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 La chèvre de Bassium [Harmonia]

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Titus Sevinius Merula

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MessageSujet: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeLun 1 Juin - 10:40


Huitième jour de Primo Seminare 399
Bassium, Edelmia


« Quelle merveilleuse journée », s'exclamait un Titus Sevinius Merula des plus guillerets, circulant dans les allées de Bassium aux commandes d'un magnifique char mené par deux robustes chevaux.

Il régnait ce jour-là une agitation particulière dans ce quartier si prisé par les riches patriciens d'Edelmia. Une foule bigarrée se pressait dans ses ruelles pavées, à l'ombre des belles demeures habituellement si tranquilles. Des colporteurs aux ongles noirs tiraient des chariots chargés de babioles, de cages à poules et de caisses de poisson d'une fraîcheur toute relative ; leur marchandise encombrait la rue, emplie du vacarme des caquètements de leurs volailles, auxquels se joignaient les voix des marchands haranguant le chaland. Les indésirables attirant leurs semblables, ce marché improvisé, certainement illégal, emmenait avec lui des troupes de comédiens dépenaillés, dont le talent était à la hauteur de cette triste mascarade. Et ça criait ! Ça chantait aussi, ça chantait si mal, si faux...

Du haut de leurs fenêtres, matrones et autres commères fortunées suivaient ce petit manège d'un regard sévère, le nez pincé. Que venaient-ils trafiquer dans leur quartier, ces grouillots infâmes ? Si sales, si répugnants ! Leur seule présence semblait rendre l'atmosphère plus lourde, à moins que ce ne soit l'odeur. "Rentrez chez vous ! " criaient les matrones là-haut, et certaines déversaient même des seaux d'eau souillée et autres immondices innommables pour chasser les importuns.

Mais tout le monde ne s'offusquait pas de voir le quartier de Bassium envahi par la gueusaille. Guidant son char entre les étals improvisés, Titus Sevinius Merula faisait son marché, tout guilleret. Le jeune patricien était, il est vrai, habitué à fréquenter la canaille, alors bon ! Il avait toujours pris un certain plaisir à fréquenter les marchés des pauvres, parce que toutes les marchandises étaient ainsi à sa portée. Plus facile de briller parmi les clodos qu'auprès des riches, songeait-il avec sagesse. La grandeur, après tout, est toujours relative. Paradant tel un prince parmi les gueux, flanqué de son fidèle esclave Condylome, le patricien achetait tout et n'importe quoi, chargeait toutes sortes de babioles aussi laides qu'inutiles sur son char.

« Là, regarde Condylome, regarde cette chèvre ! N'est-elle pas magnifique ?
- Elle est hideuse, Dominus. Elle est à moitié crevée, non ?
- Elle complétera ma collection d'horreurs. Paie le double de son prix, et mets-la dans le char. »


Comme Condylome s'exécutait, et qu'autour d'eux hommes et bêtes se bousculaient, l'agitation s'apprêtait à prendre un nouveau tour : un frisson parcourut en effet la foule vagabonde, alors que se répandait la rumeur : la cohorte urbaine rappliquait. Presqu'aussitôt, le marché sauvage fut en proie à la débandade. Comme la garde arrivait, se mesurant aux plus récalcitrants de cette plèbe crasseuse, les moins téméraires ramassaient leur barda et prenaient leurs jambes à leur cou. Les matrones à leurs fenêtres les accompagnèrent de leurs cris, les sommant d'aller se faire voir ailleurs. Quel langage ordurier pour des grosses bourges, s'offusquait Merula en son for intérieur. Comme Condylome achevait d'attacher la chèvre, Merula grimpa aux commandes du char et, dès que l'esclave l'eut rejoint, donna du fouet pour mettre en branle les deux chevaux. Aussitôt la machine s'ébranla et, profitant de ce que la ruelle se vidait peu à peu, Merula fit accélérer les bêtes.

« Eh bien, ça n'aura pas duré longtemps ! Une chance que j'aie eu le temps de trouver mon bonheur.
- Que comptes-tu faire de cette bestiole, Dominus ? Ne crains-tu pas qu'en te voyant arriver avec ça, ton père se mette en colère ?
- Allons, Condylome ! Ne juge pas si hâtivement ce noble animal. La chèvre est vieille et infestée de puces, c'est un fait ; la beauté est chose éphémère, et je suis certain qu'au temps de sa fraîcheur, celle-ci attirait bien des mâles. Cette bête est le symbole de mon immense respect pour les femmes. A sa vue, mes conquêtes se diront : "cet-homme-là n'est pas un goujat comme les autres ! Il nous aimera toujours, même lorsque nous serons laides et pleines de rides."
- Et c'est vrai, ça, Dominus ?
- Evidemment que non. Mais tant qu'elles sont jeunes, elles peuvent bien le croire. »
Sans lâcher la bride des chevaux qui tiraient le char, Merula se retourna pour mieux regarder la chèvre attachée derrière. « Tu as vu ses yeux ? Ils me rappellent ceux de ma mère. Il faudra que je lui trouve un nom...
- DOMINUS, ATTENTION ! »


L'exclamation de Condylome fit sursauter Merula, qui reporta aussitôt son regard devant lui. Horreur ! A une vingtaine de pas, en plein milieu de la rue, un enfant se tenait immobile, tétanisé par la peur... et le char s'élançait vers lui à toute allure. Dans un ultime réflexe, Merula tira sur les rênes, intimant l'ordre aux chevaux d'arrêter leur course. Mais en auraient-ils le temps ?
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeDim 21 Juin - 13:00

En ce jour de marché, les rues de Bassium étaient bien animés. Tel marchand vantait les mérites de ses superbes esclaves barbares venues d'une lointaine contrée du sud : elles avaient de longs cheveux couleur de jais et des yeux d'obsidienne flambant, leurs poitrines nues ondulant joliment alors qu'elles dansaient. Un autre me fit les yeux doux, m'invitant à essayer sa collection de parfums à la myrthe. Plus loin, on entendait les poules d'un volailler caqueter.

Lucianus Minor, avec la curiosité des enfants de son âge, s'approcha attiré par les animaux. Le volailler pesta cependant lorsqu'il s'avisa de passer son doigt à travers une cage pour caresser l'une des poules qui lui becta gentiment l'index.

"Sale gamin, veux-tu bien...

Allons donc ! m'exclamai-je en retour avec l'autorité qui m'était propre. Est-ce une façon de s'adresser à Lucianus Iustius Minor, volailler ? Mon fils est sans doute un futur édile, voire un curiate, et tu ferais bien de t'en souvenir !

Le citoyen, se rendant compte de sa grossière erreur, me regarda avec déférence avant d'incliner profondément la tête.

- P... Pardonne-moi ô citoyenne ! Mais si je puis me permettre, ton fils devrait être prudent. Il arrive aux poules de mordre...
- Dans ce cas, ne laisse pas tes cages à la portée des enfants !" rétorquais-je.

La matinée était encore fraîche, mais le soleil caressait agréablement le visage. Aussi avais-je décidé d'accompagner Aerona faire les commissions, histoire de prendre l'air avec Lucianus Minor. Cela ne pouvait nous faire que du bien. Peut-être même irions-nous au théâtre cet après-midi. Cela faisait un moment que je n'avais point été voir de pièce...

"Lucianus, ne t'éloigne pas trop," dis-je soudain en voyant mon fils s'approcher à présent de l'une des fontaines de l'avenue.
Peine perdue, c'était tout juste s'il m'écoutait. Et par tous les dieux, il semblait que ce matin, il eût particulièrement la bougeotte !
Avant qu'Aerona et moi eussions pu intervenir, le petit bougre s'élançait maintenant pour traverser la rue, juste au moment où un char arrivait à tout allure. Mon coeur plongea violemment dans ma poitrine, à la même vitesse que ledit char qui menaçait d'écraser mon enfant et je me jetais à mon tour sur la chaussée, alors que le conducteur imprudent s'efforçait désespérément de freiner. Lucianus Minor dans les bras, j'opérais un repli stratégique, mais l'un des chevaux se cambra, son sabot me manqua de très peu et j'atterris sur les fesses au milieu des pavés, cheveux défaits et stola entrain de tomber. Par Soltar, le bougre allait m'entendre ! Rouler à cette vitesse au milieu du quartier ! Il aurait pu écraser bien d'autres piétons !
Je me redressais, l'allure fière, alors qu'Aerona me tendait une main pour m'aider à me relever, que je repoussais. Mon esclave battit aussitôt en retraite, saisissant pleinement l'étendue de ma fureur alors que je m'adressais à l'infâme conducteur.

