus de chance que de flair mais elle s’en moquait bien ! Lorsqu’on aimait les belles choses, les choses faites et bien faites, l’on s’assurait toujours de la qualité du détail. Elle choisissait toujours les scènes, la mise en place, les dimensions si bien qu’il ne restait plus que pour seule variable le talent de l’artisan. Alors comme on auscultait les bêtes, elle détailla ses mains. Elles semblaient calleuses. Elle s’arrêta, tirant son époux de la main, l’obligeant à une halte dont visiblement il se serait passé.

« Montre-moi ton œuvre citoyen ».

Sa voix n’avait plus rien des banalités antérieures, préférant l’ordre clair et sans détour. Les prunelles grises scrutaient avec intelligence la forme dissimulée. Alors enfin elle révélait son visage le plus vrai. L’homme, d’abord étonné, s’exécuta sans un mot. Ses mains, qui paraissait trop dures, trop grandes, attrapèrent la toile avec une infini douceur. Un léger sourire s’étira sur les lèvres de la patricienne qui ne fût pas plus déçue de ce qui se trouva au-dessous. Il s’agissait d’un buste de Tiberius Julius Oncmelius. Aucun doute, elle avait déjà vu sa représentation la plus fidèle au palais impérial. Mais ce ne fût pas tant le sujet que la réalisation qui l’interpela. Les traits anguleux d’une mâchoire forte, les pommettes hautes, tout semblait dans une étrange harmonie, liés par quelques pentes douces ne trahissant aucune marque de son labeur. Tout était lissé parfaitement. Elle lâcha le Procurateur pour venir de ses doigts tâter la surface, comme l’on caresserait une femme, un enfant, un mari. Aucun doute, elle venait certainement de faire entrer chez elle le sculpteur le plus doué de toute la province. Et si son cœur tout conquis battait dans sa poitrine, elle se garda bien de montrer sa joie à l’auteur. Seul le sourire qu’elle ne pouvait réprimer symbolisait toute l’exaltation qu’elle ressentait.

« Quel est ton nom ? »
« Paxitelus »
« Ne fais-tu que des bustes ? »
« Non Domina Protera ».
« C’est bien ». Pas plus, pas moins. Une dernière caresse acheva la discussion. Elle n’avait guère besoin d’en savoir plus. Déjà germait en elle une multitude de pièces à lui faire réaliser pour le seul plaisir, d’un jour, les posséder. « Aimes-tu les femmes, Praxitelus ? ».
La stupéfaction générale n’aurait pas manqué de la faire rire en d’autres circonstances, mais elle était toute sérieuse lorsque, posément, elle retrouva l’accotement du Feles. « Je… Eh bien… ». Il se gratta nerveusement la nuque, ne sachant trop s’il devait y répondre. « Je… Oui. Comme tout l’monde j’imagine ».
« Exactement, comme tout le monde ». Satisfaite, elle décocha une œillade à Caïus qui laissa peu de place au doute : elle voulait ce sculpteur, et bien fol celui qui tenterait de l’en dissuader.
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeSam 18 Juil - 18:36

Ils se présentèrent donc devant le tailleur de pierre. Les traits du Feles s'étaient légèrement durcis lorsqu'il posa un regard sceptique sur le drap qui cachait l'oeuvre de l'artisan aux yeux des Proterii. Au contraire, Laelia sembla s'illuminer alors qu'elle avait presque paru éteinte devant le discours du philosophe. Elle s'adressa au sculpteur avec la confiance et la curiosité qui la caractérisait face à ces gens qui jouaient du marteau et du burin.

Montre-moi ton œuvre citoyen.

L'homme s'exécuta, révélant un buste représentant un homme à la mâchoire carrée et légèrement proéminente. Son épouse s'éloigna de l'étreinte distraite du Procurator pour inspecter de près le travail du sculpteur. Il prit une profonde inspiration car il se doutait bien qu'elle avait eu son intérêt piqué par ce type aux mains épaisses et aux doigts potelés. Elle se mit à caresser la pierre avec attention et tourna autour du buste d'Oncmelius en fronçant légèrement le nez, comme elle le faisait souvent sans s'en apercevoir lorsqu'elle était concentrée. Elle redressa ses yeux couleur d'acier pour engager la conversation avec le casseur de pierre.

Quel est ton nom ?
Paxitelus.
Ne fais-tu que des bustes ?
Non Domina Protera.
C’est bien.

Caïus ne put retenir son regard de grimper vers le ciel en adressant un prière silencieuse à Sanaan. Pour qu'elle porte le moindre intérêt au travail de ce bonhomme, c'est qu'il lui avait tapé dans l'oeil, du moins son travail. Pour le Feles, un caillou sculpté ressemblait à un autre et même en étant peu sensible à l'art, il pouvait apprécier une belle peinture ou un air de musique virtuose, mais la sculpture était quelque chose qui lui échappait totalement. Sa bourse aurait aimé que sa femme portât le même désintérêt pour cette discipline, mais malheureusement c'était loin d'être le cas.

