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 La belle, la brute et le cochon (pv Honoria)

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Quintilius Lamius

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Quintilius Lamius

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MessageSujet: La belle, la brute et le cochon (pv Honoria)   La belle, la brute et le cochon (pv Honoria) I_icon_minitimeLun 7 Sep - 20:35


15e jour de Secundo Seminare
An 399
Quartier du Bassium

Les rues s'emplissaient d'une émulation joyeuse. Les échos des voix qui s'élevaient depuis le Forum bourdonnaient jusque dans les belles artères pavés qui séparaient les opulentes villas des patriciens de la capitale de la province. Les curiates de toute la cité convergeaient vers le siège du pouvoir pour une session extraordinairement populeuses et on aurait pu croire que les marchands et les musiciens s'étaient donnés le mots pour accompagner cela en s'étant eux aussi rassemblés en masse. Les yeux de toute la cité semblaient convergés vers la Curie et les sombres nouvelles qui étaient parvenues de la capitale de l'Empire avaient encore ajoutés de la curiosité aux citoyens.

Tous les regards louchaient vers le centre d'Edelmia. Tous ? Non. Tapis dans l'ombre, deux pairs d'yeux étaient rivés sur les battants de hautes portes en bois qui perçaient un mur peint en lie de vin. De petites fenêtres carrés perçaient les murs de-ci, de là et quelques branches de lierres s'enroulaient élégamment autour de colonnes polies. La domus Sicinii étaient assurément une des plus élégantes de la rue, rivalisant en faste et en élégance avec celle, ironiquement, du némésis du propriétaire des lieux, et accessoirement grand patron de Quintilius, le censeur Galba. Aux côtés du pénule, imitant son camarade, Calpurnia observait avec attention les allers et venues, se tenant prête à remplir sa mission, même si elle n'en avait pas encore tout à fait conscience. Quelle étrange affaire était-ce que celle-ci ? Deux jours plus tôt, Titus, camarade de beuverie et d'aventure était venu trouver Quintilius dans sa petite cahute pour lui demander de remplir une mission des plus farfelues. Pour une raison qu'il n'avait pas bien saisi sur le moment, ni après d'ailleurs, Merula avait trouvé un accord pour faire croire à un enlèvement de l'aînée des enfants du préteur Scorpa. Lamius et sa truie de compagnie devait donc emmener la jeune femme hors des murs d'Edelmia, déposer le parchemin que lui avait confié Titus, la cacher pendant quelques jours et attendre que que le fils Sevinius ne la récupérât. Le tout dans cet ordre.

Jurant sur le paon d'Hedelma qu'il honorerait sa mission, le pénule avait préparé un plan infaillible et très sophistiqué. Attendre que la donzelle apparaisse, botter le cul du moindre couillon qui se mettrait en travers de sa route, et l'emmener jusqu'à la ferme de son ivrogne de père. Avec un peu de chance, le vieux Quintus serait tellement chargé d'eau-de-vie qu'il ne remarquerait même pas qu'elle serait là. Toujours était-il que Quintilius attendait au coin de la rue, assis sur le plateau d'un chariot à bord haut qu'il avait recouvert d'une toile de jute. Au milieu des cagettes de choux et du duvet de paille de Pupu, il ne doutait pas que la jeune patricienne serait à son aise pendant le voyage. Une seule chose lui trottait dans la tête. Titus avait dit une phrase avec des mots plutôt compliqués qu'il n'avait pas bien saisi. "J'ai fait appel à quelques forbans pour mener à bien cette forfanterie, la belle est au courant, tu n'auras qu'à amener la charrette". Ne voulant pas paraître plus idiot qu'il ne l'était, il avait acquiescé avec un sourire un peu niais, mais des forfans et de la forbanterie ... Voilà bien des mots sortis tout droit du cul de Tuodé et peste soit de c't'y qui savait bien c'que ça voulait dire.

Ainsi donc, ils scrutaient, Pupu et lui, dissimulés dans leur carriole. Un groupe de silhouettes encapuchonnées s'approcha de la porte et vint frapper trois fois contre le butoir, fit une pause, puis trois fois de nouveau. La porte s'ouvrit quelques secondes plus tard, laissant apparaître une jeune femme qui tentait de cacher sa chevelure blonde sous un voile un peu trop bien brodée pour passer totalement inaperçu. La jeune femme regarda aux alentours, comme les autres silhouettes qui dissimulaient leur visage sous leur capuche. "Grouik" s'exclama Calpurnia en comprenant que quelque chose n'allait pas.

Mais c'est qu't'as raison ! Y veulent enlever celle qu'j'dois enlever les fumiers !

La moutarde monta au nez du duo et Calpurnia sauta de la charrette pour trottiner en direction du groupe, suivi par un Quintilius qui avait le visage empourpré de fureur. La truie se planta devant le groupe, sa queue dressée au-dessus de ses jambons grassouillets et les oreilles bien tendues au sommet de son crâne. Elle émit un grognement menaçant, comme avertissant les ravisseurs de se rendre sur-le-champ.

Eh ! Mais c'est le cochon de Quintil ...
BANDE DE SALOPERIE DE RACLUUURE !!

Le gourdin a la main, Quintilius surgit et fit virevolter son arme au-dessus de sa tête avant de l'abattre sur la face de ces enleveurs de cible à enlever. Les jurons plurent au même titre que les coups et dans une débauche de violence totalement hors de propos que la décence m'oblige à taire, le pénule étala les silhouettes encapuchonnées en quelques instants. Quelques dents jonchaient le sol autour de la jeune femme qui fut épargnée par la danse de celui qu'on surnommait Clava. Les cris de Pupu avaient étouffés ceux des hommes qui gisaient à demi-inconscient sur le pavé et Quintilius saisit la jeune femme par la taille pour la poser sur son épaule comme un vulgaire sac de panais. Pris d'une lueur de lucidité, il essaya de la rassurer en quelques mots.

Ave. Moi c'est Quintilius et elle c'est Pupu !
Grouik !
On vient de la part de Titus pour faire ton vrai faux enlèvement qui doit paraître vrai.

Et il s'élança vers la charrette, suivi par Pupu qui fit cliqueter ses petits sabots sur les pavés.
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MessageSujet: Re: La belle, la brute et le cochon (pv Honoria)   La belle, la brute et le cochon (pv Honoria) I_icon_minitimeSam 12 Sep - 20:24


Elle attendait derrière une colonne, sagement assise sur un banc de pierre. Son père venait de quitter la villa, tout préoccupé par ce qui l’attendait là-bas, à la Curie. Sa mère devait certainement pleurnicher sur une méridienne en songeant aux mots durs que venait une fois de plus lancer son époux à son encontre. Ses frères et sœurs recevaient en ce moment même leurs leçons. Honoria était donc parfaitement seule, le visage pâle et les traits tirés. Scorpa n’a pas eu un mot pour elle, rien du tout. Il est passé devant sa fille, pressé par la peur d’arriver en retard. Qu’aurait-elle du lui dire ? Il n’y avait hélas plus rien à faire, elle a tout essayé pour avoir son affection ou, à défaut, un tout petit peu d’attention. Mais non. Rien. Alors elle n’a rien dit, elle est restée assise, à regarder ses mains jointes sur ses genoux, le visage hermétique à toute expression, positive ou négative. Seul Hémigomphe a jeté sur elle un regard froid et pourtant lourd de sens, comme si elle n’avait pas à se trouver là, à contempler ses mains, au lieu sans doute de faire des choses plus constructives comme tisser ou filer la laine. L’esclave avait secoué la tête, d’un air désapprobateur. Honoria ne lui adressa pas un regard.

Lorsque les trois coups se firent entendre, elle se leva sans attendre, sur le qui-vive. Les trois autres coups confirmèrent ce qui avait été convenu. Couvrant ses cheveux d’un voile afin de se dissimuler, elle s’en fut ouvrir la porte, de manière discrète, observant les alentours avant de jeter un regard sur les personnes présentes. Des hommes. Titus n’avait donc pas menti. La patricienne a un sourire en y songeant et fait un pas vers l’extérieur, s’apprêtant à dire un mot à voix basse quand son attention est attirée par la présence d’un étrange duo. Un cochon et une énorme brute. La jolie blonde hausse un sourcil, tout autant qu’un des membres des faux ravisseurs, qui semble les reconnaître.

La suite est tellement extravagante qu’elle ne sait comment réagir. La brute épaisse abat son gourdin dans une telle débauche de violence sur les hommes venus la chercher qu’elle en est complètement choquée. Il y a du sang partout, des dents au sol et sur sa tunique…une giclée d’hémoglobine qui ruine le tissu. Honoria pose sa main devant sa bouche avant de regarder, ébahie, l’homme au gourdin qui s’approche et se saisit d’elle pour la poser sur son épaule, comme si elle n’était un paquet de linge sale. Au-delà du fait que jamais personne ne s’est permis une telle familiarité avec elle, elle ressent une peur bleue désormais, et se débat comme elle peut, du moins jusqu’à ce qu’elle comprenne qu’il est envoyé – lui aussi – par Titus.

- Mais enfin, qu’est-ce que cela signifie ?

Il avait précisé qu’il s’agirait de comédiens. Pas d’un énorme bœuf accompagné d’un porc.

- Tu fais partie de la troupe, toi aussi ? Pourquoi as-tu massacré ces hommes, ils étaient envoyés par Titus eux aussi !

Elle parle comme elle peut, évidemment, se dépêchant de gagner l’abri que représente la charrette, les joues rouges, les yeux brillant d’une légitime inquiétude. Rien ne se passe comme prévu. Et ces hommes laissés là devant la porte…Honoria ferme les yeux. En ce qui concerne la discrétion, on peut dire que c’est un échec total sur toute la ligne.

- Que t’a dit Titus ? Où m’emmènes-tu ?
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MessageSujet: Re: La belle, la brute et le cochon (pv Honoria)   La belle, la brute et le cochon (pv Honoria) I_icon_minitimeDim 13 Sep - 14:42


La jeune femme sur l'épaule et pupu à ses trousses, le pénule courait vers la charrette à perdre haleine. La patricienne tenta de signifier sa désapprobation en gigotant et en l'invectivant.