Eh bien, citoyen, m'exclamais-je, mes yeux gris tempête s'assombrissant de façon particulièrement menaçante. L'on ne t'a pas appris à ne pas faire galoper tes chevaux dans la cité ? Attends donc que j'aille déposer plainte auprès du préteur ! Tu as failli tuer mon fils Lucianus Iustius Minor, faut-il croire que tu n'es point en bonne grâce auprès de la déesse Tide ! Puissent les dieux te faire marcher à quatre pattes à la manière des ânes !  
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeLun 22 Juin - 18:50


Le désastre avait été évité de peu. Une seconde de battement, et le char de Merula se serait fait une nouvelle fraîcheur, la carrosserie teintée de pourpre et les roues graissées à la cervelle d'enfant. Quand Merula cherchait à s'illustrer par des coups d'éclat, ce n'était pas tout à fait à cela qu'il pensait.

Loué soit Kohta, l'enfant était sauf. Las, c'était bientôt pour une autre peau que Merula allait devoir s'inquiéter : la sienne. La matrone qu'il avait manqué renverser avec son rejeton s'était relevée, les cheveux emmêlés et la stola défaite comme une lupa des bas-fonds du quartier de Latriae ; mais un rapide coup d'œil suffisait à s'apercevoir que cette poule-là venait d'une basse-cour autrement plus huppée. Le tissu de sa stola froissée, glissant indécemment de ses épaules, était de qualité, et elle ne souffrait d'aucune maladie de peau. Elle ne souffrait pas non plus d'extinction de voix, comme en témoignait la soufflante qu'elle passa au pauvre Merula. Elle était furieuse, la matrone ! Merula encaissa ses vociférations, les yeux écarquillés et la bouche entrouverte dans une expression de stupeur, clignant frénétiquement des yeux. Pendant un instant, il demeura muet, ce qui était un petit exploit en soi ; le regard morne, l'œil coupable, on eut dit qu'il allait encaisser la bravade comme le fait un enfant pris la main dans le sac, baissant la tête pour se réfugier dans le silence.
Mais le naturel ne tarda pas à reprendre le dessus.

« Ta colère est légitime, citoyenne. Et je la partage ! » Avec une moue théâtrale, Merula se lança dans une séance d'auto-flagellation. « Oui, je suis en colère contre moi-même. Cette ardeur qui m'habite et qui met en danger mon prochain ! Ah, comme je me hais ! Il y a des jours où je voudrais me faire du mal, pour me punir de tant d'inconscience ! » Il se donna une gifle sur la joue gauche. Une petite gifle, une tapette de rien du tout, juste pour marquer le coup. « Mais Kohta a pallié ma mégarde, et son intervention salutaire vous a sauvés, toi et ton enfant. La déesse a certainement un plan pour ton fils, un plan plus intéressant que celui de finir sous mes roues en tout cas... » Son regard se tourna vers le jeune Lucianus Iustius Minor. « Quel brave et grand garçon que voilà ! Et fort, certainement, déjà tout en muscles ! » S'approchant, il se mit à tâter ses biceps. « Mais oui, ça c'est un costaud, un dur à cuire, voyez ! » Son sourire se figea lorsqu'il remarqua le regard noir que lui jetait l'enfant, et il le lâcha, préférant affronter celui, pourtant pas plus rassurant, de la mère. « Puisque ton fils est béni de Kohta, je lui dois bien une faveur ; c'est la moindre des choses, et je tiens à me faire pardonner. Qu'il me demande ce qu'il veut, et de quoi qu'il puisse s'agir, je l'exaucerai. »
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeDim 28 Juin - 9:27

Quand je disais que Tide n'avait point gâté le personnage, je ne pensais point être si près de la vérité. Voilà que le patricien se lançait dans une drôle de comédie, une parodie d'auto-flagellation censée visiblement désarmer ma colère. Honte à moi, ceci fonctionna. En effet, il était tellement hilarant que je sentis bien malgré moi mes lèvres esquisser un demi-sourire et je retins un très léger rire. Il n'en restait pas moins que cet immonde imbécile avait manqué d'écraser mon fils ! Aussi, je mis les poings sur les hanches, l'écoutant avec stupeur me dire qu'il allait exaucer une faveur de Lucianus. Tonnerre d'Ukko, l'enfant n'avait que cinq ans !

Un cheval.

Je faillis tomber des nues. A son âge ??? Déjà des désirs de guerroyer ?

Lucianus, voyons !

Mais je vis bien, avec son petit air autoritaire, ses yeux bleus fixés dans ceux du citoyen fautif, qu'il était sérieux et ne démordrai pas.

Il a dit : "ce que je veux". J'veux un ch'val.

Tu es sûr que tu ne veux pas commencer par quelque chose d'un peu plus... modeste, Lucianus ? Un poney ?

Par tous les dieux, mon petit garçon sur un cheval ? Ne risquait-il pas de tomber ? Mais visiblement, Lucianus n'en démordrait pas, et quelque part, je savais qu'il serait bon de le laisser cultiver ce trait de caractère. Je lui désirais une carrière brillante dans la Curie, et la détermination serait une qualité dont il aurait grand besoin pour faire face à ses adversaires.
De plus, un cadeau aussi coûteux... Le patricien imbécile allait sûrement regretter longtemps son imprudence...


Tu l'as entendu, dis-je donc finalement d'un ton docte. Et en tant que mère soucieuse de mon fils, je me permets de rajouter qu'il faudra un palefrenier et quelqu'un pour lui enseigner l'équitation, puisqu'il brûle d'envie de l'apprendre.
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeLun 29 Juin - 0:41


« Un... cheval ? », répéta un Merula légèrement pris au dépourvu, clignant frénétiquement des paupières. Il ne peut pas demander des bonbons, comme tous les autres gamins ? C'est que ça coûtait horriblement cher, un cheval. Les Sevinii avaient bien les moyen de se procurer des chevaux robustes à bon prix ; las, le trésor familial était entre les grosses mains flasques de son père, non les siennes, et Lucius Sevinius Galba n'était pas du genre à jeter l'argent par les fenêtres. Tandis qu'il se faisait cette réflexion, Merula sentait peser sur lui le regard autoritaire du mioche. Ce sale gamin pourri gâté lui faisait presque penser... à lui-même ? Non, impossible, je vaux mieux que ça. La mère, elle, affichait un air sarcastique ; nul doute qu'elle savourait le fait de le voir pris dans le piège qu'il s'était lui-même tendu. Il avait donné sa parole, comment pourrait-il se dédire à présent ?

« Les désirs de ton garçon sont des ordres, citoyenne. Il aura son cheval, c'est promis. » Il coula à la matrone un sourire des plus mielleux. « Rustre que je suis, je ne me suis même pas présenté ! Je suis Titus Sevinius Merula. Fils du Censeur Galba, de la gens des Sevinii, mais ces choses ne vous diront rien de qui je suis. Je peux me montrer plus exhaustif : légionnaire émérite, dramaturge, théologien, aventurier, essayiste romantique, architecte amateur, poète, conteur, chirurgien-anatomiste autodidacte et apprenti joueur de flûte. Aurais-je l'honneur de connaître le nom de la femme dont j'ai failli renverser l'enfant ? » Il avait égrené ces derniers mots d'un ton léger, comme si la chose était des plus banales.
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeLun 29 Juin - 17:23

Fallait-il reconnaître que le patricien se montrait bon perdant et gratifiait donc mon cher Lucianus d'un cheval. A ces mots, le petit ne se tint plus de joie.

Un cheval ! J'vais avoir un cheval ! s'écria-t-il en sautillant partout.

Un peu de tenue, maintenant, Lucianus, ordonnai-je d'un ton plus ferme.

L'homme se présentait à présent et j'eus un sursaut. Ainsi, l'homme que j'avais en face de moi n'était autre que le fils du censeur Galba... Une connaissance qu'il valait mieux avoir comme ami plutôt qu'ennemi, si possible. Et vu qu'il venait de faire amende honorable, je décidai que j'étais prête à passer l'éponge.

Je m'intéressai donc à mon interlocuteur. Beau parleur visiblement, et sans doute du genre à courir les jupons. Pas l'idéal comme mari (si l'on espèrait un mariage d'affection), mais s'il héritait de son père... De plus, il ne semblait pas détester les enfants et l'idée d'en tuer un lui faisait visiblement sincèrement horreur. Le genre de qualité que j'avais tendance à rechercher pour une raison bien connue.
Néanmoins, le beau parleur devait fuir les engagements matrimoniaux comme la peste, mais peut-être que quelqu'un, parmi ses connaissances, partageait avec lui suffisament de valeur humaine pour ne pas être prêt à tuer un enfant pour favoriser un de ses propres héritier.