Aimes-tu les femmes, Praxitelus ?
Je… Eh bien… Je… Oui. Comme tout l’monde j’imagine.
Exactement, comme tout le monde.

Il échangea un regard avec Laelia. Oh, il le connaissait ce regard. Satisfaite et avide, elle semblait conquise par l'oeuvre de Paxitelus et savait déjà quoi lui demander comme ouvrage. Il coula son regard jusqu'au sculpteur et ce dernier put y lire une lueur de compassion. Le pauvre était une mouche qui venait de se poser sur la toile d'une araignée, et même s'il aimait cette araignée de tout son coeur, il savait qu'elle serait des plus exigentes avec l'artisan. Il hocha la tête dans sa direction avant que son épouse ne lui tira la main jusqu'à l'artiste suivant.

Le couple rencontra encore une demi douzaine d'artistes. Là un poète, ici un peintre et là encore un casseur de cailloux qui eut moins de succès que le précédent. Ce fut long et fastidieux pour le Procurator et son inattention et sa mauvaise humeur se fit de plus en plus évidente à mesure qu'il se retrouvait face aux diverses oeuvres qu'on lui présentait. C'est que le temps était long lorsqu'on attendait. Puis enfin, après près de deux heures à aller et venir entre les artisans, revenant en arrière pour comparer les pièces, deviser avec les artistes, il put enfin prendre congé des invités de sa moitié. Seulement, il n'en avait pas fini avec ces ploucs pour la journée. Il s'affala sur un des lit ensoufflant et se saisit d'une pomme qui trônait au centre d'une jatte dorée qui débordait de fruits. Il joua les ingénus lorsqu'il s'adressa à sa femme.

Bon ... C'était assez désagréable. Tu as remarqué ? Le dernier sentait le chien mouillé.

Il croqua à pleines dents dans le fruit à la peau rouge et pinça légèrement les lèvres en déplorant le manque de sucre. Tout dans cette province avait un goût acidulé assez désagréable. Cela n'empêcha pas le Feles de déclarer avec une pointe d'amusement et une bonne dose de cynisme.

Et donc après avoir jugé sur pièce ... Ils étaient tous mauvais, ils n'auront rien.

Il reprit une bouchée avec un petit sourire taquin et malicieux en attendant la tempête qui ne manquerait pas d'éclater face à lui. Son épouse n'était pas connu pour son sens de l'humour.
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeMar 21 Juil - 13:47

L’après-midi sembla passer si vite, qu’elle ne put retenir une petite moue lorsqu’enfin, les artistes furent raccompagnés. Ils avaient pris le temps de saluer chacun d’eux, de discuter, et malgré le temps maussade de la région, elle avait apprécié le moment ; un instant trop rare qui lui rappelait ses habitudes à Ruvia. Et même s’il ne l’avouerait jamais, elle soupçonnait Caïus de s’y être finalement amusé. Car outre l’activité qui ne lui plaisait guère, ils avaient enfin passé du temps ensemble. Cela n’était pas arrivé depuis leur installation dans la confortable domus. Et si elle ne se fichait pas autant que lui de la tâche à laquelle ils s’étaient attelés, elle avait apprécié déambuler à son bras. Elle l’avouait parfois à mi-mot, le soir venu, mais ici elle se sentait seule. Elle n’avait point d’amis avec qui sortir, et sa fin de grossesse l’empêchait de prendre trop de risque. Le petit qu’elle choyait dans son giron rebondit lui laissait si peu de moment de paix, qu’il était presque impossible qu’elle se rende plus d’une heure ou deux à l’extérieur. D’autant qu’elle se méfiait de ces gens rustauds. Tout patriciens qu’ils étaient, ils n’avaient pas moins l’odeur de la fange bien accrochée.

Elle suivit son époux, satisfaite, un petit sourire aux lèvres. Certes le Procurateur n’avait pas fait beaucoup d’efforts, mais au moins n’avait-il pas écourté le petit plaisir de sa compagne. Plutôt, serrant les dents, il s’était laissé mener. Elle le connaissait suffisamment pour le savoir capable d’agir plus farouchement. Alors elle ne se vexa pas lorsqu’il s’étala de son long, piochant quelques fruits d’une main distraite, et s’assurant de paraitre le plus désagréable possible. Laelia ne fronça les sourcils qu’après, lorsqu’il annonça de sa voix claironnante toute sa mauvaise foi. Là ! Il pouvait bien jouer le Pater Familias si cela lui plaisait, mais pas avec elle et pas sous leur toit ! Et quiconque connaissait la nièce de l’empereur savait qu’elle ne badinait pas ; colérique et implacable, ce ne serait sûrement pas la première discorde qui règnerait entre les murs Edelmiens. On disait volontiers aussi que le couple ne s’accordait jamais sur rien. Pour autant, nul doute que ces deux là s’aimaient sincèrement.