Mais enfin, qu’est-ce que cela signifie ? Tu fais partie de la troupe, toi aussi ? Pourquoi as-tu massacré ces hommes, ils étaient envoyés par Titus eux aussi !
De la troupe ? Héhohé, reste polie ! J'suis un citoyen moi !

Non mais pour qui se prenait cette rombière ? Lui, un brave citoyen, né en Oncmélie, qu'on accuse d'être un de ses amuseurs plubliques sodomites et efféminés, qui se poudraient le mufle bien plus que la pire des fellatrix de Telioprate, un bouffon, un cancrelat, parasite de la société et ... Il ne se souvenait plus de ce qu'avait dit le philosophe qu'il avait écouté d'un oreille distraite quelques jours plus tôt et qui semblait intarissable sur le fait que les comédiens étaient la lie d'Edelmia. Même s'il n'avait pas compris tous les mots, il était d'accord avec le vieux barbu sur son pied d'estale. S'ils étaient frappés d'Infamia ce devait être pour une bonne raison de toutes façons. Poursuivant sa course, la fille du Préteur continuait de l'interroger, ballotée sur l'épaule massive de Lamius.

Que t’a dit Titus ? Où m’emmènes-tu ?

Un court silence se fit tandis que Quintilius tentait de retrouver les mots précis que lui avait dit le fils Sevinius. Son pas lourd et le cliquetis plus léger des sabots de la truie sur les pavés furent le seul son qui répondit à Honoria. Puis il s'arrêta, la jeune femme toujours perché en travers de son buste et il échangea un regard avec Calpurnia qui le dévisagea en remuant le groin. Les yeux du pénule roulèrent dans leurs orbites pour se lever vers les nuages bas qui dévilaient au-dessus de la capitale oncmélienne.

Oh par le con d'Aïka !

Il fit un demi-tour complet et rerit sa course en direction de son point de départ. On aurait pu croire qu'il aurait lâcher sa proie et assise dans la carriole avant de repartir en sens inverse ... Ce serait mal connaître Quintilius qui garda la jeune femme pliée sur son épaule. Pupu observait le spectacle sans comprendre et cette course effrenée en tout sens commençait à épuiser l'animal qui trouvait ses jambons déjà assez dodus. Il s'exclama alors sans se retourner.

J'ai oublié de laisser le papelard là ... Avec l'argent ... Raah ... La rançon ! ... Surveille la charrette !

En quelques enjambées, il retrouva la devanture de la domus Sicinii et il tira de sa ceinture un parchemin qu'il glissa entre les deux battants. Il s'adressa à son sac de carottes à la chevelure blonde qu'il trimballait sans ménagement.

C'est pour faire encore plus croire à l'enlèvement.

Une nouvelle fois, il fit une volte et repartit dans l'autre sens en ahanant de plus en plus. La jeune patricienne ne pesait pas bien lourd, mais la course commençait à l'éprouver ostensiblement. La truie patientait devant une des roues de la charrette qu'ils avaient amenés au coin de la rue. Un des hommes qui avaient tentés d'enlever sa cible remua et tendit un main vers lui alors qu'il passait tout près.

Quin ...

Le pied du pénule vint heurter la mâchoire du malheureux qui avala une ou deux dents de plus avant de poursuivre la sieste commune avec ses enfoirés de copains. Il se décida enfin à répondre aux questions de la jeune femme.

Titus y m'a dit de t'enlever pour de faux et de t'emmener hors de la cité dans un endroit sûr où que personne y va chercher. Donc j't'emmène là-bas.

Enfin ils arrivèrent devant la carriole et il posa Honoria avec une délicatesse des plus étonnantes après avoir fait preuve de tant de brutalité. Il se saisit de Pupu et la fit grimper dans le plateau en grognant sous l'effort. Autant la patricienne était légère autant la cochonne pesait son poids. Il fit le tour pour rejoindre le banc de conduite et posa ses mains sur le bord en bois pour s'aider à grimper. Du coin de l'oeil, il aperçut une petite silhouette qui l'observait devant la porte d'entrée. Quintilius arqua un sourcil et s'écria.

Qui qu'c'est ? Et pourquoi qui mange une fleur c't'oiseau là ?

Un jeune garçon regardait la scène tristement en mâchonnant des pétales rouge vif et levait une main molle qui faisait "coucou". Quintilius secoua la tête avant de souffler.

Raah j'aime pas faire du mal aux mômes, mais Titus il a dit pas d'étemoins !


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MessageSujet: Re: La belle, la brute et le cochon (pv Honoria)   La belle, la brute et le cochon (pv Honoria) I_icon_minitimeLun 14 Sep - 9:21


Le temps est compté. Un raffut pareil finira immanquablement par attirer les foules. La jolie patricienne ferme les yeux de dépit en s’apercevant qu’elle est trimballée d’un côté à l’autre de la rue sur l’épaule d’un homme épais. Epais dans tous les sens du terme. Quoiqu’il en soit, elle ne dit pas un mot, se contentant de subir avec dignité une situation sur laquelle elle n’a absolument aucun contrôle. Elle a une pensée douloureuse pour ces hommes au sol, des hommes inconscients. Celui qui la porte comme un paquet de chiffon est fort. Très fort. Nul doute que s’il lui en prenait l’envie, il pourrait lui tordre le cou comme on casse une brindille. Elle ne dit donc rien, prend place sur la banquette à l’avant, se drapant de manière à ne pas être reconnue.

Lorsque la brute vient s’asseoir à ses côtés, Honoria a un bref mouvement de recul qu’elle ne peut pas contrôler. Du moins jusqu’à ce qu’il évoque la présence d’un témoin et pas n’importe lequel. Il n’y a que Manius qui correspond à ce qu’il décrit et Honoria se tourne vivement vers la porte, jetant un regard désespéré à son frère. La vision de ce garçon dans la porte en train de lui dire au revoir lui fait monter les larmes aux yeux. Toute sa résolution est sur le point de flancher. Elle se mord la lèvre, avant de faire un geste de la main dans sa direction, paniquée, afin qu’il s’en aille.

La patricienne pâlit quand Quintilius menace ouvertement son petit frère. Elle a un geste totalement irréfléchi, elle saisit le col de son ravisseur et l’oblige à la regarder, presque brutale, même si elle sait qu’elle ne fait pas le poids une seule seconde face à lui. Manius est ce qu’elle a de plus cher au monde, le seul dans cette fratrie qui lui rend un peu d’affection désintéressée.

- Tu ne le touches pas, c’est compris ? C’est mon frère.

Prenant conscience de son geste, elle le lâche et pose sa main sur son front, les tempes en feu, le cœur battant à toute allure.

- Tu as achevé tous les témoins. Quant à mon frère, il croira que je suis partie faire une course et que je reviendrai plus tard. Si tu descends de cette charrette pour lui faire du mal, je descends aussi et tu t’expliqueras avec Titus. Je t’en supplie, Quintilius, mets-toi en route, maintenant.

Elle se retourne à nouveau et plonge son regard vairon dans celui de son frère. Manius n’est pas la flèche la mieux taillée du carquois mais il pourra voir tout le désespoir et la panique dans les yeux de sa sœur alors qu’elle lui demande de rentrer. Avec un peu de chance, il comprendra qu’il est en danger. Qu’elle l’est aussi. Ce qui peut apporter un peu d’eau à son moulin, in fine.

- En route, bon sang…
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MessageSujet: Re: La belle, la brute et le cochon (pv Honoria)   La belle, la brute et le cochon (pv Honoria) I_icon_minitimeLun 14 Sep - 19:09


S'apprêtant à aller botter les fesses du marmot à l'air simplet, Quintilius se fit empoigner le col de sa stola fermement par la jolie blonde qui lui servait de vraie fausse otage.

Tu ne le touches pas, c’est compris ? C’est mon frère.

Elle sentait bon. À chacun de ses mouvements, elle libérait des effluves de jasmin et rose et alors que leurs visages se rapprochaient, le pénule en prit une pleine bouffée délicate. C'était bien rare les femmes qui s'étaient si proches de lui et qui ne sentait ni la luserne, ni la bouse fraîche, ni les baumes à la lavande très forts que les pensionnaires des lupanars se tartinaient sur le corps pour enlever l'odeur du sutupre et de la gelée d'amour qui collait à leur peau. Elle lâcha prise, abandonnant le masque contrarié qui avait tendus ses traits fins de fille de bonne famille.

Tu as achevé tous les témoins. Quant à mon frère, il croira que je suis partie faire une course et que je reviendrai plus tard. Si tu descends de cette charrette pour lui faire du mal, je descends aussi et tu t’expliqueras avec Titus. Je t’en supplie, Quintilius, mets-toi en route, maintenant.

Le plébéien tourna un regard incrédule vers le mouflet qui agitait la main d'un air penaud.Il posa de nouveau son regard vers Honoria, puis fit un nouvel aller-retour ... Puis un autre ... Et un dernier. Sous la caboche patibulaire de Quintilius se jouait une bataille épique entre sa conscience professionnelle qui voulait qu'il défonce le crâne du gamin et les arguments de la jeune femme, soutenus par son coeur qui criait de partir sans faire plus de raffut. Il remarqua avec quelle détresse elle observait l'enfant et le pressait en silence de s'éloigner. Il finit par trancher la question en se remémorrant son père qui avait été bien trop prompt à le savater pour un oui ou non alors qu'il était à peine plus vieux que ce petit bonhomme.

Par Sanaan, ch'uis trop gentil.

Il se saisit des rênes et les claqua sur le cul du ronçin qui se mit à avancer au pas. Les sabots raclèrent les pavés avant que les roues ne se mirent à cliqueter. À l'arrière, Calpurnia avait posé sa tête sur la rambarde de bois et regardait la domus qui s'éloignait lentement derrière eux. Elle observa paisiblement ce qui se passer sur les arrières du chariot qui faisait un virage puis prévint Quintilius d'un imprévu.

Grouiiiik !

Reconnaissant le cri d'alarme, Lamius se pencha sur le côté du chariot pour voir ce qui se tramait dans cette direction. Le petit gars s'était mis à courir vers eux, les joues rosies de chagrin et il se mit à crier alors qu'il réalisait que ses petites jambes dodues ne le porterait pas à hauteur de son aînée.

Honoria ! Honoriaaaaaaaa !

Les trémolos dans la petite voix du mioche auraient pu déchirer le coeur de la plus froide des mères.