Ravie de te rencontrer, citoyen Merula. Je suis Harmonia Alexandria Iustia, la fille du centurion Honorius Alexandrius Falco et épouse du défunt édile Lucianus Iustius Primus. Lucianus, que fait-on lorsqu'on rencontre un autre citoyen et qu'il se présente ? demandai-je à mon fils.

Mon enfant reprit aussitôt une posture digne. Je lui avais bien inculqué l'importance des bonnes manières.
Salut, citoyen Merula, répéta-t-il avec attention. Je suis Lucianus Iustius Minor. Enchanté de te rencontrer.

C'est bien Lucianus. Si tu veux un cheval comme les adultes, tu dois te comporter comme tel. Là. Tu es le digne fils de ton père, n'oublie pas qu'il te regarde depuis le royaume de Kuo.

Je lui serrai affectueusement l'épaule avant d'engager une conversation polie avec le citoyen.

Je connais ton père de nom, bien entendu, mais n'ai point eu l'occasion de vraiment converser avec lui. Mon mari devait le connaître mieux. Ainsi donc, tu aimes la poésie ? Vas-tu quelques fois au théâtre ?

Tout en parlant, je lui offris un premier vrai sourire, et redressai dignement ma stola rose pâle. Néanmoins, j'effectuais ce geste avec une lenteur qui le rendait d'autant plus gracieux, voire même sensuel. Je sais mieux que quiconque ce qu'une femme peut obtenir lorsqu'elle suscite un rien d'amour chez les hommes influents.
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeMar 30 Juin - 7:23


Une lueur intéressée anima le regard du jeune patricien lorsque la matrone confia être veuve. Oh, pas pour les raisons qui pousseraient certains à convoiter la fortune de la belle ; Merula n'était pas si terre à terre ! Il laissait la cupidité aux hommes dépourvus d'imagination. Distingué et raffiné, le jeune patricien savait que la vraie fortune des femmes ne se cachait pas dans leur coffre, mais sous leur robe. Ah, les veuves ! Elles avaient tout pour elles, à commencer par une certaine expérience de la chose, et un désir exacerbé par des années de frustration, du temps où elles se coltinaient encore leur vieillard impuissant de mari. A l'abri du besoin dans leurs grandes demeures, elles se vouaient cœur et âme à la seule quête qui vaille la peine d'être menée : celle de l'amour. Chaque fois qu'il avait partagé leur couche, Merula s'était senti bercer par l'affection tendre et protectrice d'une mère couvant son enfant, avant que ne l'emporte la force inexpugnable d'une passion dévorante.

Mais la matrone n'était pas n'importe qui. Les noms qu'elle venait de citer ne lui étaient pas tout à fait inconnus. Le centurion Honorius Alexandrius Falco, Merula en avait entendu parler plus d'une fois du temps où il servait dans la Légion. Il l'avait peut-être même croisé une ou deux fois lors d'un roulement de cohortes entre les castra du Limes. Un dur à cuire, à ce qu'on disait. Quant au défunt époux d'Harmonia, celui-ci n'avait rien d'un vieillard ; il était mort relativement jeune, fauché par une banale indigestion alors qu'il menait les prémices d'une carrière politique prometteuse, laissant sa veuve élever seule leur enfant. Que j'ai failli écraser, se rappela Merula. Comme le jeune Lucianus Minor continuait de le toiser, de cet air énervant qu'ont les mômes qui veulent commander aux adultes, Merula ne lâchait pas Harmonia des yeux.

« Et comment, que j'aime la poésie et le théâtre ! J'y consacre une grande partie de mon temps, Harmonia. Oserais-je te livrer quelque impromptu de ma composition ? Hélas, je suis un homme pudique. Mon œuvre, pour l'heure, est semblable à une jeune vierge ; un diamant brut qui cherche à sublimer sa beauté, n'osant encore se dévoiler tant qu'elle n'aura pas acquis la certitude de sa magnificence... mais un jour viendra où elle se dévoilera enfin toute nue, et fera chavirer le cœur de celui qui la contemplera pour la première fois. »

Un voile de tristesse passa sur son visage alors qu'il achevait ces paroles, et sur un ton devenu morne, il ajouta :

« Ma poésie n'intéresse guère mon paternel, hélas. Il voudrait que je fasse de la politique, à l'instar de mon regretté frère... et moi, je voudrais que mes mots enchantent le monde, non qu'ils répandent le poison du mensonge et des promesses non tenues. » Il haussa les épaules. « Je ne devrais pas t'ennuyer avec ces choses. Nous devrions aller au théâtre ensemble, un de ces jours. »
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeMar 30 Juin - 11:10

Ma foi, pourquoi pas, en effet. Nous pourrions sûrement devenir bons amis...

Je n'avais pas tergiversé sur ma réponse, car fallait-il reconnaître que Merula était un homme plaisant et charmant. Cependant, il était facile de lui voir quelques petits défauts qui le confirmaient comme étant hélas, guère un parti souhaitable pour un mariage. Il était rêveur et visiblement beaucoup trop insouciant, et sûrement irresponsable. Autant, d'un mari volage saurais-je m'accomoder tant que je pûs moi aussi voir ailleurs ; sur l'oreiller de certains se gagnaient batailles, voire même femme avisée pouvait-elle détenir le monde entre ses cuisses.
Autant, ne pouvais-je certainement pas confier les biens et la fortune qui reviendraient à Lucianus à quelqu'un qui le dilapiderait vite à quelques fantaisies. De même, sans doute ne devrais-je plus m'aviser de fréquenter ce séducteur une fois remariée, car nul doute que ma réputation en deviendrait aussi bonne que celle de mon vautour de beau-frère, d'une certaine façon. Cela n'était guère souhaitable.

J'ajoutai, désireuse de lui être agréable :

Tu ne m'ennuie point, voyons ! J'ai beau être veuve d'un édile qui fut brillant et aimer entendre les hommes parler politique, je suis tout autant réceptive aux discussions touchant à l'art et à la culture et sais l'importance de quelques distractions. Gérer mon domaine et les biens de mon défunt époux laisse rares les moments de loisir et les fait apprécier d'autant plus.

J'esquissai un nouveau sourire, mes yeux gris de mer plongeant dans les siens :

Alors ne te prive point de me divertir par ta conversation, citoyen Merula.
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeMar 30 Juin - 21:55


Merula sourit de toutes ses dents, savourant la douce ironie qu'il y avait à se faire l'ami d'une femme dont il avait failli tuer la progéniture cinq minutes plus tôt. Il avait toujours su se faire aimer des autres, en dépit ou à cause de ses frasques ; il aimait croire qu'il faisait rêver les gens, y compris ceux qui se gaussaient de lui en le prenant pour un dépravé excentrique ; il les faisait rêver, car tout ce qu'il faisait leur était moralement interdit, alors même qu'ils en brûlaient d'envie. La matrone ne faisait pas exception à la règle. Merula ressentait en elle une force contenue, comme une flamme captive qui n'attendait que de bondir hors de sa prison de verre pour embraser le monde. Tiraillée entre son rôle de mère et ses menues autres responsabilités, Harmonia ne pouvait pleinement jouir du bonheur de s'être émancipée des contraintes que lui avaient de tout temps imposées les hommes. Finalement, peut-être lui aurait-il rendu service en écrasant son rejeton comme une crêpe ; elle eut été pleinement libre alors, libre de se consacrer à l'assouvissement de ses désirs sans se soucier de rien, libre de dilapider sa fortune pour son seul plaisir, libre de se gorger de phallus du soir au matin sans rendre de compte à personne. Les hommes auraient beau la villipender, ils se laisseraient guider jusqu'à son lit pour peu qu'elle les y invite, ne laissant la dénigrer que ceux qu'elle aurait éconduits. Les femmes répandraient à son encontre des cancans pire encore, mais leur médisance ne serait que le reflet de leur jalousie. Peut-être pouvait-il l'aider à se révéler à elle-même, à prendre son envol tel un papillon quittant son cocon.