« Caïus Protero Feles ne joues pas avec ma patience ! ». La trogne vexée, une main impérieuse sur son ventre, elle le toisait de toute sa modeste taille. Elle lui aurait bien fait avaler sa pomme entière tant il l’exaspérait lorsqu’il était ainsi. « Les deux philosophes, le peintre et le sculpteur au buste ». Campée sur ses pieds, il était clair que cette partie-là, il ne la gagnerait pas.
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeMar 21 Juil - 18:00


Il n'avait pas fallu la titiller très longtemps pour qu'elle sorte les griffes et bondisse.

Caïus Protero Feles ne joues pas avec ma patience !

Un petit ricanement aussi amusé que satisfait se fit entendre avant que le Feles ne morde une fois de plus dans la pomme. Même vexée et mécontente, elle était belle. Sa lèvre inférieure légèrement crispée, la main posée sur son ventre où grandissait son héritier, elle le regardait avec la sévérité d'une mère qui grondait son enfant.

Les deux philosophes, le peintre et le sculpteur au buste.

Elle avait prononcé ses mots impérieusement, comme si ce n'était pas lui qui tenait les cordons de la bourse et qu'elle ordonnait à son esclave. Un petit sourire moqueur étirait les lèvres du Procurator qui défia son épouse du regard avec une lueur joueuse qui vacillait au fond de ses prunelles sombres. Il l'avait cherché elle avait paru plus que facile à trouver. Seulement, la taquinerie qu'il avait envie d'user ne s'était pas tari face au courroux rentré de Laelia, bien au contraire. Il surenchérit avec un ton dédaigneux.

Le philosophe qui vient de Ruvia ... Aristo ... Asto ... Son nom m'échappe ... Lui je peux y consentir. En revanche, le casseur de cailloux, je ne vois pas ce qu'il a de spécial. Le peintre non plus.

Il haussa les épaules avant de croquer une dernière fois dans la pomme. Il mastiqua énergiquement le fruit avant de l'avaler et de laisser le trognon rouler sur la table. Toujours taquin, il renchérit avec détachement, tapant là où cela ferait le plus d'étincelles.

Le buste d'Oncmelius n'était pas si bien fait que ça.
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeMer 5 Aoû - 16:11

Et aussi vrai qu’elle était la nièce de l’Empereur, son sang ne fit qu’un tour. Combien de fois les médicii lui avaient répété qu’il n’était pas bon de s’agacer ainsi ? Bien là ! Elle accoucherait céans et ce sera bien fait pour Caïus, qui non content de la faire s’enrager, affichait déjà un petit sourire qu’elle ne connaissait que trop bien. Il s’amusait d’elle comme toujours ; même si elle connaissait ses travers, elle ne parvenait pas encore à les ignorer. Il jouait trop bien l’idiot pour qu’elle le laisse faire. Puis, si elle ne fâchait pas un peu pour lui offrir son spectacle tant attendu, il ne lui accorderait pas plus ce qu’elle désirait. Comme si elle eut besoin de plaider sa cause pour mériter davantage ! N’avait-elle donc pas assez fait pour lui durant ces années ? Le rouge lui montait aux joues aussi sûrement que son cœur battait la mesure dans sa poitrine. Il pouvait bien se vanter d’être le seul à la supporter assez longtemps, mais le même mérite lui revenait aussi. Cette petite peste aux boucles parfaites n’étaient pas simples à vivre non plus. Les esclaves eux-mêmes se réjouissaient de n’avoir à faire qu’à la femme plutôt qu’à l’époux. C’était dire comment le brave Héros de Ruvia était aimable dans ses bons jours.

« Je laisserai plus volontiers à un aveugle le soin de juger de la beauté d’une pièce ». Sa langue avait claqué si vite et avec tant d’ardeur qu’elle ne se souvint même plus avoir prononcé les premiers mots à la fin de sa phrase. « Tu n’as pas plus de goût que de discernement. Si tu ne veux pas accéder à ma requête, soit ! Mais je te préviens, c’est seul que tu iras te coucher ».

Les yeux gris se plissèrent au terme de sa courte diatribe, le menton haut en signe de détermination. Elle le surplombait de toute sa maigre taille, mais son gros ventre et les poings fermement posés sur ses hanches ne laissaient pas de doute quant au sérieux de la menace. Et s’il s’en réjouirait la première nuit – où il pourrait enfin dormir confortablement -, la chaleur de son corps lui manquerait bien assez tôt pour qu’il cède enfin. Laelia n’aimait guère en arriver à de telles extrémités, mais le Procurateur était presque aussi têtu qu’elle-même ; elle ne possédait pas grand-chose dès lors pour le faire changer d’avis. L’on disait même que c’était là le stratagème des femmes. Pour autant ce n’était pas son dernier atout. Celui-ci avait au moins pour mérite de ne pas le courroucer, pour l’heure.