Pourquoi tu t'en vas sans mooooiii ???!!!

Quintilius tourna alors son regard vers sa passagère en relevant un sourcil, légèrement agacé.

Bon ... J'veux bien le laisser tranquille ... Mais si y commence à beugler comme ça jusqu'à Valtaia, y risque de nous faire repérer ton frangin ...

Il pinça les lèvres, creusant la commissures de ses lèvres de manière agacée et tandis que le gamin reprenait sa litanie pleine de sanglots, Quintilius proposa une nouvelle fois une solution au problème.

J'fais quoi moi ? T'es sûre que je peux pas l'assommer ? Genre un p'tit coup de gourdin ... Léger tu vois. Et hop, y gueule p'us.

Il était encore temps de faire quelque chose. La carriole allait atteindre un carrefour pour récupérer le chemin de la porte Nord de la cité, puis ce serait le voyage jusqu'à la ferme qui leur servirait de cachette.


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MessageSujet: Re: La belle, la brute et le cochon (pv Honoria)   La belle, la brute et le cochon (pv Honoria) I_icon_minitimeMar 15 Sep - 20:25


Les cris de Manius…Honoria en a le cœur déchiré en deux. Elle sait qu’elle est la seule personne à lui apporter de l’attention et de l’affection dans la villa de son père. L’inverse est tout aussi vrai. La patricienne se mord la lèvre. Rien ne se passe comme prévu et tout risque de partir en vrille. Pourtant, elle ne veut pas renoncer. Alors…D’un geste elle pose une main douce, toute délicate, sur celle de Quintilius.

- Non, tu ne feras pas de mal à Manius, c’est un enfant et il restera toujours un enfant. Il est fragile, je ne veux pas qu’il lui arrive du mal.

Elle inspire profondément et dit, dans un murmure :

- Arrête la charrette, s’il te plaît.

Les doigts tous fins et diaphanes de la jolie patricienne serrent avec douceur l’énorme paluche du pénule, dans une seconde demande silencieuse, avant qu’elle ne reprenne, en ouvrant de grands yeux larmoyants.

- Je ne veux pas faire demi-tour, je ne peux le laisser crier de la sorte sans qu’il lui arrive malheur, sans que cela ne risque de faire échouer nos projets, à Titus et à moi. Alors…

Elle lui sourit.

- Il vient avec moi. A lui aussi, cela sera sans doute profitable de s’éloigner de cette maudite maison où il n’a absolument aucun intérêt aux yeux de personne. Sauf moi.

Bon, cela impliquera sans doute qu’elle devra jouer une comédie longue de plusieurs jours au lieu de rester en paix, cela implique aussi que Titus ne sera sans doute pas très content, mais…après tout…elle n’y est pour rien si cette énorme brute de Quintilius a été aussi violent, d’autant qu’il n’était pas prévu au programme. Donc elle improvise. Laisser Manius derrière elle, c’est prendre un risque, celui qu’il disparaisse. Et cela elle ne peut le tolérer. Au moins, Manius sera en sécurité avec elle, dorloté et choyé comme jamais encore il ne l’a été.

-   Laisse le m'accompagner. Laisse moi l'emmener.
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Quintilius Lamius

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MessageSujet: Re: La belle, la brute et le cochon (pv Honoria)   La belle, la brute et le cochon (pv Honoria) I_icon_minitimeMer 16 Sep - 16:16


La jeune femme posa délicatement sa main sur la grosse paluche du pénule qui observa les doigts fins et soignés enserrer les siens. Il releva les yeux vers le visage de la patricienne qui paraissait au bord des larmes. Que ces bonnes femmes pouvaient être étranges.

Non, tu ne feras pas de mal à Manius, c’est un enfant et il restera toujours un enfant. Il est fragile, je ne veux pas qu’il lui arrive du mal. Arrête la charrette, s’il te plaît.

Les sourcils de Quintilius se fronçèrent. Ah non ! Elle allait pas faire le coup du remord et abandonner le plan. C'est que cette foutue carriole était pas donnée et même si Titus avait garanti de rembourser la location, c'était pour le moment de sa poche qu'il avait fourni les sesterces. Elle avait beau serré ses petites mains autour de la patte d'ours de Lamius, il ne se laisserait pas avoir par cette tentative péremptoire de séduction. Perpendiculaire ? Impossible de ne pas confondre ces deux foutus mots trop compliqués qu'il avait entendu prononcé par son patron lors d'échanges vigoureux avec quelques propriétaires peu accomodant et qui avait fini leur carrière en se faisant molester par Quintilius et ses collègues. C'était bien la peine d'utiliser des mots trop long en fin de matinée lorsqu'on finissait amputer de quelques dents par les gourdins des pénules au crépuscule. Il allait protester, râler, grogner, mais Honoria surenchérit, les yeux brillants de larmes qu'elle ne parvenait plus à contenir.

Je ne veux pas faire demi-tour, je ne peux le laisser crier de la sorte sans qu’il lui arrive malheur, sans que cela ne risque de faire échouer nos projets, à Titus et à moi. Alors… Il vient avec moi. A lui aussi, cela sera sans doute profitable de s’éloigner de cette maudite maison où il n’a absolument aucun intérêt aux yeux de personne. Sauf moi.  Laisse le m'accompagner. Laisse moi l'emmener.

Le silence se fit sur le banc de conduite. Quintilius observa son otage avec un air sceptique puis tourna ses yeux vers Calpurnia qui s'était approché en remuant le groin. Dans les grands yeux noirs de la porcinne, il y avait un éclat de compassion et sa queue remuait comme celle d'un chien heureux.

Mouarfhhm !

Honoria ne pourrait pas décrypter ce borgborygme mais Pupu connaissait suffisament son compagnon pour savoir qu'il venait d'accepter de mauvais gré. Il tira sur les rênes et le cheval s'immobilisa. Poussant une série de grognements satisfaits, Calpurnia donna un petit coup de groin sur le bras de la jeune femme, lui donnant le feu vert pour qu'elle fasse monter son petit frère un peu trop bruyant. Le pénule posa le menton dans sa main et le coude sur le genou en attendant que le nouveau membre de cet équipage hétéroclite fusse hissé à bord. Et gnagnagna, il est malheureux aussi, et gnugnugnu, c'est un mioche, et gnégnégné, faut pas lui faire de mal Quintilius ... Cette affaire puait les emmerdes de premier choix alors qu'un petit coup de gourdin aurait pu régler l'affaire rapidement et efficacement. En plus, il avait dit un "léger coup" ! Le môme avait l'air débile, le coup aurait pu lui remettre le cerveau dans le bon sens et il aurait fait de lui un génie ! C'était toujours comme ça avec les patriciens, à chaque fois on rembarrait ses idées sans prendre la peine de les considérer plus d'une seconde. Il tourna un oeil torve vers la jeune femme et le mouflet qui grimpait à ses côtés, accueillis par un "Grouik" de bienvenue dont seule Pupu avait le secret.

Si qui gueule, si que l'guet nous arrête à cause d'lui ... C'est double ration de gourdin ! C'est clair ?

Puis il claqua les rênes mollement sur le dos du cheval qui reprit son pas paisible. Il prit une grande inspiration avant de souffler, légèrement blasé par la tournure des évènements et la charrette pénétra dans l'artère qui les mènerait en dehors de la ville.
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MessageSujet: Re: La belle, la brute et le cochon (pv Honoria)   La belle, la brute et le cochon (pv Honoria) I_icon_minitimeMer 16 Sep - 21:07


Honoria prend le borborygme pour ce qu’il est, un accord grogné et validé par le groin curieux d’une truie qui semble amicale. La patricienne a un sourire quelque peu crispé mais Quintilius finit par arrêter la charrette, ce qui lui permet de descendre, petite ombre blonde, afin de récupérer Manius qui se jette dans ses bras.

- Tu viens avec moi. Je n’ai pas le choix. Manius, mon chéri, s’il te plaît, fais ce que je te dis et ne dis pas un mot tant que nous ne serons pas seuls. Je t’en supplie.

Elle prend le visage de son frère entre ses mains, dépose un baiser rapide sur son front et l’aide à grimper sur la banquette située à l’avant. Honoria fera un barrage de son corps entre Quintilius et son frère, passant un bras autour de ses épaules frêles, pour qu’il demeure contre elle, tout le temps du trajet qui doit les mener dans un endroit dont elle ignore encore tout.

- Je te remercie, Quintilius, d’avoir bien voulu l’épargner.
- Si qui gueule, si que l'guet nous arrête à cause d'lui ... C'est double ration de gourdin ! C'est clair ?

Honoria serre son frère un peu plus fort et murmure un tout petit :

- Oui, c’est très clair.

La menace est limpide et elle sait qu’elle aura fort à faire pour que Manius reste tranquille. Cela étant, la perspective de recevoir un coup de gourdin semble calmer le garçon qui se couche sur les genoux de sa sœur en murmurant :

- C’est toi qui as cassé tous ces hommes devant la maison ?
- Non, ce n’est pas moi, c’est lui…
- Ha. Père ne va pas aimer. Il y a des morceaux de dents sur le sol et plein de sang partout. Ça fait des tâches.
- Nous ne serons pas là pour voir cela.
- C’est vrai ça, pour une fois, ce sera pas ma faute. Ni la tienne.


Honoria passe une main douce dans les cheveux de Manius, tout en lui demandant :

- Veux-tu dormir un peu pendant le trajet ?
- On va où ?
- Je l’ignore. Mais on s’en va loin. Tous les deux.


Manius regarde Quintilius puis se redresse, à un bruit que fait la truie sur le plateau arrière.

- Honoria, t’as vu ? Un cochon ! Hé ! Je peux aller jouer avec lui, je peux ? Je peux ? Je peux ? Je peux ?
- Ce n’est pas à moi qu’il faut demander et attends que nous soyons sortis de la ville…S’il te plaît Manius, sois sage. Que t’ai-je dit avant de partir ?
- Oui. Pardon.


Deux secondes et des poussières plus tard, tout en regardant Quintilius, plein d’espoirs :

- Je peux jouer avec le cochon ?