« Ma foi, je me réjouis de t'avoir rencontrée, Harmonia Alexandria Iustia. J'en viens à croire que les fâcheuses circonstances qui nous ont réuni n'étaient qu'un clin d'œil de Kohta. J'ai le sentiment que nous pouvons partager bien des choses ensemble. » Il se tut quelques instants, les pupilles brillant de malice, avant d'ajouter : « Il m'arrive de fréquenter un petit théâtre que notre bonne société patricienne gagnerait à connaître. Le grand théâtre des élites est devenu si attendu, si conformiste... l'art a besoin de se réinventer, et pour cela, il doit parfois se montrer incorrect, irrévérencieux, voire vulgaire. Laisse-moi te mener voir une représentation de mon choix et je puis t'assurer qu'après ça, tu ne seras plus la même. »
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeJeu 2 Juil - 10:32

Je plissai légèrement les yeux lorsque Titus Sevinius Merula évoqua un théâtre d'un genre étrange, innovant selon lui. Il évoqua même que cet art n'était point dépourvu d'une certaine vulgarité.

"Allons donc, Citoyen Merula, tu dois plaisanter ! Je suis une veuve à remarier, ne risques-tu pas de compromettre ma réputation en m'emmenant à un tel endroit ? Je me dois d'assurer l'avenir de mon fils, alors ne me fais point fuir les bons partis qui pourraient se présenter !"

Mon ton était cependant empreint d'une certaine espièglerie malgré le sérieux de la question. Le tout était surtout de savoir si une telle excentricité serait considérée comme inoffensive si elle s'apprenait, ou si je risquais de passer pour une "veuve joyeuse". Ces hypocrites de patriciens et leurs femmes avaient tous leurs vices. Certains, par exemple, avait le répugnant usage de pimenter leur vie de couple en utilisant leurs esclaves, d'autres fréquentaient volontiers les bordels au lieu d'être des maris fidèles, quant aux femmes, certaines avaient bien des amants en toute discrétion, mais si l'un d'eux s'y faisait prendre, c'était l'occasion de faire des gorges chaudes et de tourner la personne en ridicule en étalant ses frasques. J'avais déjà arrêté pour ma part de ne surtout point laisser entrer homme dans ma demeure à la nuit tombée. Mes esclaves avaient beau être discrets, l'on pouvait épier, à Bassium et accueillir amant dans la domus garantissait d'avoir un secret aussi étanche que votre impluvium. Le nom de mon époux devait rester respectable si je souhaitais travailler à l'avenir de mon fils et Merula allait devoir le comprendre rapidement.
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeSam 4 Juil - 8:48


« Allons, allons », tempéra Merula avec un rictus aux lèvres, « la lionne se soucie-t-elle des commérages des moutons ? J'ai toujours pensé que la pudibonderie appartenait aux hommes sans envergure. Et ces derniers ont bien souvent les épouses qu'ils méritent. »

La réaction hésitante d'Harmonia l'amusait. Craignant de se laisser entraîner dans quelque honteuse incartade par l'excentrique Merula, elle avait brandi sa réputation comme un cache-sexe. Elle jouait la prudence. Une attitude des plus avisées, quand on savait avec quelle énergie les matrones des beaux quartiers de Bassium s'échinaient à détruire le prestige de leurs rivales. On faisait grand cas des rivalités politiques qui animaient la Curie, mais la guerre des femmes était tout aussi impitoyable. Merula la trouvait aussi plus intéressante, mais il était toujours plus attentif en présence de paires de seins.

Plus troublante était la raison qui motivait la prudence d'Harmonia. La veuve voulait se remarier ; c'était dit sans détour, elle cherchait activement un candidat. De prime abord, Merula ne voyait pas ce qui pouvait bien motiver une femme à s'enchaîner une seconde fois à un homme. Et puis son regard descendit une nouvelle fois sur le visage du môme. C'est donc ça. Elle était prête à se laisser asservir de nouveau, pourvu que cela favorise l'avenir de son fils ; un tel sacrifice maternel forçait l'admiration. Il avait presque envie d'attraper les épaules du jeune Iustius et de le secouer comme un prunier, en lui répétant à l'envi qu'il avait bien de la chance d'avoir une mère comme elle et qu'il avait intérêt à l'aimer et la chérir, faute de quoi il aurait affaire à lui. Cependant, quelque chose lui disait que cette initiative serait peu appréciée par la concernée.

« Mais soit ! Je comprends ta réticence. En ce cas, je vais plutôt accepter ton invitation à dîner. »
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeDim 5 Juil - 10:45

Titus Sevinius me titillait allégrement sur mon souci des convenances et du regard des autres. Cependant, il comprenait visiblement mes raisons et n'insista pas. Je ne pus m'empêcher d'éclater franchement de rire lorsqu'il s'invita à dîner spontanément dans ma Domus. Certes, j'avais moi aussi envie de prolonger le contact avec lui. En plus d'être le fils du censeur de la cité, ce qui signifiait une relation plus qu'intéressante, il était d'excellente compagnie et divertissant. Aussi, après avoir marqué une légère hésitation, je hélais Aerona :

Tu te sens de porter encore quelques charges, Aerona ?
lui demandai-je avec bienveillance et fermeté à la fois. Au pire, n'hésite pas à aller à la domus pour requérir de l'aide. Tu vas aller voir le volailler et prendre deux beaux faisans pour ce soir. Et une jarre de fruits secs ainsi que quelques verdures selon ce que le légumier aura.
J'y vais de ce pas, Domina, répondit-elle aussitôt avec une petite révérence.

Alors qu'elle avait incliné sa tête, nous avions échangé un petit sourire de connivence. Rien n'échappait à ma petite esclave rusée et elle venait elle-même de comprendre quel attrait pouvait avoir Titus en dépit de sa réputation controversée. Je me tournai d'ailleurs vers lui :

Considère que cela sera avec plaisir, nous n'avions rien de prévu pour la soirée. Mon esclave Marcurus sait préparer à merveille le faisan aux raisins marinés. Mon mari a payé une fortune pour ce petit homme, et nous ne le regrettons guère, il est capable de faire des merveilles avec trois fois rien et deux aides de cuisine.

J'ajoutais, fort aimable :

A défaut d'aller au théâtre, peut-être auras-tu l'occasion de me présenter une oeuvre de ta propre composition... Ou peut-être même nous présenterais un de tes amis écrivains ou poétes ? Ma famille soutient volontiers les auteurs talentueux. Allions donc les plaisirs de la table à ceux de la littérature pour ce soir... Mais attention ; vous quitterez la maison à heure décente.

Je le gratifiais d'une petite oeillade, afin qu'il ne s'offusqua point trop du sous-entendu. Il devait comprendre qu'il pouvait avoir mon amitié, mais qu'il ne serait point prudent de quémander plus. J'étais d'une part fidèle à la mémoire de Lucianus mon époux et n'accepterait point le premier venu dans mon lit. D'autre part, si je finissais par utiliser mon corps pour arriver à mes fins et je n'ignorais point que je devrais probablement recourir à ce moyen dans le futur, il était hors de question que mon coeur appartînt de nouveau à un autre. J'avais trop souffert de la mort de Lucianus Primus. De plus, l'amour est chose rare, qui, je pense, n'arrive qu'une seule fois dans une vie, surtout dans notre société. Le pouvoir, l'argent et le prestige corrompent de trop. Le seul amour sincère que je pourrais désormais éprouver était celui qui me liait à mon fils, ou encore, l'affection que je veillais à dissimuler en public pour ma chère esclave Aerona, devenue, malgré notre différence de statut, ma plus proche confidente.
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeDim 5 Juil - 18:57


Ce soir, je baise, résolut Merula, ignorant totalement la discrète mise en garde d'Harmonia quant au caractère décent de ce dîner. Son père avait peut-être raison, finalement ; il était doué pour se mettre les gens dans la poche, et cela pouvait lui promettre un brillant destin politique. Un jour, certainement, il deviendrait Tribun consulaire. Ou empereur. Ceci dit, il n'était toujours pas certain d'en avoir envie ; leurs journées étaient un peu trop longues à son goût.

« Condylome ? » appela-t-il, « où es-tu passé ?
- Je rattachais la chèvre »
, répondit l'esclave qui s'affairait dans la charrette. « Le freinage était un peu brutal et j'ai bien peur que dans la manœuvre, elle se soit oubliée.
- Hum, oui, bref. Annule tous mes rendez-vous pour ce soir, je te prie. Je dîne chez les Iustii.
- Tes rendez quoi ?
- Mes rendez-vous. Annule-les tous ; la noble patricienne passe avant eux.
- Bah, c'est que t'as rien de prévu du tout ce soir, Dominus »
, répondit l'esclave l'air un peu ahuri, tout en se grattant le pif. Avant de comprendre, en voyant Harmonia, où son maître voulait en venir : « ah, oui, pardon, tes rendez-vous ! Oui, oui, pas de problème, j'annule tout. L'entretien chez le Tribun attendra. Je reporte aussi la petite cérémonie au temple d'Ukko par rapport à ta prochaine divinisation.
- Ça ira, Condylome, merci. N'en fais pas trop quand même. »


Délaissant l'esclave, Merula reporta toute son attention sur Harmonia.