« J’essaye d’user d’un langage dont tu es dépourvu mais si cela te plaît de croire que cela est futile, soit ! Va ! Va donc te pavaner et laisser à nos ennemis d’ici ou de Ruvia le soin de causer notre perte par des sentiers plus insidieux que les tiens ; va donc te perdre en éloquence à la Curie quand la véritable bataille se gagne dans les rues. Je ne fatiguerai plus pour toi Caïus Protero Feles si tu continues à t’obstiner comme la tête de mule que tu es ! ».

La mine boudeuse à présent, elle n’avait su maîtriser le flot de ses pensées. Vexée d’être ainsi remise en doute par son seul allié, elle aurait volontiers laissé aller une larme rouler sur ses joues cramoisies de colère. Mais plutôt, elle inspira longuement, les mires brillantes comme la surface d’un lac au soleil avant de commencer à se détourner de l’amour de sa vie. Ainsi allait les choses avec les grosses femmes : elles étaient bien plus en proie à leurs humeurs qu’elles ne le voudraient.
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeMer 5 Aoû - 19:08

La mine furieuse et déjà rougie par la colère, Laelia se campa sur ses deux petites jambes, les poings serrés sur les hanches et son ventre rebondi tendu aussi fièrement que son menton.

Je laisserai plus volontiers à un aveugle le soin de juger de la beauté d’une pièce. Tu n’as pas plus de goût que de discernement. Si tu ne veux pas accéder à ma requête, soit ! Mais je te préviens, c’est seul que tu iras te coucher.

Déjà, le chantage. Elle était d'ordinaire moins prompte à bondir toutes griffes dehors et à agiter l'étendard de la solitude nocturne d'ordinaire. À croire que l'enfant qui grandissait dans son giron faisait ressortir encore plus le côté capricieux de la jeune femme. Un bref instant, il pensa renchérir en pointant la nouvelle recrue qu'il avait dégotté le matin même et qui saurait réchauffer sa couche le temps que la nièce de Paetius lui rouvrit ses draps, mais cela aurait causé plus de troubles que de raison. Et tandis qu'il riait intérieurement de la pique qu'il avait retenu pour la paix de son ménage, son épouse continuait à vociférer.

J’essaye d’user d’un langage dont tu es dépourvu mais si cela te plaît de croire que cela est futile, soit ! Va ! Va donc te pavaner et laisser à nos ennemis d’ici ou de Ruvia le soin de causer notre perte par des sentiers plus insidieux que les tiens ; va donc te perdre en éloquence à la Curie quand la véritable bataille se gagne dans les rues. Je ne fatiguerai plus pour toi Caïus Protero Feles si tu continues à t’obstiner comme la tête de mule que tu es !

Tête de mule ? Comme on le disait souvent dans la légion, c'était l'Ascanien qui disait au Vossulien, "tu pues". Elle était probablement la personne la plus opiniâtre qu'il connaissait et sa jeunesse privilégiée et son ascendance impériale n'avait pas estompé ce trait de caractère. Il était bien facile d'être têtu lorsque quiconque te croisait devait baisser la tête et répondre par l'affirmative s'il ne voulait pas risquer les galères, ou pire. Les yeux d'acier de la jeune femme luirent sous la naissance de larmes de rage alors qu'elle se renfrognait. Pendant une seconde, il se retrouvait face à Octavia qui ne goûtait guère qu'un poulain ne soit pas venu à sa rencontre au moment où elle l'avait aperçu. Les chiens ne faisaient pas des chats. Sans vraiment s'en rendre compte il fit une petite prière silencieuse à l'attention d'Hedelma pour que leur prochain enfant tienne moins de sa mère sur ce point. Elle avait bien d'autres qualités qu'il serait ravi qu'elle transmette à leur fils à naître. Il serra les mâchoires, peu enclin à accepter le ton qu'elle avait usé, même s'il l'avait provoqué. Légèrement agacé, sa voix monta un peu plus dans les déibels alors qu'il répondait.

Et en quoi ton sculpteur sera utile dans la rue ?

Il se redressa pour capter le regard triste de sa bien-aimée. Il reprenait un ton moins agressif mais pourtant toujours acerbe.

Un orateur trouvera les bons mots, narrer les bonnes anecdotes devant une foule qui ne demande qu'à être acquise. Ton casseur de briques, il lui faudra combien de temps pour façonner son oeuvre ? Et qui le verra ? Des Curiates ayant déjà fait leur avis sur moi depuis le moment où j'ai franchi la porte de la cité. La plèbe n'en a rien à secouer de ces casseurs de marbre, de même que des peintres. Ils s'agglutinent comme un troupeau sur le forum pour entendre le Praecto donner des nouvelles et pour entendre les joutes oratoires, ou bien, vont s'entasser pour regarder des pièces de théâtre. Alors je te repose la question et j'aimerai que tu me donnes un argument autre qu'une bataille de rue dont tu ne connais rien. En quoi, ils seront utiles tes "artistes" ?
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeSam 8 Aoû - 17:22