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Quintilius Lamius

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MessageSujet: Re: La belle, la brute et le cochon (pv Honoria)   La belle, la brute et le cochon (pv Honoria) I_icon_minitimeJeu 17 Sep - 20:31

C’est toi qui as cassé tous ces hommes devant la maison ?
Non, ce n’est pas moi, c’est lui…

Quintilius tourna légèrement le regard vers le garçon au visage encore rouge de sa course effrénée et lui fit un petit clin d'oeil entendu. Il n'était pas peu fier d'avoir étalé ces tocards les uns après les autres sans qu'ils eussent le temps de réaliser totalement qu'on ne volait pas l'otage de Calva.

Ha. Père ne va pas aimer. Il y a des morceaux de dents sur le sol et plein de sang partout. Ça fait des tâches.
Nous ne serons pas là pour voir cela.

La discussion entre le môme et son aînée se poursuivait tandis que l'équipage avançait paisiblement vers les portes de la cité.

Veux-tu dormir un peu pendant le trajet ?

On va où ?
Je l’ignore. Mais on s’en va loin. Tous les deux.
À Valtaia.

Quintilius n'ajouta rien de plus tandis que la circulation ralentissait devant la carriole. Il se pencha légèrement sur le côté pour tenter de voir ce qui bouchonner mais il ne distingua qu'une file de charrette qui était à l'arrêt. À ses côtés, les Sicinii poursuivaient leur bavardage sous l'oeil placide de Calpurnia qui émit un petit grognement curieuse de connaître le nouveau passager.

Honoria, t’as vu ? Un cochon ! Hé ! Je peux aller jouer avec lui, je peux ? Je peux ? Je peux ? Je peux ?
Ce n’est pas à moi qu’il faut demander et attends que nous soyons sortis de la ville…S’il te plaît Manius, sois sage. Que t’ai-je dit avant de partir ?
Oui. Pardon.

Le petit bonhomme se tourna vers le conducteur qui venait de faire claquer sa langue pour avancer de quelques pas avant de stopper une nouvelle fois le cheval.

Je peux jouer avec le cochon ?

Les oreilles de Pupu se redressèrent sur son crâne. Le pénule baissa le regard vers le garçonnet en tournant sa tête lentement, déjà las. Il prit une longue inspiration en relevant les yeux vers Honoria et expira en revenant affronter le regard plein d'impatience du petit. Sans un mot, il tourna la tête vers la truie qui fit une série de petits grognements mignons en remuant le groin de haut en bas. Une fois de plus, il plongea son regard dans les petits yeux plein d'espoir du mioche.

Ouais.
MERCIIII !

Le petit gars sauta au cou de Quintilius qui se fit enlasser avant qu'il est le temps de contester. Aussi promptement, le petit abandonna son étreinte et se faufila sur le plateau arrière pour rejoindre Pupu qui voulait le renifler avec curiosité. Les sourcils arqués sur son front, Lamius échangea un regard incrédule avec sa vraie fausse prisonnière avant d'ouvrir la bouche même si aucun son ne franchit la barrière de son étonnement. Il fit encore avancer la charrette de quelques pas avant de s'arrêter de nouveau.

Grouikgrouik

Au bon mot de Calpurnia, le môme répliqua par un rire cristallin, plein d'innocence et un peu agaçant. Ces mioches joyeux avaient quelque chose de dérangeant. Posant une nouvelle fois son regard vers sa passagère, il se pencha lentement vers elle pour lui souffler à demi-mot.

Dis-moi ... Ton frère ... Y s'rait pas un peu ?... Comment qu'on dit ? ... Il a pas tous les codex dans la bibliothèque quoi ...

La charrette devant eux avança une nouvelle fois et le visage de Quintilius se crispa légèrement. Gardant sa position penchée vers honoria, il ajouta alors.

J'crois que l'guet arrête les charriots qui sortent. Va vraiment falloir qu'on s'fasse pas trop r'marquer. On peux passer facile, si qui fait pas tout foirer. Fais gaffe à c'qui tire pas les oreilles de Pupu ou y risque de pas aimer la suite.

Il fit claquer sa langue une fois de plus en remuant les rênes, avant de se redresser sur son céans et avança de nouveau pour coller à l'arrière de leur prédécesseur. Les statues qui coiffaient la haute porte -qui les séparait de la campagne et mettrait un terme au premier chapitre de leur fuite- étaient visibles. Encore fallait-il les dépasser.
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MessageSujet: Re: La belle, la brute et le cochon (pv Honoria)   La belle, la brute et le cochon (pv Honoria) I_icon_minitimeMar 22 Sep - 20:02


- Valtaia ? Manius tu entends ça…Valtaia…!

Elle esquisse un sourire. Un vrai sourire de ravissement. La mer ! Honoria n’a jamais vu la mer et c’était un de ses regrets les plus profonds. La jeune patricienne a toujours voulu passer du temps, ne serait-ce qu’un peu, dans une cité côtière, afin de pouvoir profiter des bienfaits offerts par les immenses étendues d’eau : la paix, le silence, la profondeur de savantes réflexions qui ne seront troublées en rien, l’air, vif et pur, qui apaise les sens et l’esprit. Le voyage sera long mais il en vaut la chandelle. Avec un peu de chance, elle pourra peut-être s’asseoir et regarder les grandes étendues d’eau miroiter sous le soleil, comme elle a pu le lire sur certains rouleaux. Peut-être. Si Manius la laisse en paix.

Manius, lui, semble au-delà de toutes ces considérations poétiques. Il a serré le pénule dans ses bras sans que sa sœur n’ait eu le temp de l’en empêcher. La réaction un peu ahurie de Quintilius la fait sourire, discrètement, tout autant que la réaction du cochon qui semble aussi curieux que Manius. Elle entend son petit frère rire et il n’en faut pas plus pour qu’Honoria s’apaise. Il n’a pas souvent l’occasion de rire, cet enfant, à la villa Sicinii…

- Honoria, j’veux un cochon quand on rentrera ! Regarde comme il est gentil et tout doux !
- Mhhh…Je ne pense que pas père l’autorisera…
- Mééééheu…


Imaginer un cochon circulant librement à l’intérieur de la villa la fait rire sous cape, cette fois. Bien sûr que leur père ne voudra jamais. C’est bien trop extravagant. Et salissant. La jolie patricienne a un regard plutôt doux pour Quintilius alors qu’il s’approche d’elle pour demander ce qui est l’évidence même. Cela étant, elle reste parfaitement courtoise et polie, aimable, expliquant avec des mots simples afin d’éviter de froisser l’homme.

- Mon autre frère, parfois mon père, se plaît souvent à répéter qu’il n’y a pas la lumière à tous les étages, chez Manius. Moi je préfère penser qu’il est resté pur et innocent comme un petit enfant qui ne sera jamais souillé par les réalités de ce monde. Il y a parfois une forme de sagesse, chez lui, qui est assez déconcertante. Regarde…

Elle se retourne pour qu’il en fasse de même et observe l’enfant en compagnie du cochon, avant de regarder Quintilius et de dire, d’une voix tranquille :

- Il ne sait pas ce que c’est, le mal, et il voit le bien chez tout le monde, avant de voir le mauvais. S’il t’a pris dans ses bras, c’est parce qu’il a senti que tu es quelqu’un de bien, toi aussi.

Honoria se retourne pour regarder la route. C’est peut-être aller un peu vite en besogne. Il a tout de même proprement massacré trois hommes devant sa maison, des gens qui devaient l’aider. La patricienne baisse la tête un instant, regardant ses mains jointes sur ses genoux. Les hommes forts comme le pénule sont souvent assorti d’un intellect inversement proportionnel à la circonférence de leurs biceps. Elle a bien compris qu’il est avant tout un homme de main, chargé de faire le ménage et/ou les basses besognes. Pour autant, elle ne le sous-estime pas et reste parfaitement correcte avec lui. Non pas parce qu’elle a peur de lui mais simplement parce qu’elle est comme ça avec tout le monde.

- Manius ne fera jamais de mal à qui que ce soit, sois tranquille pour…heu…pupu.

Il n’y a plus qu’à prier en silence que Manius se tienne effectivement tranquille. Sinon c’est toute l’opération qui tombe à l’eau. Et elle n’en a pas la moindre envie.

Les chevaux avancent, c'est bientôt leur tour. Peut-être qu'avec un peu de chance on ne les arrêtera pas.
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MessageSujet: Re: La belle, la brute et le cochon (pv Honoria)   La belle, la brute et le cochon (pv Honoria) I_icon_minitimeMer 23 Sep - 18:43

Imitant le pénule, Honoria s'approcha de lui pour parler à mi-voix.

Mon autre frère, parfois mon père, se plaît souvent à répéter qu’il n’y a pas la lumière à tous les étages, chez Manius. Moi je préfère penser qu’il est resté pur et innocent comme un petit enfant qui ne sera jamais souillé par les réalités de ce monde. Il y a parfois une forme de sagesse, chez lui, qui est assez déconcertante. Regarde…

Il jeta un coup d'oeil par-dessus son épaule pour observer Calpurnia et le gamin qui batifolaient ensemble sur le plateau de la carriole.

Il ne sait pas ce que c’est, le mal, et il voit le bien chez tout le monde, avant de voir le mauvais. S’il t’a pris dans ses bras, c’est parce qu’il a senti que tu es quelqu’un de bien, toi aussi.

Après les oeillades, voilà la flatterie. Quintilius ne put s'empêcher de repenser aux quatre lascars qu'il avait mollesté quelques instants plus tôt. C'était ça être quelqu'un de bien ? Son père lui avait rabâché qu'il était un bon à rien et depuis qu'il avait quitté la ferme familiale, on l'avait plutôt taxé de bourrin, de cuistre, de stupide ou danger publique. Il n'y avait que les patriciens qui lui trouvaient des qualités et qui lui signifiaient. Titus avait vanté à plusieurs reprises les ressources qu'il possédait, son censeur de patron avait évoqué sa force et sa loyauté à toutes épreuves et voilà t'y pas que la jeune femme lui disait qu'il était bon. Le coin de ses lèvres s'étira pour dessiner un petit sourire plein d'humilité. Il reposa son regard vers l'avant, mettant en garde la jeune femme quant à la bonne tenue de son couillon de frangin avec la truie. Elle répondit avec la même douceur dans la voix que précédemment.

Manius ne fera jamais de mal à qui que ce soit, sois tranquille pour…heu…pupu.

Lamius s'esclaffa. Il tourna vers la jeune femme un regard légèrement moqueur avant de s'humecter les lèvres et déclarer.