« Il est si difficile de se procurer du personnel compétent, de nos jours. Mais je m'égare ! C'est entendu, ce soir nous rendrons ensemble un vibrant hommage à la littérature. Je connais les plus fines plumes d'Edelmia ; je suis certain qu'ils rivaliseront de créativité pour déclamer quelques vers en hommage à ta beauté. J'ai grand hâte ! » Se saisissant délicatement du poignet de la patricienne, il déposa sur celui-ci un doux baiser. « À présent, je vais te laisser, Harmonia. Nous nous reverrons chez toi, pour une soirée que nous ne sommes pas prêts d'oublier. » Il ponctua ces mots en ébouriffant les cheveux du jeune Lucianus. « Toi aussi, jeune maître ! Ne t'inquiètes pas, je n'oublie pas ton cheval. Avé ! »

S'en retournant dans sa charrette, Merula repartit en trombe, l'élan des chevaux s'accompagnant des bêlements de la chèvre.



*


Le soir venu, c'est un Titus Sevinius Merula fort apprêté qui se présenta devant la demeure d'Harmonia. Lavé et parfumé, il avait revêtu pour l'occasion une invraisemblable tunique d'un jaune criard, doublée de poils d'otarie d'un blanc immaculé, surchargée de franfreluches en plumes d'oies teintes en bleu de Valta. L'ensemble lui donnait l'air de briller sous le soleil couchant, comme une lampe ambulante.

Tandis qu'il descendait du carrosse, un homme d'une quarantaine d'années au visage avenant lui emboîtait le pas. Son visage n'était pas inconnu à Edelmia : il s'appelait Claudius Volcatius. Poète plebéien, alliant le charisme du verbe à un physique avantageux, Volcatius avait eu son temps de gloire jusque dans les cercles les plus élevés de la bonne société edelmienne. Il s'était fait rare depuis quelques années, après qu'une histoire de cœur l'ait opposé à la rivalité d'un puissant patricien. Une sombre histoire dont on n'avait jamais vraiment su comment elle s'était terminée - mais l'intéressé, lui, devait savoir. Bien plus sobrement vêtu que Merula, Volcatius arborait une tunique des plus simples, mais même la proximité du patricien bariolé ne semblait guère lui faire de l'ombre. Merula commençait déjà à se demander s'il n'aurait pas mieux fait de venir avec quelqu'un de moche. Il serait bien avisé de ne pas me piquer les faveurs de la dame, songea-t-il comme tous deux allaient se faire annoncer.
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeLun 6 Juil - 9:50

Le jeune homme accepta l'invitation avec enthousiasme. Bien, ce soir, avec un peu de chances, allais-je me mettre un fils de censeur dans la poche. Cela ne serait point de trop pour faire face aux malversations de ce très cher Murena, qui rôdait tellement sur la fortune de feu mon époux. Il me salua d'un très galant baise-main avant de remonter dans son char et de repartir à la hâte. Cela me fit esquisser un sourire amusé.

De mon côté, je décidai également d'inviter l'écrivain Aulus Cassius Florus, que je connaissais bien, car ce patricien faisait également partie de l'entourage d'Attia Sillia. Son épopée d'Aerus avait eu un tel succès, voilà déjà dix ans, que l'on l'avait même adaptée en pièce de théâtre. Il menait à présent paisible petite retraite à Edelmia, mais nous savions que sa vie à la capitale dans sa jeunesse avait été très mouvementée par les complots et intrigues. Il s'était fait quelques ennemis, à publier des textes pamphlétaires contre certains adversaires de l'imperator et il avait bien de la chance d'avoir vécu à un âge aussi avancé.
Nous serions ainsi sûrement entre quatre et six personnes à cette petite cena. Je décidai d'autoriser Lucianus à assister au début du dîner, bien qu'un enfant dût se coucher tôt. Le petit étudiait bien entendu les lettres auprès de son praeceptor et il se devait de bien connaître nos textes classiques.
C'est ainsi que ce soir-là, après avoir vêtu une jolie tunique bleue ornée d'une stola et de voilages tirant sur le vert, je descendis dans l'atrium. La couleur que j'avais choisi rehaussait mes yeux, une petite parure de pierres fines bleutées assortie couvrait ma gorge et brillait à mes oreilles. Je souris en entendant, de là où je me trouvais, Marcurus, mon esclave plus ou moins à la fois chef de cuisine et intendant de la domus, aboyer des ordres à propos d'assaisonner la salade et préparer encore quelques mises en bouche. Le pauvre. Les invités surprise ou les organisations de dîners à la dernière minute le bousculaient toujours.

"Des gens viennent dîner ce soir ?" avait-il demandé, les yeux ronds, alors qu'Aerona lui donnait les faisans fraîchement étranglés.

Sans attendre ma réponse, il était reparti en trombes dans la cuisine.

"Bien, bien, vous avez entendu ? Domina reçoit ce soir ! Allez voir dans la réserve ce que vous pouvez trouver de convenable à servir aux invités. J'avais fait du meli-mela hier, il faudra en mettre sur la table, ils apprécient toujours. Quoi, comment ça, il n'y a plus de vin de paille, Antonius ? Eh bien, tu vas filer au marché m'en chercher ! Qu'est-ce que tu attends, par Kuo ! Tu veux mon pied au derrière ? Aerona, aide-moi à plumer ces poulailles ! Tonnerre d'Ukko, il y en a pour un moment à le faire ! Cadoc, mets à macérer tout de suite les raisins avec le defritum ! Et deux tours de poivre ! Pas trois, hein, deux !"

Mes esclaves avaient été en effervescence tout l'après-midi et je m'étais retenue à grande peine de dire en riant à Marcurus que les invités ne s'aperçevraient sûrement point de l'absence de vin de paille dans l'assaisonnement de sa marinade. Je savais qu'il l'eût pris comme une insulte et que l'on aurait point manqué de l'entendre bougonner tout l'après-midi. Mon esclave considérait la cuisine comme une forme d'art et était aussi exigeant avec lui-même que ne l'étaient les poètes pour écrire leurs vers.

Finalement, les faisans rôtis venaient d'être amenés sur la table de banquet et l'on devait aussi se délecter d'une salade au fromage frais et au defritum, de poireaux à la mauve et à la coriandre, ainsi que de cardons au miel. Des gâteaux parfumés de miel de romarin et hérissés de délicates amandes, du meli-mela doux et coloré, ainsi qu'un petit assortiment de confitures et de pain miellé. Ces différents plats embaumaient déjà la maison et Florus eut un sourire appréciateur en entrant. Ce bonhomme qui avait déjà presque la cinquantaine appréciait les bons mets et il eut une expression très joviale d'emblée.

" - C'est un plaisir de te voir, chère Harmonia ! Et je sens que ton Marcurus a encore fait des merveilles ! Dis-moi, à quoi dois-je cette invitation surprise ? As-tu convié les Sillii ?
- Malheureusement, ils étaient occupés aujourd'hui, répondis-je. Mais tu ne t'ennuiras point pour autant. Titus Sevinius Merula nous fait l'honneur de sa compagnie et il amènera avec lui quelque poète reconnu de la cité.
- Titus Sevinius Merula ? répondit Florus en plissant les yeux. Ma foi, je ne veux point me mêler de ce qui ne me regarde pas, mais es-tu au courant, chère Harmonia, que recevoir tel individu en ta demeure risque de t'exposer à forts commérages ? Ce citoyen ne se tient plus, dès qu'il est en présence de la moindre jolie paire de jambes ! Ta beauté te vaut déjà d'être cible de rumeurs, et il suffirait d'un rien pour que les autres patriciennes vînssent te prêter maintes liaisons et t'accuser de débauche.
- C'est bien pour cela que je veille à ne point me trouver en sa seule compagnie, cher Florus. Ce banquet sera respectable et sans trop d'excès. De plus, si Merula est un coureur, il est aussi grand amateur de poésie et de littérature. Je gage qu'il appréciera de te faire la conversation.
- A mon humble avis, c'est à toi surtout, qu'il aimerait faire conversation, répliqua l'écrivain avec un sourire malicieux. Mais je comprends bien ton intérêt à te ménager l'amitié du fils du censeur, tout excentrique et imprévisible soit-il. Comment va ton cher beau-frère ?
- Il se porte à merveille, trop bien même pour mon propre bien, répliquai-je, les dents serrées.