Agacée, blessée dans sa fierté, Laelia ravala les perles salines qui menaçaient de couler. Là, en pleine possession de sa colère, elle s’imagina volontiers en train de lui tordre le cou. Et quoique cette perspective la soulagea quelques infimes secondes, un sourire narquois ponctua sa frimousse aigre. Il n’en faudrait point d’avantage pour abimer les murs de leur domus d’une nouvelle altercation. Il en était ainsi depuis leurs épousailles, des années plus tôt. A croire que les deux n’avaient d’autre moyen de s’écouter qu’à la force de rancœur et de mépris. Et puisqu’il l’invitait si élégamment à ce jeu surannée, soit. Elle le remettrait à sa place comme elle eut pu le faire avec Octavia ; l’enfant avait de qui tenir. Gentille et intelligence, elle avait la même habitude désagréable que son père à s’obstiner dans de fausses certitudes. Dès lors, il était bien difficile de les en déloger l’un comme l’autre. Même toute la logique du monde n’y changea rien : une décision semblait irrévocable. Peut-être que Caïus aurait préféré une femme plus douce et conciliante ; sûrement même. Mais elle n’était guère encline ni maintenant ni jamais à céder face à un entêtement stupide. Peste soit son oncle de lui avoir collé un garçon si opiniâtre. Et bien qu’elle savait déjà qu’il se ficherait éperdument de ses arguments, ses lèvres se décollèrent une nouvelle fois dans une oscillation irritée.

« Mes artistes assureront à toi et notre lignée la prospérité que ne peuvent assumer seuls les orateurs ». Un rictus suffisant habillait toujours son visage alors que ses prunelles se posèrent dans les siennes sans pudeur aucune. « Ne me sous-estime pas Caïus. J’ai eu à faire avec ces choses-là bien avant toi ».
En d’autres circonstances peut-être se serait-elle tût là-dessus. Le Procurateur n’aimait guère qu’on lui manqua ainsi de respect, mais il avait commencé l’insolence bien avant elle ; et quoiqu’en pensait les gens, elle avait toujours été libre de sa parole dans l’intimité. N’en déplaise à son époux. « Dois-je vraiment t’expliquer comment ? Je ne t’ai jamais trahi, alors pourquoi doutes-tu aujourd’hui de mes choix ? Est-ce si difficile pour toi de m’accorder une seule fois ta confiance sans que je n’ai à me confondre en explications déjà dîtes mille fois ? ».
« Puisque tu ne me crois pas capable de gérer ces choses-là. Puisque tu me vois faible et limitée, alors je n’ai plus rien à te dire. Je me contenterai de tenir la maison, et d’assurer à nos enfants une éducation convenable. Je sourirais face aux invités. Mais ce sera tout. N’attends plus de moi que je t’épaule si tu ne m’en laisse pas la possibilité à moins de te supplier à genoux ». Ses yeux se plissèrent un peu dans une mine déterminée. Le jeu avait assez duré.
« Car entend-le bien Caïus : je ne m’abaisserai jamais à cela ».
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Caïus Protero Feles

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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeMar 11 Aoû - 18:23

Gonflée de furie, les yeux perlant une colère salée qui transpirerait bientôt à travers ses mots, Laelia rugit son désaccord et sa hargne.

Mes artistes assureront à toi et notre lignée la prospérité que ne peuvent assumer seuls les orateurs. Ne me sous-estime pas Caïus. J’ai eu à faire avec ces choses-là bien avant toi. Dois-je vraiment t’expliquer comment ? Je ne t’ai jamais trahi, alors pourquoi doutes-tu aujourd’hui de mes choix ? Est-ce si difficile pour toi de m’accorder une seule fois ta confiance sans que je n’ai à me confondre en explications déjà dîtes mille fois ?

La voilà lancée dans ses grandes envolées rageuses et elle ne faisait que commencer. Le visage rubicond, elle s'emportait comme s'il avait proféré le pire des outrages. Seulement, le Feles n'était pas un bon joueur pour ce genre de jeu, et la taquinerie virerait bientôt à la dispute vociférante et sonore.

Puisque tu ne me crois pas capable de gérer ces choses-là. Puisque tu me vois faible et limitée, alors je n’ai plus rien à te dire. Je me contenterai de tenir la maison, et d’assurer à nos enfants une éducation convenable. Je sourirais face aux invités. Mais ce sera tout. N’attends plus de moi que je t’épaule si tu ne m’en laisse pas la possibilité à moins de te supplier à genoux. Car entend-le bien Caïus : je ne m’abaisserai jamais à cela.

Elle avait prononcé ces derniers mots tel la sentence d'un juge face à l'accusé. Au fil des mots, le visage du Procurator avait pris une teinte équivalente à celui de sa bien-aimée. Leur passion n'avait d'égal que leur mauvais caractère et l'explosion colérique du patricien, tantôt promise, finit par arriver.