C'est pour lui que j'me fais du mouron. Elle sait s'défendre et vu comme il est pas bien grand, elle pourrait lui bouffer un bras comme pour rigoler. Faut pas sous-estimer les cochons.

Lorsqu'il prononça la dernière phrase, une lueur morbide voila ses yeux pendant un bref instant. Il avait vu des porcs affamés se débarrasser de cadavres gênants bien plus rapidement que n'importe quelle volée de vautours. Ces mignons animaux pouvaient être doux et joueurs mais aussi brutaux et têtus, encore plus lorsqu'il y avait de la bouffe en jeu. Leur charrette avança encore un peu et on entendait à présent la voix de l'officier de la cohors urbana qui faisait avancer les véhicules au pas pour en arrêter quelques uns au hasard. Quintilius fronça les sourcils avant de se pencher de nouveau vers l'extérieur pour observer l'avant de la file.

J'crois que ça s'rait mieux si qu'tu vas derrière. S'y m'voyent avec une patricienne comme toi, on va s'faire arrêter à coup sûr.

Après un bref silence, ne sentant aucun mouvement sur le banc de conduite, il tourna son regard vers Honoria avant de dodeliner de la tête.

Allez ! Pas d'main !

À l'arrière, le mouflet et la cochonne continuaient de s'ébattre joyeusement à grands renforts de grognements et de rires enfantins. Le conducteur se redressa légèrement pour lancer par-dessus son épaule.

C'est là qui faut fermer vos mouilles. On s'la joue discret !

Ah ça, il lui avait bien répété, Titus. Dis-cre-tion ! Comme ça qu'il avait dit, en décomposant bien le mot et en détachant les syllabes. Le pénule avait eu beau tenter d'argumenter sur la discrétion limité d'un cochon de plus d'un quintal, rien y avait fait. Et alors que la consigne de Quintilius semblait pourtant clair, un échange la fit voler en éclat en une seconde.

Le cochon reste avec moi !
GROUUUUUIIIIIIIIIIIIKKK !!

Ce petit merdeux venait de tirer la queue de la truie ... Et les yeux des hommes du Guet s'étaient tournés vers Quintilius et son drôle d'équipage.
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MessageSujet: Re: La belle, la brute et le cochon (pv Honoria)   La belle, la brute et le cochon (pv Honoria) I_icon_minitimeLun 28 Sep - 7:49


- Très bien.

Elle a pris soin de ne pas porter de riches vêtements pour s’évader de la villa de son père. Honoria est proprement vêtue d’une tenue simple, qui la dissimule des regards curieux. Aux yeux de tous ceux qui seraient éventuellement enclins à jeter un œil dans la charrette, elle n’est qu’une femme pauvre, en compagnie de son petit frère, et d’une truie, sous la férule d’un époux un peu plus bourrin que la norme. Rien d’extraordinaire, à vrai dire. Et pour deviner qu’elle est patricienne, il faudrait qu’elle abaisse voile de laine rude qui couvre sa tête.

- Dis leur que je suis ton épouse, s’ils posent des questions. Je rejoins mon frère. A plus tard.

Elle se lève tranquillement et grimpe avec agilité sur le plateau arrière, rejoignant le petit Manius et la truie. Honoria se tapit dans un coin de la charrette, près d’une caisse de légumes, cachant ses pieds délicats et lisses sous le tissu de sa tunique. Elle tend les bras vers Manius, afin qu’il vienne s’y réfugier. Ce qu’il fait, de bonne grâce. Les moments de tendresse sont rares pour le garçon aussi ne boude-t-il pas son plaisir en serrant très fort sa sœur dans ses bras.

- Dis…Il va être en colère non ?
- Peut-être…Je n’en sais rien. Et ce n’est pas très important…Une fille en moins, ce sera un souci en moins à gérer, ce n’est pas comme si j’avais une importance à ses yeux, tu sais…


Un pieux mensonge. Elle sait qu’elle est importante. Elle sait qu’il sera fou de rage de voir l’opportunité qu’elle est s’évanouir dans la nature. Elle sait qu’il la maudira sans doute parce que sans elle, il n’y a pas de mariage, pas d’alliance politique, rien qui permettra son élévation au sein de la politique édelmienne. Tout ce qui disparait, là, dans cette charrette minable, c’est un billet pour une consolidation de sa réputation personnelle. Rien de plus. Le fait qu’elle soit un être doué de réflexion et de sentiments n’est jamais entré en compte dans les stratégies de son père. Un père qu’elle a pourtant tenté, toute sa vie, de satisfaire en étudiant, en lisant, en écoutant. Un père qui, en cinq mots comme en mille, n’en a rien à foutre.

Elle pose sa joue sur le haut de la tête de son frère, nouant les petits doigts salis aux siens, en ajoutant, morose :

- Nous ne sommes rien, nous ne comptons pas, il se passera parfaitement bien de nous, Manius. Tant que nous restons ensemble, tout se passera bien. Regarde…A Valtaia, il y a la mer ! Nous pourrons nous y rendre, certainement…

Elle ferme les yeux, bercée par le rythme lent de cette charrette avant de songer à Titus. Un sourire étire ses lèvres. On peut dire qu’il n’a pas fait les choses à moitié, celui-là. Et qu’il tient parole. C’est assez rare pour le souligner, d’ailleurs.

- C’est vrai que l’eau est pleine de sel ?

Honoria a un petit rire, elle parle tout bas à son frère, lui racontant des histoires fabuleuses de monstres marins et de navires d’or, afin de capter son attention et qu’il reste calme à l’arrière. Encore quelques mètres et la liberté leur tendra les bras, au moins pour quelques jours. Douce perspective.

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MessageSujet: Re: La belle, la brute et le cochon (pv Honoria)   La belle, la brute et le cochon (pv Honoria) I_icon_minitimeLun 28 Sep - 20:39


Alors que la fratrie babillait à l'arrière, Quintilius donna un ultime coup sur la croupe du cheval qui hochait mollement de la tête à chacun de ses pas. Pupu avait passé sa tête le long de la cuisse de son camarade d'aventure, curieuse d'assister à la suite des évènements autant qu'impatiente de s'éloigner du gamin gentil mais débile qui la prenait pour une poupée de chiffon en tirant sur ce qui dépassait. Au moins, il n'avait pas tiré les oreilles sinon même le pénule n'aurait pas pu calmer la fureur de la truie. Alors que la porte se dressait au-dessus de la carriole et qu'ils s'apprêtaient à franchir la grande arche de pierres grises, une voix retentit.

Halte !
Merde ...

Quintilius tira sur les rênes et laissa le propriétaire de la voix arriver à son niveau. Un jeune gaudelureau encore un peu vert comme le laissait supposer les quelques boutons d'acnée qui ornaient son visage aux traits toujours indécis entre l'enfance et l'âge adulte.

Qu'est-sse que tu transsportes, Ssitoyen ?
Grouik

Quintilius coula un regard incrédule vers le jeune homme au casque un peu trop grand pour sa tête de freluquet. Aux boursoufflures acnéiques qui rongeait sa trogne, venait s'ajouter des incisives qui se chevauchaient et qui créaient un cheveu sur la langue des plus amusants.

Qu'est-c'ça peut t'foutre ?

Outré par la réponse pleine d'aplomb du pénule, le petit gars de la cohors urbana monta sur ses grands chevaux.

Ssa me fout que ze te demande sse que tu transsportes ! Et quand un offissier du Guet te poze une quesstion tu réponds ! Desscends de là.
Grouik

Lamius haussa les épaules et descendit de son perchoir pour se planter devant le gringalet qui devait tendre le coup pour planter son regard dans celui de Quintilius. Ce dernier baissait la tête avec un petit sourire moqueur, tandis que dans son dos, Calpurnia agitait les sabots pour passer le rebord qui séparait le banc de conduite et le plateau arrière.

J'transporte ma famille. C'quoi le problème ?
Ssur un autre ton, Ssitoyen ! Tu ne ssais pas qui ze ssuis !

Quintilius s'esclaffa en plantant ses poings contre ses hanches.

Ha ! M'en cogne de qui qu't'es ! J'vais être en r'tard avec tes conneries !
Oooooh ssa mon gaillard, tu as pas fini d'être en retard ! Ze vais faire fouiller ta ssarrette, parole de Gnaeus Arinius !

La patte épaisse du pénule s'abattit sur l'épaule malingre du jeune homme qui sembla ébranler jusqu'au plus profond de son ossature. D'une main, Quintilius dénoua un petit étui de cuir qu'il brandit devant le visage plein de sebum de son interlocuteur.

Arinius hein ? Comme les exploitants des agricolae au Nord de la ville ?
Ze ... Oui ... Mais ... Ôtes ta ssale p ...
Agricolae qui dépendent du censeur Sevinius Galba ? Hein ?
Heu .. Oui mais ...

Quintilius ouvrit l'étui et dévoila un petit cachet portant le S des Sevinii et qui signifiait son statut de pénule. À la vue du symbole en métal engoncé dans le cuir usé, l'officier blémit avant de bégayer, mais Quintilius n'en avait pas fini.

J'dois dire à mon patron que les Arinii c'est des emmerdeurs ?
Ze ... Non ... Ze ...
Qui m'viennent m'empêcher d'me faire un petit séjour hors de la cité avec ma femme et mon gosse ...
Grouik !
Et mon cochon ?
Ah non ... Non Ssurtout pas ...
J'me disais aussi ...

Il retira sa paluche et rattacha l'étui à sa ceinture en se retournant. Il rejoignit Pupu sur le banc de conduite et s'assit en faisant couiner les jointures de bois.

Vraiment z'ignorais ... Ze ... Ze ...
C'pas grave mon gars !

Il se saisit des rênes et s'apprêta à les claquer sur le cul du bidet alors que le gringalet n'avait pas retrouvé sa contenance.

Tu ... Tu ne diras rien au Censseur n'est-sse pas ?

Quintilius échangea un regard amusé avec Pupu avant de déclarer.

À une condition !
Tout sse que tu voudras !
Dis "Saucisse".
Pardon ? ...
Saucisse !
Grouik
Ze ...
Bon bah j'dois voir Sevinius à mon r'tour et ...
SSAUSSISSE !