Notre inimitié n'était un secret pour personne à Bassium. Je savais que certains s'amusaient même à parier sur le temps qu'allait mettre Murena avant de réussir à me contraindre à sa tutelle.

- Si cela peut te consoler, j'ai entendu dire qu'il s'était fait très mal voir du tribun, à la soirée d'accueil du procurator, tout occupé qu'il était à essayer d'attirer l'attention de ce dernier. Je l'ai vu moi-même se pavaner devant eux comme un paon à ci-près que malheureusement, il n'en a point la grâce.

Je ne pus m'empêcher de pouffer de rire :

- Oh, Florus, tu me fais presque regretter d'avoir raté ça ! Mais viens vite dans l'oecus au lieu de rester là à bavarder ! Lucianus Minor s'y trouve déjà. Et si je ne me trompe, Merula devrait arriver d'une seconde à l'autre..."

L'instant suivant, en effet, Arcus ouvrait de nouveau la porte pour laisser entrer Merula et je faillis éclater de rire en voyant comment ce dernier était accoutré. C'était... très coloré, comme tenue, le moins que l'on pouvait en dire. Florus avait parlé de paon à propos de mon beau-frère, mais j'en avais un autre juste en face de moi.

"Sois le bienvenu, cher Merula. Et à qui ai-je l'honneur, citoyen ?"
demandai-je à l'adresse de son compagnon, un homme d'une quarantaine d'années plutôt bien fait de sa personne.


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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeMer 8 Juil - 17:46


« Je suis Claudius Volcatius », se présenta le poète en se fendant d'un salut des plus sobres. Nul besoin pour lui de se prosterner ni d'en faire des tonnes : tout plebéien qu'il était, Volcatius avait l'habitude de fréquenter les cercles patriciens. Il avait surtout l'habitude d'être pris de haut par ces gens, et en avait retenu une bonne leçon : puisque les autres se chargeraient toujours de le rabaisser à sa condition, il n'allait pas le faire à leur place en jouant les flagorneurs complaisants. Aussi le regard dont il gratifiait Harmonia était empreint de respect, non de soumission.

De son côté, Merula s'inclinait si bas que son nez en touchait presque le sol. « A contempler ta beauté, je jurerais que Rakka vient de me décocher une flèche en plein cœur », badina le jeune patricien en se relevant. « Ah, Harmonia, comme je suis aise de te voir ! » Elle arborait une tenue des plus seyantes, sachant mettre en valeur ses atouts avec le minimum de pudeur nécessaire. La manière dont cet adorable corps tout en rondeurs se mouvait sous cette prison de tissu ! À cette vision enchanteresse s'ajoutait le parfum délicat qu'exhalait la maîtresse de céans, évoquant la grâce vulnérable d'une fleur qui ne demandait qu'à être cueillie.

Lorsqu'il put s'extirper de la douce attraction de cette image, Merula balaya rapidement du regard le vestibule et il fut ravi de ne pas voir son sale gosse traîner dans les parages. Il s'arrêta néanmoins sur un visage qu'il mit du temps à remettre : Aulus Cassius Florus, un écrivain bien connu en ville, mais que Merula trouvait quelque peu pompeux. Comment ce sot avait-il pu trouver grâce aux yeux d'une femme aussi raffinée qu'Harmonia ? Enfin... elle était, après tout, reine en sa demeure et invitait bien qui elle voulait. Il devinait toutefois, au regard discret que lui jetait Florus, que ce dernier ne l'estimait guère davantage. Peut-être se défiait-il du séducteur invétéré qui, sans nul doute, allait chercher à lui ravir une femme qu'il devait certainement convoiter lui aussi. Les hommes déclenchaient des guerres pour moins que ça. Pourtant, la chose n'était pas nécessaire : Merula était toujours prêt à partager.

« J'ai fait le nécessaire pour que ton fils ait ce qu'il m'a demandé, que dis-je, exigé ! » reprit Merula avec entrain. Avant de se sentir obligé d'expliquer aux autres convives : « longue histoire, mais pour la faire courte, j'ai failli écraser le petit Lucianus ce matin, alors bon, je lui achète un cheval, c'est de bonne guerre. Il devrait l'avoir d'ici quelques jours. » La chose était dite avec autant de désinvolture que s'il racontait ce qu'il avait mangé à la mi-journée, comme s'il n'était pas du tout question d'un enfant ayant frôlé la mort. Toujours souriant, Merula enchaînait déjà :  « Allons, ne restons donc pas plantés là comme des radis ! Si tu nous montrais l'intérieur de ta domus, Harmonia ? Je brûle d'envie d'en découvrir chaque pièce avec toi, je veux absolument - tout - voir. »
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeLun 13 Juil - 16:28

Titus me salua avec un compliment que je ne pus m'empêcher de trouver passablement exagéré. Néanmoins fallait-il convenir que ce côté beau parleur s'accordait avec la personnalité exubérante du jeune homme. Aussi esquissai-je un sourire amusé avant de saluer avec courtoisie l'invité qui venait de décliner son identité.

"Claudius Volcatius ! Charmée de te rencontrer. Un comédien a déclamé ton Printemps d'Aïka au théâtre il y a une quinzaine de jours. Ce serait un honneur de l'entendre de nouveau de ta propre bouche... après le repas sans doute !
- Ca alors, dit Florus de son ton affable. Alors ainsi, nous avons l'honneur de dîner en la compagnie de Claudius Volcatius ce soir ? J'ai adoré tes petits sonnets. J'en ai d'ailleurs une copie dans ma bibliothèque personnelle."

Il salua également Merula d'un ton poli, mais en prenant un air un peu moins affable. Visiblement, l'idée que Merula pût faire quelques frasques en ma demeure l'inquiétait et je ne pouvais que lui en être reconnaissante. Florus était l'un des très rares patriciens à me porter une réelle estime, dûe au fait qu'il avait longtemps été lié à mon époux Lucianus.

"Eh bien ma foi, dis-je à Merula en réponse à sa petite provocation grivoise, je serais ravie de vous montrer quelques statuettes orientales qui ornent l'une des dépendances de l'oecus. Mais avant cela, profitez donc de ce banquet si habilement préparé par notre cher Marcurus, vous m'en direz des nouvelles ! Lucianus, viens dire bonjour aux invités !"

Mon petit garçon, qui était assis au bord de l'un des lits de banquet, se leva aussitôt :

"Ave, citoyen Merula. Ave, Florus. Ave...

- C'est l'écrivain Claudius Volcatius, mon enfant, dis-je avec fierté.
- Ave citoyen Volcatius. Je suis Lucianus Minor. Sois le bienvenu.

Je souris à cette dernière phrase. Décidément, mon enfant maîtrisait de mieux en mieux les usages de base. Ce que ne manqua pas de relever Florus.

- Ma foi, Harmonia, ce petit homme grandit de plus en plus vite ! Et il parle déjà bien pour son âge ! Je vois que tu l'éduques bien !
- Certes. Je l'ai autorisé à passer le début de la soirée avec nous, néanmoins, il se retirera tôt, n'est-ce pas, Lucianus ? Et on ne pile pas les petits gâteaux avant le repas !
- Il a essayé, fit mon esclave Aerona avec un petit sourire malicieux.

Je ne pus m'empêcher de rire, tandis que Lucianus Minor affichait un air penaud, ses petites joues rebondies esquissant d'adorables fossettes. Je me baissais pour lui ébourriffer les cheveux en le réprimandant gentiment, laissant mes invités se répartir sur les lits de banquet comme ils jugeaient bon.

- On attend que tout le monde soit bien assis pour manger, quand on est un citoyen bien élevé. Ce sont les vilains petits garçons qui picorent avant l'heure. Tu veux être un vilain petit garçon ou un bon citoyen ?
- Je veux être un bon citoyen, couina le petit garçonnet en hochant la tête.
- Dans ce cas, va t'asseoir correctement.

Durant ce petit échange, j'avais brièvement laissé de côté la digne Matrone pour redevenir, l'espace d'un instant, la mère aimante et espiègle. Mes grands yeux gris observaient mon enfant comme s'il s'agissait d'un trésor merveilleux, mon rire était doux et sincère. Pendant un bref instant, je fus la Harmonia dont Lucianus Primus était tombé si éperduement amoureux, femme douce et aimante. Je m'étendis à mon tour sur un lit voisin de celui de Merula, lui décochant un petit sourire de bienvenue. Puis j'ordonnais à Aerona de faire servir une coupe de vin pour porter le toast d'ouverture.