Cesse donc de te draper dans une ignominie hors de propos. Il n'a jamais été question de ton incompétence ou de ton incapacité à quoi que ce soit ! Par Kuo, qui de nous deux sous-estime l'autre en ce moment même ? Tu veux que je finance grassement tes artistes ?! Ce n'est pas pas en me hurlant dessus, ni en me faisant passer pour un ingrat envers toi que tu obtiendras gain de cause !

Il se releva de son lit d'un bond, faisant choir la jatte de fruits sur le sol dans un tintement grave. Lui aussi savait se montrer outré et acerbe. Il poursuivit sans adresser un regard au plat qui roulait sur le marbre de la domus.

Je ne doute pas de toi, je ne l'ai jamais fait ! Je te fais confiance sur bien des choses, mais là il ne s'agit plus de TE faire confiance, mais de payer pour qu'un inconnu casse une saloperie de caillou ! Alors soit tu sais me convaincre de son utilité AVANT que nos enfants soient adultes, mariés et parents à leur tour, soit je ne paierai pas pour les entretenir ! C'est aujourd'hui, demain que j'ai besoin d'avoir le soutien des citoyens, pas dans quatre générations ! Et je sais très bien que tu l'as déjà compris ! Donc cesse de faire tes caprices pour avoir une énième statue de toi dans l'atrium et donne-moi une vraie bonne raison de jouer les mécènes. Et avant que tu me resserves tes injonctions, je ne te demande pas de supplier ou de t'effacer. Tu dis être mon alliée ? J'en atteste devant les Dieux, mais je ne suis pas ton larbin qui cédera à tes exigences sans demander de compte. C'est ainsi que fonctionne les alliés !

Les sourcils froncés et les muscles de sa mâchoire tendus comme des arcs, il éprouvait autant de colère que de désir pour cette petite bonne femme qui savait lui tenir tête. Aussi épuisante qu'elle pouvait être lorsqu'elle devenait têtue, il ne pouvait nier qu'il l'aimait un peu plus lorsque leurs voixs montaient en volume pour se confronter, tel deux étoiles qui entraient en collision. Le choc était fantastique, le bruit incroyable et pourtant il n'en voyait, à ce moment-là, que la beauté hypnotique.
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeVen 14 Aoû - 12:46


« Mes caprices ?! ». Et le bol ne reçut pas plus d’attention de la maitresse. Droite comme un i, elle toisait le procurateur du regard bien qu’il la dépassait en taille. La colère se lisait sur le visage du ruvien, et bien qu’elle en partageait pour moitié la responsabilité, elle se sentait d’autant plus offusquée qu’il inversait sciemment les rôles. Voilà qu’après s’être joué d’elle toute l’après-midi, c’était à lui d’être fâché ? Grands Dieux, elle aurait mieux fait de se marier à un âne ! Là au moins, elle aurait été plus assurée de son engagement. Néanmoins – elle ne pouvait le nier -, elle l’aimât profondément quoiqu’elle eut envie de lui faire gober son mauvais caractère. L’irritation agitait leur enfant à naître, qui bercé par les cris des parents, commençait à s’agiter dans ce giron qui devenait de plus en plus exigüe. Aussi, tentant de masquer une grimace de déplaisir à l’annonce d’un coup de pied, elle inspira profondément. Par Ukko, qu’est-ce qu’elle regrettait la capitale.

« Tu veux vraiment savoir l’intérêt de tout ceci ?! Alors soit ! ». Elle vociférait, les dents serrées tant par la douleur que l’infinie humiliation qu’elle éprouvait. Là, contrainte de s’expliquer, Laelia était plus vulnérable qu’un bambin. Caïus ne céderait pas avant d’avoir entendu un argumentaire qui lui plairait assez, et elle-même se retrouverait bien las de devoir lui tenir tête. Ce n’était dans l’intérêt de personne, et plus que sa propre estime, elle préférait assurer aux siens une prompte prospérité. L’intérêt c’est de nous préserver de ton idiotie. Et quoique la pique aurait eu un bel effet, elle s’abstint. Le venin était une chose qu’il valait mieux garder pour d’autres. D’autant que qui connaissait les Proterii aurait su qu’elle n’en pensait pas un traitre mot.