Les rênes s'abattirent sur la croupe alors que Quintilius partait dans un éclat de rire qu'il avait réussi à contenir depuis le début de l'échange. La charrette sortit de la cité tranquillement au rythme des sabots qui râclaient les sol et de la voix du pénule qui résonnait. Au bout de quelques coudées, il se pencha vers l'arrière pour rassurer ses passagers.

Ayé ! On est dehors ! C'est vrai qu'vous avez jamais vu Valtaia ?
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MessageSujet: Re: La belle, la brute et le cochon (pv Honoria)   La belle, la brute et le cochon (pv Honoria) I_icon_minitimeMer 4 Nov - 8:17


« Je ne comprends rien à cette sarabande », tonna Scorpa, dont la voix résonnait entre les murs du triclinium. « Ils ont attaqué la maison, ou ils ne l'ont pas attaquée ?
- C'est difficile à dire »
, répondit Hémigomphe, fuyant le regard du préteur. « Il semblerait que les violences se soient produites dans la rue, devant l'entrée. Le portail était entrouvert, mais personne n'a rien vu ni entendu dans la maison...
- Une rixe d'ivrognes »
, maugréa Scorpa. « Des ivrognes qui se battent devant chez moi, en quoi ceci me concerne ?
- L'enlèvement, Dominus. L'enlèvement...
- Tu vas vite en besogne, Hémigomphe. Ma fille a disparu, soit. Cela n'a peut-être rien à voir avec ce qui s'est passé dehors. Qui te dit qu'elle ne se cache pas quelque part dans la maison ? Tu as fouillé partout ?
- Ton fils aussi a disparu, Dominus...
- Mon fils... »
La bouche de Scorpa se tordit en une vilaine grimace. « Qui voudrait enlever Manius ? Qui s'intéresserait au simple d'esprit ? Même Paa n'en voudrait pas.
- Il... il y avait un mot, Dominus. »


Les yeux du préteur s'ouvrirent tout ronds, d'un coup d'un seul.

« Un mot ? »

Pour toute réponse, Hémigomphe tendit au préteur un morceau de parchemin. Scorpa s'en empara prestement et, dépliant le message, en entama la lecture.

« "Ave, père d'Honoria. A l'heure où tu liras ces lignes, ta fille sera déjà loin. Inutile de chercher à savoir qui je suis, on ne se connaît pas. Je suis le maître du kidnapping et nul n'a jamais réussi à déjouer mes stratagèmes. Je suis aussi insaisissable que le vent, et aussi imprévisible que la pluie si l'on fait abstraction des nuages. Maintenant que les présentations sont faites, sache que ta fille est détenue dans un lieu secret connu de moi seul et qu'elle y restera indéfiniment, à moins que tu ne sois prêt à payer une exorbitante rançon. Si tu désires la revoir vivante, ne tente rien de stupide et attend mes prochaines instructions. Tremble, Scorpa, tremble ! Mais n'oublies pas que c'est lorsque l'on égare les choses que l'on prend conscience de leur valeur. A bientôt, bisous." Et après il y a un mot qui commence par "T", mais c'est barré, comme s'il avait voulu signer mais qu'il avait changé d'avis. » Scorpa fronça les sourcils. « Par Ukko, je n'ai jamais rien lu d'aussi stupide !
- C'est curieux »
, fit remarquer Hémigomphe, « la lettre ne parle pas du tout de Manius.
- Ma fille a disparu »
, murmura Scorpa, indifférent à la remarque d'Hémigomphe. « Ma fille... on a enlevé ma fille. On m'a enlevé ma fille. » Il fronça les sourcils, tandis que des sillons se creusaient dans son front à mesure qu'il plissait les paupières. « Honoria... »

Maudite journée. Maudite à tous les points de vue. Elle avait débuté par une séance de la Curie qui avait tourné au ridicule, et que Scorpa avait dû quitter précipitamment, en apprenant par le jeune Aulus Ulpius Noctus qu'un drame s'était joué en sa demeure.
On s'en était pris à lui. On s'en était pris à sa maison, à sa famille. Et on lui avait pris Honoria.

« Ils ont aussi enlevé Manius, hein », insista Hémigomphe, comme si Scorpa n'avait pas entendu la première fois. « C'est quand même...
- Je la retrouverai. Je jure, par Metsa, que je la retrouverai.
- Je la trouverai pour toi, Père »
, s'exclama une voix hautaine à l'autre bout de la pièce.

Scorpa tourna la tête alors que son fils aîné, Scorpa le Jeune, venait d'apparaître sur le seuil. L'adolescent s'avança dans la pièce, le visage grave, les épaules droites et le front haut. Dans la solennité de l'instant, il avait la même démarche raide que son père. Cela émut Scorpa.

« Toi, Primo Minor, tu irai à sa recherche ?
- Moi, père. Je remuerai ciel et terre. Je passerai les rues de la ville au peigne fin. Parce qu'elle est ma sœur, même si elle est insupportable, et que je ne peux pas accepter que l'on s'en prenne à nous. »


Le préteur esquissa un sourire triste.

« Trouve-la, fils. J'ai toute confiance en toi. Retrouve ta sœur. »
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Titus Sevinius Merula

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MessageSujet: Re: La belle, la brute et le cochon (pv Honoria)   La belle, la brute et le cochon (pv Honoria) I_icon_minitimeVen 13 Nov - 2:06


Le crépuscule cédait la place aux ténèbres, mais les profondeurs de la cité ne dormaient pas. Suspendues aux poutres des étals, des lanternes multicolores dessinaient un chemin rouge, bleu et or, que Titus Sevinius Merula suivait avec nonchalance. Il avait revêtu les atours de la plèbe, se fondant comme de coutume dans la masse grouillante du peuple ; une attitude prudente, a fortiori lorsqu'on se mêlait au monde de la nuit. La rue était encombrée et bruyante, éblouissante de lumières. Entre deux échoppes, Merula avisa une tabernae d'où résonnait la musique entêtante d'un orchestre de flûtes, cithares et tambours. À l’intérieur, des bougies rouges sur les tables noyaient dans une ambiance intimiste une obscurité bondée. Il joua longuement des coudes avant de trouver, dans une alcôve, l'homme qu'il cherchait.

« Belle soirée, Montanus », lança Merula d'un air guilleret en s'asseyant à sa table. « Je vois que tu n'as pas commandé à boire ; c'est fâcheux. Nous allons y remédier tout de suite. Il fait une chaleur dans ces rues surpeuplées ! GARCON ! On va prendre un pichet de vin citronné », commanda-t-il, avant de glisser à l'adresse de son camarade : « 'paraît que c'est à la mode, ce truc, en ce moment. Ca a l'air proprement dégueulasse rien qu'à l'imaginer, mais j'aimerais me faire mon propre avis. »

Montanus ne répondit pas. Tandis qu'on leur apportait un pichet et deux verres, il se contenta de tapoter nerveusement la table du bout des doigts, trahissant son impatience. Un léger tic au niveau de sa mâchoire laissait entendre, quant à lui, qu'il n'était pas d'humeur à rire. Autant de détails que Merula n'avait point remarqués.

« Bon ! » reprit Merula une fois qu'ils furent servis, « c'est effectivement dégueu. Maintenant, parlons, mon ami. J'ai entendu les rumeurs qui ont circulé en fin de journée. J'attendais de les avoir de première main, mais il semble déjà que, sans être un fiasco total, tout n'ait pas tourné comme c'était initialement prévu...
- C'est le moins qu'on puisse dire »
, gronda Montanus. « Ca devait être une mission toute simple. Mes gars devaient récupérer la fille, et la ramener à ton gars pour qu'il lui fasse quitter la ville. Tu disais que ça se passerait sans accroc. Que la donzelle était dans le coup, qu'il n'y aurait pas de casse. Tu m'avais donné ta parole, et moi, je t'ai filé ce coup de main en pensant naïvement que tu ne m'embarquais pas dans une combine foireuse...
- "Foireux" n'a jamais fait partie de mon vocabulaire, Montanus. Je te l'ai dit : avec moi, tout est carré.
- Ah ouais ? »
Le ton de Montanus se fit glacial, alors que ses yeux se réduisaient, dans la pénombre ambiante, à deux billes menaçantes. « Deux de mes gars y sont restés, et j'en ai un troisième qui est tellement amoché que le barbier ne sait pas ce qu'il va pouvoir en faire. Voilà le résultat de ton plan tout simple, Merula. Y me semble pas que c'était prévu à la base. Si ça c'est pas une combine foireuse, éclaire-moi un peu. Je suis parano, ou tu me l'as faite à l'envers ?
- Moi, te la faire à l'envers ? Jamais ! »
s'exclama Merula d'un air outré. « Voyons, Montanus ! Toi et moi, on se connaît depuis si longtemps... nous sommes comme frère et soeur...
- Ah, j'en ai ma claque de tes conneries »
, grinça Montanus, avant de cogner la table d'un poing rageur. « Tu sais ce que Varus m'a dit, avant d'avaler sa dernière dent ? Que c'est ce débile de Quintilius qui les a fracassés tous les trois à coups de gourdin, et qu'il a filé avec la fille, et qu'il a aussi embarqué un mioche avec.
- Un mioche ? »
s'étonna Merula. « C'était pas prévu, ça.
- Et Quintilius qui tabasse mes hommes, c'était prévu ?!
- Mais absolument pas, Montanus ! Absolument pas ! Pourquoi Quintilius ferait-il une chose pareille ? Je l'avais parfaitement mis au parfum, il était au courant du plan, il savait tout ce qu'il fallait savoir. Il y a forcément une explication rationnelle.
- L'explication rationnelle, c'est que ton homme de main est encore plus con que mon cousin Griffus.
- Ah, je n'irais pas jusque-là, mais Quintilius n'est pas toujours très avisé comme garçon, je dois le reconnaître. Mais enfin, je ne peux pas croire qu'il s'en serait sciemment pris à tes hommes ! Il les adore, en plus, il est tout le temps fourré avec eux à la taverne. Peut-être... oui, peut-être qu'il ne les a tout simplement pas reconnus...
- Tu te figures que je vais avaler ça ? »
murmura Montanus, une lueur assassine dans le regard. « J'ai perdu deux hommes, peut-être trois, et quoiqu'il se soit passé dans la cervelle moisie de Quintilius, c'est toi le seul responsable. Ces vies, tu me les dois, Merula. Mais y'a pas que ça. Putain de bordel, y'a pas que ça. Là, c'est... la situation est encore pire que ça, bien pire, bien pire que tu ne peux le croire. »

Merula avala sa salive. Sans être de nature anxieuse, le ton de Montanus lui inspira comme une désagréable envie de pisser. A moins que ce ne fut l'effet du vin citronné qui serait descendu directement vers la sortie.