- A la littérature, chers amis !"
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeMar 14 Juil - 15:11


Remarquant le touchant regard que portait Harmonia à sa progéniture, Merula trouva un étrange plaisir à épier, en toute discrétion, ce moment fugace de complicité maternelle. Les yeux de la matrone débordaient d'amour pour son sale mioche, et durant un bref laps de temps, Merula éprouva l'envie d'être la cible de cette attention. Ah, se blottir dans ses bras protecteurs et enfouir sa tête contre sa bienveillante poitrine nourricière ! Harmonia reporta bientôt toute son attention à ses invités, mais tandis qu'elle s'allongeait sur le lit voisin avec une grâce féline, Merula la considérait toujours de ses yeux rêveurs.

« A la littérature », trinqua-t-il en la fixant d'un regard profond. « Loué soit l'amour des Ruviens pour les bons mots et les belles choses. Et à ton fils, ce bon garçon dont la gloire, je n'en doute pas, saura au moins égaler celle de son père. »

Il allait ajouter que le petit Lucianus n'aurait pas de mal à faire mieux que son papa s'il avait la chance de ne pas mourir aussi jeune que lui, mais c'eût peut-être été un peu indélicat. Et comme il demeurait suspendu entre deux phrases, il fut rapidement coupé par Volcatius :

« Avec ta permission, Harmonia, j'aimerais déclamer l'une de mes dernières compositions. Cela s'intitule "l'Etoile Mourante d'Aïka par une nuit de deuil sans lune au soir du trépas de ma bien-aimée". Bon, le titre est encore provisoire, mais c'est un hommage à la souffrance et au désespoir engendrés par le bonheur de l'amour. »

Il s'éclaircit la gorge et se leva, debout au milieu du salon, avant de réciter d'une voix chaude et claire, sans hésitation, la diction parfaite :

« La nuit vient nous ravir en ses puissants arcanes ;
L’ombre avec des frissons envahit les platanes ;
De légères vapeurs montent des chemins creux.
Les vieillards sont assis, et les voix alternées
Sous le feuillage obscur se perdent égrenées.
C’est l’heure où l’esprit rêve, heureux ou malheureux.

Le crépuscule expire et les étoiles blanches
Commencent en tremblant à poindre dans les branches.
Au regard exalté qui songe et les poursuit,

Voici que la plus belle allume la première
À l’occident pâli sa vibrante lumière,
Aïka splendide et chaste, honneur de notre nuit. »


Comme Volcatius se rasseyait, Merula se pencha vers lui, le regard chagriné, et murmura : « ce n'est pas équitable ce que tu fais, là, de quoi j'ai l'air maintenant ?
- C'est toi qui m'a invité, je te rappelle.
- Oui, je t'ai fait venir pour montrer que j'avais de la culture et des relations, pas pour tirer toute la couverture à toi. Tu m'obliges à faire mieux que toi maintenant.
- Je serais curieux de voir ça. »


Sourd au sarcasme de Volcatius, Merula s'éclaircit la gorge à son tour, avant de se lever. Volcatius leva les yeux au ciel, s'attendant visiblement à un désastre, mais le jeune patricien était bien décidé à ne pas se laisser damer le pion.

« Harmonia, notre rencontre m'a inspiré un impromptu que je brûle de te faire entendre. Le texte est encore brut de décoffrage, mais j'ai le sentiment que c'est précisément ce qui le rend authentique. Hum ! »

Il balaya du regard l'assistance, avant de se jeter à l'eau :

« Ô Harmonia,
Perle rose aux senteurs de camélias,
Tel un fouet ta beauté me vrille l'âme
Quand sur le fleuve de l'amour en solitaire je rame.

Qui eut prédit que par une belle matinée,
Quand l'air encore frais suintait la rosée,
Chevauchant dans les ruelles tel un deraté
Ton fils je manquât d'écraser ?

Loin de me maudire tu m'ouvris tes portes, tes bras et ton cœur,
Ému par ta miséricorde, moi qui manquât te causer malheur,
Et si la vie de ton enfant je t'avais ôtée,
Crois bien que mon cœur noble se fut fait devoir de la remplacer. »


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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeMer 15 Juil - 15:54

Titus Merula était décidément le roi des flagorneurs. A peine le renommé Volcatius eût-il déclamé sa dernière oeuvre, d'ailleurs très intéressante, que le patricien nous présentait un sonnet improvisé. Par Aïka, les hommes sont décidément tous les mêmes. Avait-il réellement cru m'impressionner et m'émouvoir avec cette parodie de poème amoureux ? Cela dit, il avait fait preuve de plus d'esprit durant l'après-midi, aussi réalisai-je qu'il essayait sûrement de me faire rire. Et cela ne rata pas. A peine eut-il terminé le sonnet que je partis d'un rire aussi cristallin qu'appréciateur.

"Décidément, tu es une personne réjouissante, Merula. Je devrais t'inviter plus souvent ! Aerona, découpe le faisan !"

Et les volailles furent découpées de façon à ce que chaque convive pût se servir comme il lui plaisait. Pendant ce temps, je m'employais à mettre à l'aise mes autres invités :

"Ma foi, cette dernière création est très inspirée, Volcatius, et je gage qu'elle cloturera magnifiquement ton printemps d'Aïka. Dis-moi, travailles-tu sur d'autres recueils, ou sur une épopée ?"

Malheureusement, avant qu'il ne pût me répondre, un incident se produisit alors, manquant bien de me faire perdre la face devant mes invités. Antonius arriva dans la pièce, l'air quelque peu perturbé :

"Domina ? Pardonne-moi de troubler ton banquet mais... Ton beau-frère Cassius Primus Murena est à la porte et... il n'a point l'air commode !"

Par Soltar, mais que voulait donc ce maudit vautour à pareille heure ? Néanmoins, je n'avais plus qu'à tenter d'agir avec toute la bienveillance possible, en l'invitant à prendre part au dîner, par exemple. Je me levai donc et sortis de l'oecus en enjoignant à mes invités de poursuivre la conversation sans moi.
Ce fut ainsi qu'en voyant l'avocat dans l'atrium, je m'avançai vers lui en souriant.

"Tiens donc, Primus... Que me vaut l'honneur de cette visite ? Veux-tu venir à l'oecum ? Nous nous apprêtions à dîner avec quelques amis dont tu sauras sûrement apprécier la compagnie...
- Je n'ai point le temps pour ce genre d'affaire, répliqua Murena en me toisant d'un oeil noir. (Il jeta un oeil par-dessus mon épaule) Tiens donc, tu fréquentes les poètes, maintenant ? Attends voir... Mais c'est le fils du censeur que tu reçois ! Je gage que sa réputation ne t'est point méconnue, n'est-ce pas, chère belle-soeur ? Dois-je... en conclure que ton entrecuisse te démange ?

LE FUMIER ! Mes yeux prirent immédiatement la couleur gris tempête anonciatrice de l'une de ces colères contenues que mes pires détracteurs avaient appris à redouter. Pâle, me retenant de peu de le gifler sous l'insulte, je répliquai :

- Jamais je ne ferai quoi que ce soit qui déshonorerait la mémoire de Lucianus, Murena, et tu le sais très bien. J'aimais mon époux, et je sais bien que c'est ce qui te heurte le plus, toi qui ne sais point obtenir la même chose de Cornélia ! Tu n'es point mon pater familias et je n'ai point de compte à te rendre alors tu ferais bien de partir.
- De quelle affaire traites-tu avec Barbatus ? répliqua-t-il. Tu ne sais donc point que les Tulii sont sûrement impliqués dans...
- Barbatus apprécie notre vin et il est bon client, répondis-je. Grâce à lui, notre commerce vinicole pourrait connaître bonne prospérité. Ne cherche point à ternir ma réputation dans l'espoir de pouvoir enfin avoir ce que tu convoites de cette demeure.
- Ou Barbatus pourrait tout aussi bien te plumer, rétorqua l'avocat d'un ton rogue. Je te préviens Harmonia. Que je trouve la moindre irrégularité dans tes affaires, et je te garantis que je saurai convaincre le préteur de te mettre sous ma tutelle !
- C'est ça, c'est ça, toujours les mêmes menaces et toujours aussi bien formulées ! Ils t'ont surnommé la murène, parce qu'il paraît que tu ne lâches point prise lorsque tu mords. Or, face à moi, je ne vois qu'un affreux petit roquet qui aboie très fort parce qu'il se sait incapable de mordre ! (J'esquissai un sourire ouvertement moqueur): Aerona vient de finir de découper les faisans, je devrais lui dire de te donner les os...
- Petite chienne !