« Puisque tu es incapable de discerner le moindre bien dans mes propositions, peut-être qu’en t’expliquant comme un enfant tu sauras reconnaitre que je ne suis pas la folle que tu penses ». Le ton acerbe tressaillit alors que remontait une nouvelle fois les larmes. Il lui serait bien difficile de les contenir, surtout si leur garçon ne s’arrêtait pas de la tourmenter autant que le père. « Que crois-tu que les gens penseront lorsque tu n’achèteras que d’honorables orateurs, qui se feront plaisir de chanter tes louanges ? Tous se moqueront de toi et de ta vanité ! Ce n’est pas leur sympathie que tu attiseras. Et crois-tu seulement que voyant cela, tes confrères à la Curie n’agiront pas en conséquence ?! ».
Une première goutte salée dévala sur sa pommette. Mais la nièce de l’Empereur resta digne, détachant ses mots comme autant de vérités. « Ne soutiens qu’un corps d’Art et tu seras un parvenu prétentieux. Soutiens-en plusieurs et tu seras un mécène. Là est toute la nuance. Sans compter que c’est tous les artisans que tu flatteras par la même ». Il lui coûtait de lui offrir le beau rôle quand c’était elle qui savait tout cela. Elle détestait l’aimer si fort. « Dans un an, lorsque la rumeur aura couru et que viendra l’heure de trouver de nouveaux artistes, ils feront tout pour t’impressionner ! Ce sont des miséreux à qui l’on donne de l’espoir, un espoir qui pourrait se concrétiser en nous flattant en retour ! ».
« Tu n’avais pas pensé à cela ou es-tu juste trop fier pour admettre que j’ai raison ?! ». Ses mires se vidaient sans qu’elle ne s’en aperçoive tout à fait.  « Le peuple sera heureux que tu t’intéresses à sa culture et son savoir-faire, toi qui viens de Ruvia ! Est-ce trop te demander que de faire cela ? Tout ne se joue pas sur les bancs de la Curie Caïus Protero Feles ! ».
« Et si d’aventure cela n’est toujours pas une raison suffisante, je ne me fatiguerai pas plus à t’expliquer ce que j’avais déjà prévu de faire et qui nous assurait notre place ici. Après tout, rien de ce que je dis ne semble jamais assez bien pour te satisfaire ».
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeSam 15 Aoû - 17:49


Imitant son époux, la jeune femme répondait à la mauvaise humeur du Feles par des vociférations tout aussi sonores. Le propre des relations passionnées, elles faisaient beaucoup de bruit, dans les moments intimes comme dans les confrontations.

Tu veux vraiment savoir l’intérêt de tout ceci ?! Alors soit !

Il connaissait suffisament Laelia pour savoir qu'elle avait retenu une pique acerbe et vénéneuse à son encontre. Si les mots n'avaient pas prononcés l'insulte, ses yeux gris laissaient transparaître tout le dédain et le poison qu'elle s'était empêché de déverser sur son têtu de mari. Elle luttait contre les larmes qui vacillaient sous ses yeux tandis qu'elle donnait son argumentaire avec une morgue saillante.

Puisque tu es incapable de discerner le moindre bien dans mes propositions, peut-être qu’en t’expliquant comme un enfant tu sauras reconnaitre que je ne suis pas la folle que tu penses. Que crois-tu que les gens penseront lorsque tu n’achèteras que d’honorables orateurs, qui se feront plaisir de chanter tes louanges ? Tous se moqueront de toi et de ta vanité ! Ce n’est pas leur sympathie que tu attiseras. Et crois-tu seulement que voyant cela, tes confrères à la Curie n’agiront pas en conséquence ?! Ne soutiens qu’un corps d’Art et tu seras un parvenu prétentieux. Soutiens-en plusieurs et tu seras un mécène. Là est toute la nuance. Sans compter que c’est tous les artisans que tu flatteras par la même. Dans un an, lorsque la rumeur aura couru et que viendra l’heure de trouver de nouveaux artistes, ils feront tout pour t’impressionner ! Ce sont des miséreux à qui l’on donne de l’espoir, un espoir qui pourrait se concrétiser en nous flattant en retour !

Les larmes avaient commencées à couler sur les joues rosies de colère de la nièce de l'Empereur. Aussi sûr qu'il était en colère et ne goûtait guère sa promptitude à lui donner la leçon comme à un mouflet, ce spectacle lui plantait une dague dans le coeur et lui vrillait les entrailles. Etait-ce la grossesse qui lui faisait sortir les larmes plus facilement ou avait-elle acquis des talents d'actrice à force de s'amouracher de ces traîne-savates ? Elle continuait malgré tout.

Tu n’avais pas pensé à cela ou es-tu juste trop fier pour admettre que j’ai raison ?! Le peuple sera heureux que tu t’intéresses à sa culture et son savoir-faire, toi qui viens de Ruvia ! Est-ce trop te demander que de faire cela ? Tout ne se joue pas sur les bancs de la Curie Caïus Protero Feles ! Et si d’aventure cela n’est toujours pas une raison suffisante, je ne me fatiguerai pas plus à t’expliquer ce que j’avais déjà prévu de faire et qui nous assurait notre place ici. Après tout, rien de ce que je dis ne semble jamais assez bien pour te satisfaire.

Et elle bouda. Leur fille avait exactement les mêmes mimiques lorsqu'elle se fâchait et, Ukko en était témoin, cela arrivait fréquemment. Malgré son agressivité et les larmes qui brillaient sur ses joues cramoisies de colère, le Feles devait reconnaître que ses arguments valaient la peine d'être entendus, voir même écoutés. Il croisa les bras sur son torse en émettant un grognement comme unique répartie. Il fronça les sourcils et réfléchit aux paroles de son épouse. Par Valta qu'il détestait quand elle avait raison et pourtant sans elle et ses conseils, il aurait déjà fait cent faux pas. Fier comme un paon, il ne pouvait se résoudre à abdiquer et à jeter les armes sans chercher à avoir le dernier mot. Il souffla entre ses dents.