« Le préteur Scorpa a deux de ses mioches portés disparus », reprit Montanus. « Ses gens sont déjà en train de passer les rues au peigne fin, ils interrogent tout le monde. Si on s'en était tenu au plan de départ, on aurait pu s'en tirer sans laisser de trace. Sauf que ton débile de copain et son cochon ont laissé deux de mes hommes sur le palier de la maison du préteur. Ils vont remonter jusqu'à moi, Merula, et je te le dis tout de suite : si je tombe, tu tombes avec moi. Sauf que, tu vois, j'ai aucune envie de tomber, alors tu vas te remuer le cul pour éviter ça, et fissa.
- Du calme, Montanus... du calme. Je veux bien tout ce que tu veux, mais je ne suis pas un homme de miracles.
- Oh, ça je le sais. Les miracles, t'as plutôt coutume de les faire dans le mauvais sens, mais tu vois, Merula, je pense que c'est le bon moment pour toi de changer. T'as trois jours pour trouver une solution. Parce que si dans trois jours t'as pas réglé ce merdier, alors je vais m'occuper de ton cas. Et ça, c'est que le début ; tu m'as coûté trois de mes hommes, et pour ça aussi, à un moment donné, il va falloir casquer. »




25e jour de Secundo Seminare

Trois jours pour tout changer. Trois jours pour régler le problème. Trois jours pour éviter que les hommes du préteur remontent la source jusqu'à Montanus ; trois jours pour s'éviter un véritable déluge de merde. Telle était la situation de Titus Sevinius Merula, pris entre l'arbre et l'écorce, et même plus encore. A qui pouvait-il se fier, qui pourrait lui venir en aide ? Au début, il fit comme il faisait toujours, il minimisa le problème, confiant dans le fait que trois jours seraient amplement suffisants pour trouver une solution. Mais les trois jours passèrent à une vitesse inouïe, et le crépuscule du dernier soir tomba comme un couperet avant même que Merula n'ait pu accoucher d'un embryon d'idée pour régler ce merdier.

De Quintilius, il n'avait nulle nouvelle ; il espérait que le pénule avait pu emmener Honoria à l'abri. Il ignorait pourquoi il avait aussi embarqué l'enfant débile du préteur, mais ça n'avait, à ce stade, pas une grande importance. Ce qui importait, pour l'heure, c'était qu'à tout instant pouvait débarquer Montanus et ses gros bras, ou des clients de Scorpa. Devait-il se résigner à demander la protection de son père ? Ce ne serait là, Merula en était certain, qu'un troisième chemin le conduisant tout droit à sa perte, peut-être même plus cruellement que les deux autres.

Alors Merula se fit rare. Pour la première fois depuis bien longtemps, on ne le vit plus dans ses traditionnels lieux de débauche ; on ne le vit pas davantage à la Curie, la rumeur disant qu'il se faisait porter pâle. La domus des Sevinii lui offrait une sécurité provisoire. Le sursis que lui avait offert Montanus était largement dépassé, mais les jours continuaient de s'écouler, inexorablement...

Au bout de dix jours, le fait de ne pas savoir à quoi s'en tenir devint trop dur à supporter. L'ennui, aussi. Dans sa réclusion, Merula en vint à échafauder tout un tas de suppositions moralement satisfaisantes. Le préteur avait peut-être renoncé à retrouver sa fille ? Ou alors il avait retrouvé Montanus, et il l'avait fait exécuter sans lui laisser le temps de s'expliquer, ce qui le plaçait, lui, hors de danger ? Ce serait merveilleux, pensait Merula. Il fallait qu'il en ait le cœur net. Et il avait cruellement besoin de sortir.

Il pensait à Honoria. Il avait promis de la rejoindre à Valtaia, mais voilà déjà dix jours qu'elle était partie avec Quintilius. La pauvre, songeait-il, comme elle doit être perdue sans moi. Dans la solitude de sa chambre, Merula s'était mis à penser souvent à elle. Au départ, elle n'était qu'une fille parmi d'autres, intéressante à plus d'un titre, mais facilement remplaçable. Or, ces jours-ci, à défaut de pouvoir lui substituer un autre visage féminin, la fille de Scorpa occupait régulièrement ses pensées. Son imaginaire échafauda de toutes pièces une histoire romantique ; ils étaient, après tout, l'archétype même du couple maudit, que le monde entier semblait devoir séparer, tels Aurin et Hedelma.

Mais la délivrance vint. Tandis que Merula se laissait peu à peu gagner par le désespoir, la délivrance arriva d'un ordre de son père. S'il ignorait tout du méfait orchestré par son fils, Lucius Sevinius Galba voyait d'un mauvais œil l'oisiveté dans laquelle il semblait se complaire. Probablement las de le voir traîner jour et nuit en sa demeure - ce qui l'obligeait en plus à supporter ses bavardages stupides - Galba jugea bon de l'envoyer s'acquitter d'une course dans leurs domaines ruraux. Une tâche insignifiante, une punition sans doute, que Merula accueillit avec une joie surprenante... n'était-ce pas la solution idéale ? Il quittait Edelmia et ses dangers pour aller se mettre au vert à la campagne et s'y faire oublier. Et retrouver Honoria.

Sans doute eut-il quelque peu déchanté, s'il avait imaginé le sale coup qu'avait prévu de lui jouer Kohta le jour de son départ...
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Primo Sicinius Scorpa

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Primo Sicinius Scorpa

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MessageSujet: Re: La belle, la brute et le cochon (pv Honoria)   La belle, la brute et le cochon (pv Honoria) I_icon_minitimeDim 15 Nov - 8:58



26e jour de Secundo Seminare

C'était peu avant l'aube, à l'heure où l'obscurité glissait du noir au bleu et projetait sur les façades une clarté ensommeillée, que s'enclencha le piège.

« Halte », s'écria une voix dans la semi-pénombre. On entendit hennir des chevaux, crisser les roues d'un chariot. Quelques fenêtres aux étages des insulae avoisinantes se parèrent de lumières vacillantes, la scène éveillant la curiosité de résidents au sommeil léger. En bas, trois cavaliers avaient stoppé net. Avec eux, deux chevaux de trait s'étaient également immobilisés avec leur chariot, que commandait un cocher au faciès de souris. Au-devant, un char dépourvu d'attelage s'était jeté en travers de la rue, obstruant le passage. Avant même qu'ils n'aient pu songer à faire volte-face, l'autre issue s'emplit d'une dizaine de silhouettes sombres. Des hommes, qui armé d'une pique, qui brandissant une rapière, voire un simple bâton, formaient une ligne compacte coupant toute retraite.

« Que signifie... ? » s'exclama l'un des cavaliers pris au piège, tirant du fourreau une rapière. « Allons, du vent, tas de rustres ! Vous n'avez pas idée d'à qui vous vous en prenez.
- Allez-vous en »
, lança un deuxième cavalier, « allez-vous en et nous oublierons cet incident, sinon... »

La menace ne souleva qu'une volée d'éclats de rire parmi les soudards. Comme les deux hommes se renfrognaient, le troisième cavalier s'avança parmi eux.

« Ne vous époumonez pas, mes amis », glissa-t-il à ses camarades. « Je crois qu'ils savent parfaitement qui je suis, et je pense aussi qu'ils savent compter. J'ai l'impression que nous n'avons pas l'avantage. » Il ajouta, à voix basse : « on fait semblant de se rendre, et dès qu'ils baissent leur garde, on les plante un par un avec l'effet de surprise...
- Je vous signale qu'on entend tout ce que vous dites ! »
rugit une voix parmi les agresseurs. « On est venus chercher Titus Sevinius Merula. Qu'il se rende sans faire d'histoire, et on laissera filer les autres. »

Merula échangea un regard avec ses deux cavaliers, ainsi qu'au cocher, comme s'il jaugeait la loyauté de son escorte. Cette démarche ne tendant guère à le rassurer, il cessa rapidement et recentra son attention sur la ligne d'hommes armés.

« Et qui me demande ?
- Moi. »
La ligne s'écarta pour laisser passer un homme chevauchant un étalon bai. Le cavalier était grand, mais la fine clarté de l'aube naissante laissait transparaître un visage juvénile. « Moi, Primo Sicinius Scorpa Minor.
- Ah oui, Scorpa le Jeune ! »
s'exclama Merula d'un air enjoué, comme s'il reconnaissait un vieux pote. « Cela me rassure de te voir ; pendant un instant, j'ai cru qu'on était tombés dans un guet-apens. »

Le fils aîné du préteur émit un grognement d'impatience. « Trêve de plaisanteries. C'est ma sœur Honoria que je veux, et mon frère Manius, aussi. J'ai le sentiment, Merula, que tu sais parfaitement où je peux les trouver.
- On t'aura mal renseigné, mon ami. Tu peux vérifier dans le chariot si tu veux, mais n'y mets point trop de désordre, je te prie ; j'ai soigneusement rangé mes subligaculum par ordre d'épaisseur.
- Je ne suis pas ton ami. Je t'offre une dernière chance de me dire où ils sont ; je ne le demanderai qu'une fois.
- Il me semble que ça fait déjà deux fois, là. Sans vouloir me montrer exagérément tatillon. »
Merula ponctua d'un sourire. « Primo, pourquoi cet étalage de violence, pourquoi ces menaces ? Faut-il vraiment que nous soyons tous ennemis ?
- Il est un peu tard pour t'inquiéter de ça. Tu t'es attaqué à la mauvaise famille, Merula, et c'est toi l'unique responsable.
- Mon père me traite tout le temps d'irresponsable, du coup, ça me fait plaisir.
- Je vais te passer l'envie de plaisanter. Rends-toi, si tu as un tant soit peu d'honneur.
- Tu parles d'honneur, avec ta bande d'écorcheurs et tes méthodes de Broin !
- Je n'ai pas de leçon à recevoir d'un ravisseur d'enfants. »


Scorpa le Jeune tira du fourreau une épée. La nuit bleu pâle s'y refléta un instant sur la lame nue.

« Epargne la vie de tes hommes, Merula, et rends-toi maintenant. A moins que leur vie n'ait à tes yeux aucune espèce d'importance...
- Comment oses-tu insinuer une chose pareille ? »
s'offusqua Merula. « Je place la vie de mes hommes plus haut que la mienne.
- Prouve-le. Rends-toi.
- Oh, oui, je me rends, Scorpa Minor »
, persifla Merula. « Je te prends à témoin, mon garçon, d'ailleurs, je vous prends tous à témoin ! Il est dans ma nature de m'assurer de la sauvegarde de ceux qui placent leur existence entre mes mains. C'est ma responsabilité, c'est le fondement de notre noblesse, à nous, les Sevinii. » Il se laissa entraîner dans une envolée lyrique, jetant pêle-mêle citations épiques issues de vieux recueils dont il n'était pas sûr de saisir le sens, mais qui transcrivaient bien la gravité de l'instant. « Car c'est d'une émulation des actions généreuses que sont éveillées, nourries et fortifiées en nos âmes ces étincelles de bonté, de prudence et de valeur, qui comme un feu divin sont mêlées en leur essence. Mon cœur n'est pas si bas qu'il craigne de mourir ! Que me faut-il donc faire, afin de faire bien ? Demeurer en ces jours, sans entreprendre rien ? Ô guerriers indomptés, dit le brave à ses soldats, errants au milieu des armes, qui d'un cœur haut et fort, regardent sans frayeur la face de la mort ! » Ses propres hommes le toisaient d'un air perplexe, et même Scorpa le Jeune haussa un sourcil interloqué, cherchant le sens de ce qu'il était en train de déblatérer. « Oui, la mort, mes braves ! La mort... et comme le disait le très juste Baldius, qu'importe la manière, pourvu que la fin la justifie, et bon vent les débiles ! »

Il tourna bride, et son cheval s'élança au triple galop. Non pas vers la ligne des écorcheurs, qui n'avait pas eu le temps de réagir, mais à l'opposé, là où la rue était obstruée. Le char jeté en travers couvrait le passage de toute sa largeur. Son cheval y fut en quelques enjambées, mais se cambra devant l'obstacle, ne trouvant pas la place de le contourner. Déjà, derrière lui, l'ennemi réagissait. Scorpa le Jeune éperonnait sa monture, s'élançant à ses trousses, tandis que les soudards à pied se ruaient eux aussi à l'assaut. Entre l'arbre et l'écorce, les hommes de Merula réalisaient qu'ils allaient mourir, et tiraient leurs épées dans un geste de désespoir. Merula n'avait pas le temps de s'inquiéter de leur sort, et il ne comptait pas le faire ; il démonta de selle aussi vite qu'il le put et, à pied, escalada le char. Il ne se retourna pas en entendant Scorpa le Jeune débouler en trombe, il ne se retourna pas davantage en l'entendant hurler de rage, comme Merula lui échappait d'un cheveu et parvenait de l'autre côté de la rue. Alors, il courut, courut comme un fou, comme si c'était la colère d'Ukko qui le pourchassait dans la cité ensommeillée.

« Rattrapez-le ! » retentit dans la nuit la voix de Scorpa le Jeune, et nombre d'autres le reprirent en écho.

Merula s'engouffra dans les venelles étroites, à la faveur de ce qu'il restait d'obscurité. A l'horizon, on distinguait les premières lueurs de l'aurore. C'était probablement le pire moment pour disparaître : le petit jour chasserait sous peu la pénombre, et les rues étaient désertées de tous, à l'heure charnière où le monde de la nuit s'effaçait tandis que celui du jour se faisait encore attendre. Merula courait, toujours. Le sang lui battait frénétiquement aux tempes, et tout son corps accusait la fatigue d'une course improvisée à une heure bien trop matinale. Que n'était-il pas resté au lit ! Il emprunta un étroit passage qui descendait en pente raide entre deux énormes insulae, et déboucha sur une petite place déserte, au centre de laquelle coulait paisiblement une fontaine. Epuisé par la pointe de vitesse qu'il venait de pousser, il se jeta pratiquement dedans, comme son corps tout entier réclamait de l'eau. Cataclop. Cataclop. La fontaine émettait un doux clapotis. Cataclop. Cataclop. Le débit n'était pourtant pas des plus denses, mais le jet d'eau donnait une belle résonnance. Cataclop. Cataclop. Merula inspira, expira, sa soif plus qu'étanchée, et prêta à la nuit une oreille plus attentive. Cataclop. Cataclop. Il fronça les sourcils. Par le con d'Aïka, c'est un cheval, ça.

Guidé par sa colère, le fils aîné du préteur n'avait pas daigné attendre ses hommes. Toujours juché sur son étalon bai, Scorpa le Jeune traquait sa proie avec la détermination froide du prédateur sûr de son coup. Le jour était en train de se lever ; le fuyard ne serait pas difficile à débusquer. Restait à espérer que ce ne serait pas la cohorte urbaine qui mettrait la main dessus en premier. Il tenait impérativement à conduire l'homme pieds et poings liés à son père. Merula serait alors leur prisonnier dans l'attente de son procès, et personne, ni le censeur Galba, ni le tribun Acilius, ni même le procurateur Feles, ne pourrait réclamer sa remise en liberté. Aussi, lorsqu'il parvint sur la place et qu'il trouva le fuyard à la fontaine, seul et épuisé, Scorpa le Jeune leva un poing victorieux.

« Pauvre imbécile. Que ne t'es-tu pas rendu tout à l'heure ? Pourquoi nous faire perdre du temps, Merula ? Qu'importe. Les dieux ont visiblement décidé que c'est moi qui te mettrait la main dessus.
- Et où sont tes hommes, mini Primo ? Tu les as perdus ?
- Je n'ai pas besoin d'eux. Mon épée suffira à te contraindre.
- Ca, ça me paraît présomptueux, jeune homme. Si tu veux croiser le fer, Chaude-Pisse te donnera la réplique.
- Chaude-Pisse ? »
Scorpa le Jeune fronça les sourcils. Pour illustrer son propos, Merula tira de son fourreau sa propre spatha, une longue épée dont la lame était de bronze. Sous la poignée fermement tenue par Merula, l'on remarquait deux anneaux d'or. Scorpa le Jeune considéra l'objet avec autant d'étonnement que de curiosité. « C'est fait exprès, qu'elle ressemble à une bite ?
- Viens donc te faire dépuceler, mon gars, et tu auras ta réponse. »


Scorpa le Jeune perdit quelque peu de sa superbe. Il n'avait pas vraiment prévu d'affronter le fils du censeur Galba dans un duel... d'un autre côté, Merula accusait visiblement un gros coup de fatigue, en plus d'être un imbécile fini. Ce ne serait pas bien difficile. Remporter l'épreuve des armes ne rendrait la cause des Sicinii que plus légitime, et Soltar lui-même guiderait le bras vengeur du fils Scorpa.

« Soit », répondit-il, et il descendit de selle. Soupesant son épée, il exécuta quelques moulinets, fendit une ou deux fois l'air comme pour se faire la main. « A nous deux, fils de pachyderme.
- Tiens, une vanne sur le poids de mon père. Comme c'est original, j'avais jamais entendu ça. »


Les deux adversaires se jaugeaient du regard, à présent, mais aucun ne semblait vouloir prendre l'initiative. Scorpa le Jeune fut le premier à s'impatienter. Il avança de deux pas, et tenta de frapper d'estoc ; Merula fit un pas de côté pour esquiver l'assaut, et tenta une contre-attaque que son adversaire n'eut aucun mal à parer. L'un et l'autre se mirent alors à ferrailler. Les lames s'entrechoquaient tandis qu'ils se tournaient autour, dans une ronde étrange au clair du petit jour, comme s'ils exécutaient un petit spectacle. C'était, à proprement parler, le combat le plus minable qu'on puisse voir ; il opposait après tout un adolescent de seize ans à un légionnaire raté, et aucun des deux belligérants ne manifesterait de véritable talent pour les armes. C'était une chance qu'il n'y ait personne pour assister à la scène ; pas pour eux, mais pour le spectateur hypothétique qui n'eut pas manqué d'en crever d'ennui.

« Attention, derrière toi, un chat !
- Tu crois que je vais gober ça, Merula ? Tu me prends à ce point pour un imbéc... »


Occupé à reculer tout en parant les attaques de son adversaire, Scorpa le Jeune n'avait pas remarqué le félin errant qui se promenait à cette heure fort matinale. Il lui marcha sur la queue, et le chat poussa un miaulement si strident et si inattendu que le fils du préteur eut un sursaut. Le chat essaya de lui mordre la jambe, Scorpa le Jeune perdit l'équilibre et s'étala par terre, lâchant son épée. Merula se rua sur lui, prêt à saisir l'occasion ; le garçon eut la présence d'esprit de jeter sa jambe en travers de ses chevilles pour le faucher dans sa course, et Merula alla s'étaler un peu plus loin, manquant de s'empaler sur sa propre Chaude-Pisse. Scorpa le Jeune fut le premier à se relever. Il ramassa son épée, alors que Merula se relevait lui aussi. Dans un sursaut de haine, Scorpa arma sa frappe, non cette fois pour désarmer l'adversaire, mais bien pour trancher. Par réflexe, Merula jeta sa lame en travers, dans un geste purement improvisé, alors même que son adversaire se ruait sur lui.

Le fils du préteur n'eut pas le temps de comprendre ce qui lui arrivait. Chaude-Pisse entailla la chair tendre de son visage juvénile, sous son œil, et un liquide chaud lui inonda la joue. La douleur vint presque aussitôt, et il en lâcha son épée et tomba à genoux pour couvrir de ses mains la plaie ouverte. La peur de mourir le laissa tétanisé et impuissant, à geindre comme un gosse dans l'attente que son adversaire finisse la besogne. Mais il ne vint nul coup de grâce. Le visage enfoui dans ses paumes empoissées de sang, Scorpa le Jeune entendit hennir son cheval, avant que n'en résonnent les sabots et qu'une cavalcade lui signale que Merula lui avait dérobé sa monture.

Le fuyard était déjà loin lorsque les hommes du préteur déboulèrent sur la place, trouvant Scorpa le Jeune en piteux état.
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