Soit.

Son visage se radoucit même s'il gardait les mâchoires verrouillées et son regard trahissait encore son agacement. Il fit une dernière remarque, comme un chant du cygne avant de s'avouer vaincu.

Mais que des oeuvres utiles. Le premier qui me pond une statue de Rakka en train de tâter les miches de je ne sais quelle catin mythologique, je le fais crucifier sur le forum.

Il n'ajouta rien de plus. Finalement, c'était lui qui boudait comme un enfant. Ses yeux se posèrent sur le plat et les fruits qui jonchaient le sol. Il fallait un dernier éclat de voix, une dernière esclandre pour en terminer avec cette dispute.

Pourquoi personne ne ramasse cette foutue jatte ? C'est à moi de le faire ?! Il n'y a pas d'esclaves dans cette domus ?!!
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MessageSujet: Re: L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé]   L'Art ou la manière [Caïus Protero Feles][Terminé] I_icon_minitimeJeu 20 Aoû - 17:58

La colère sembla se dissiper au même instant qu’il abdiqua. Alors, comme si elle avait été en apnée pendant de longues minutes, son corps se détendit enfin. Ses épaules s’affaissèrent un peu et ses yeux mouillants cessèrent peu à peu d’être humides. Restaient encore les sillons sur ses joues rosies, et l’étrange sentiment de culpabilité. Car alors elle aurait aimé fanfaronner sa victoire, elle se sentait épuisée, vidée de toute énergie pour ne plus qu’être un amas fourbu. Ses doigts vinrent écraser les larmes qui vacillaient encore sur son visage, douloureusement. Chaque mouvement lui semblait insurmontable. La douleur qu’elle ressentait n’était certes pas physique, mais elle l’obnubilait assez pour se rendre plus concrète que le goût salé sur ses lèvres. Et dans un premier temps, ne sachant que trop bien que le moindre souffle viendrait raviver les braises, elle ne dit rien. Muette comme une tombe. Elle préféra regarder la jatte lancée sur le sol, qui versée sur son côté droit avait fini de bouger depuis longtemps. Il est vrai qu’elle attendait là, statique, depuis assez de temps. Peut-être finalement que les éclats de leurs voix avaient fait fuir tous les esclaves de la domus.

L’espace d’un instant, elle avait oublié. Elle s’était abandonnée comme bien trop de fois, perdant la conscience du monde qui l’entourait. Car alors que les amants s’étripaient en verbe, l’univers ne cessait pas sa course. Le temps filait aussi sûrement que dans les moments tendres, ne laissant derrière lui que l’amertume d’un bref répit. A cela, elle aimât rapprocher leurs querelles éternelles de leurs étreintes ; ces moments uniques où alors il n’y avait que lui, Caïus Protero Feles. Par tous les Dieux des Palais Célestes, elle le maudissait autant qu’elle le chérissait. Malgré tous les travers de ses émois, il lui était à présent indispensable. Aussi vrai que l’on ne pouvait se passer de respirer. Pourtant, ils se gardaient bien de se le dire trop souvent ; comme si cela pouvait apporter le moindre mal. Alors ils restaient là parfois, en silence entendu, à se dire les choses dans un mutisme assourdissant. Et du vide, il remplissait chacune de ses peurs et de ses faiblesses.

Une silhouette menue se précipita vite après l’injonction du Pater Familias. La jeunette fraîchement ramenée du marché, le matin même, se jeta avec hâte sur le bol qu’elle remit en place promptement après avoir ramassé les fruits qui s’étaient échappés de leur contenant. Elle garda les yeux fixement sur le sol. Etait-elle gênée ? Sûrement. Et presque aussi sûrement qu’elle s’exécutait, la Patricienne fronça les sourcils, bien peu encline pour laisser à quiconque la chance d’extraire de ses mains le brave Procurateur. Car après une défaite aussi écrasante, nul doute qu’il chercherait à se défaire d’elle au plus vite ; l’agacement se lisait encore sur ses traits et sûrement qu’il lui en voudrait pour la journée ou pour la décade à venir. Quoiqu’il eut été ironique de lui rappeler que l’escarmouche était de son fait, elle s’abstint une fois encore. En vérité, elle ne savait que dire pour amoindrir son courroux, ou pour ne pas paraitre trop satisfaite : car si fait, il s’empresserait de revenir sur sa décision pour la punir de sa suffisance. Aussi préféra-t-elle simplement s’avancer d’un pas prudent dans sa direction, et de lui saisir la main pour la poser délicatement là où l’enfant à naître jouait des pieds. Soltar lui avait offert la force et la détermination pour sûr. Les yeux gris de la belle se perdirent dans le visage de son époux ; oui, les dieux avaient offert à leur fils la chance d’être comme leur père.
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