Il leva brusquement la main et je reculai d'un pas, réalisant que je l'avais mis en fureur pour de bon. Je savais qu'Arcus se tenait prêt à intervenir, mais un esclave qui oserait malmener un patricien, même pour défendre sa maîtresse risquait le fouet. Cependant, je n'allais certainement pas me laisser tyranniser dans ma propre demeure, aussi je ripostai vertement :

- Tu veux me frapper ? Ose-le donc ! Ose-le donc Murena, et je te promets, je te jure que tu y laisseras cette main, voire même le bras !"

Malgré cette bravoure apparente, j'étais terrifiée. Murena avait bien assez de soutien pour étouffer l'esclandre et j'ignorais complètement quel parti pourrait prendre Merula en le voyant faire. Il était fils de censeur, mais peu nombreux étaient les patriciens assez courageux pour tenir tête à mon beau-frère influent, non pas par sa position, mais parce qu'il faisait chanter certains des haut placés et faisait la pluie et le beau temps dans une partie de la curie.
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeJeu 16 Juil - 0:11


Elle avait ri. Était-ce sa manière à elle de montrer qu'elle appréciait sa poésie ? Merula n'osait croire qu'elle put se moquer de son œuvre, cela étant, il avait la désagréable impression qu'elle avait davantage été touchée par les vers de Volcatius. Et avec lui, elle n'a pas ri...

Il en était encore à déchiffrer la réaction de la matrone quand celle-ci s'éclipsa, semble-t-il pour accueillir un invité surprise. Tandis qu'elle s'absentait, Merula prenait à parti le petit Lucianus. « Dis-moi Lucianus, toi qui rêve d'être un cavalier intrépide, tu aimes les duels de gladiateurs ? » La question était posée sur un ton guilleret, avec autant de naturel qu'on pouvait en avoir lorsqu'on parlait d'hommes musclés et huilés se frottant sur les sables de l'arène, à un petit garçon de cinq ans.

Las, Lucianus n'eut guère le temps d'y répondre que les voix résonnant dans l'atrium firent relever la tête à Merula. De sa place, portant son regard par delà l'embrasure de l'oecus, il apercevait Harmonia, dos au salon - enchanteresse vision que celle de sa chute de reins - mais impossible de distinguer d'ici l'homme à qui elle faisait face. Il n'avait pu entendre distinctement ce qui se disait, mais à en juger par le ton qui montait, l'échange était orageux. Merula fronça les sourcils ; cela ne lui disait rien qui vaille. Il s'excusa auprès des hommes de lettres et s'empressa de rejoindre l'atrium. Comme il tombait nez à nez avec le duo, et qu'il n'entendait que la fin de la phrase d'Harmonia faisant curieusement référence à une main ou un bras, Merula se demanda s'il n'interrompait pas quelque confidence intime. Cet homme-là, qui avait un air hautement prétentieux et agaçant, était peut-être l'un de ses amants, et il n'était jamais bon de s'immiscer dans les disputes d'un couple. Hélas, Merula n'y songeait que trop tard.

« Sapristi, mais il me semble que je te connais », pensa-t-il tout haut alors qu'il reconnaissait le visiteur. « Tu étais à la petite sauterie du Tribun, n'est-ce pas ? Tu es celui à qui le Procurateur a mis un gros vent, ou je me trompe ? » Il offrit à Murena un sourire compatissant, avant d'enchaîner, tel l'infatigable bavard qu'il était : « je sais ce que c'est. Un jour, je faisais la queue pour entrer au théâtre et j'ai vu un grand type qui semblait vouloir me passer devant, je lui ai dit "sûrement pas !" En réalité, il n'était pas dans la file d'attente, il était du service d'ordre. Bon, je me rends compte que mon anecdote n'a pas grand chose à voir avec le sujet, mais c'est tout ce qui me vient à l'instant. Au fait, je m'appelle Titus Sevinius Merula. Mes amis m'appellent Titus, mais tu peux m'appeler Merula si tu veux. » Tournant son regard onctueux vers la maîtresse de maison, il ajouta : « douce Harmonia, pourquoi ton ami ne se joint-il pas à notre petite fête ? »
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeJeu 16 Juil - 19:57

Merula venait de venir à mon secours, avec un tact et une classe digne du patricien qu'il était, bien que je n'étais pas sûre qu'il se fût douté de la gravité de la situation. En effet, il ne se rappelait visiblement pas du nom de l'avocat en face de lui.

"Mon cher beau-frère s'apprêtait à prendre congé. N'est-ce pas, Murena ? répondis-je d'un ton aimable mais froid.
- Exactement. N'oublie point ce dont je viens de t'aviser, Harmonia, ajouta-t-il d'un ton quelque peu menaçant. A bientôt !

Sur ce, il quitta l'atrium, me laissant seule avec Titus et Florus qui arrivait à son tour, inquiet.

- Tout va bien Harmonia ? J'ai cru entendre un éclat de voix...
- Laisse tomber, Florus. C'était la discussion habituelle...

L'écrivain ne me paraissait pas convaincu, surtout en constatant la position d'alerte de l'esclave qui me tenait habituellement lieu de garde du corps.

- Harmonia, ce cuistre n'a tout de même pas eu l'audace de te menacer ?

- Bien sûr que si, répliquai-je en riant soudain, mais ne t'en fais pas, au final, ce cher Murena aboie plus fort qu'il ne mord ! Je n'ai pas peur de lui.

J'ajoutai cependant :

- Merci à toi Merula d'être intervenu, cela dit. Nous étions à deux doigts d'en venir aux mains, je crois bien. Arcus serait intervenu et Murena aurait exigé qu'il soit fouetté pour sa peine voire pire. Je détesterais perdre un esclave de cette façon.

Je le gratifiai d'un sourire sincère. En disant que je n'avais pas peur, je devais bien avouer que je mentais quelque peu et que l'influence grandissante de mon beau-frère me gênait. Jusqu'où pouvait-il être prêt à aller pour des denarii ? Si je l'imaginais mal prendre le risque de se faire haïr de Cornelia, j'aurais pu croire à une éventuelle implication de sa part dans l'empoisonnement de Lucianus Primus.
Néanmoins, je jugeai prudent de me garder ces réflexions pour plus tard et escortai mes invités jusqu'au salon. Ce fut ainsi que nous poursuivîmes la soirée.
Le faisan rôti était admirablement tendre et cuit, la chair douce et épicée à souhait, l'arôme de miel rehaussant divinement la viande. La salade au fromage frais émoustillait agréablement les papilles et le meli-mela était doux et onctueux. Tout en mangeant, nous devisions.

- Dis-moi, Florus, sur quel écrit travailles-tu en ce moment ?
- J'ai commencé une nouvelle épopée racontant le voyage d'un jeune roi, Aureus. Celui-ci a été maudit par Kuo et condamné à se transformer en bête immonde chaque nuit. L'histoire relatera son triomphe face à sa malédiction et les épreuves qu'il traversera pour fonder sa cité.
- Magnifique intrigue ! applaudis-je. J'en frémis d'impatience ! Qu'en penses-tu, Merula ? Je dois t'avouer que je raffole des histoires de malédiction et de rédemption..."
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeDim 19 Juil - 21:24


Perdu dans ses pensées, Merula n'écoutait qu'à moitié le babillage de Florus. Le petit différend familial continuait de trotter dans ses pensées. Les menaces de l'avocat, son départ précipité, et la façon dont Harmonia avait éludé la question pour ramener les convives au salon et clore l'incident, tout ça ne lui disait rien qui vaille. Au vrai, la chose ne le concernait en rien, néanmoins, Merula était un sentimental ; il prenait toujours à cœur les soucis des jolies femmes dont il n'avait pas encore eu le temps de se lasser.

La question d'Harmonia le tira de ses pensées, curieuse qu'elle était de connaître son sentiment sur l'oeuvre de ce pédant de Florus. Fait rare, Merula s'accorda un temps de réflexion, mais c'était surtout parce qu'il était en train de mâchonner un gros morceau de rôti. Fixant tour à tour chacun des convives, il prit le temps de déguster la viande savoureuse, puis, lorsqu'il fut enfin en mesure de parler, répondit sans détour :

« C'est à chier, Florus. Un jeune roi qui part en voyage à cause d'une malédiction, et qui gagne à la fin ? Tant qu'à piocher dans les lieux communs, pourquoi n'y ajouterais-tu pas une princesse à sauver dont il tomberait éperdument amoureux ? Il y a plus d'authenticité dans le contenu des latrines de la plèbe. Où est la fantaisie dans tout ça ? Que fais-tu de cette petite pointe d'extravagance qui fait des grandes œuvres ce qu'elles sont ? Où est l'excentricité, où est l'outrance ? » Un rictus ornait ses lèvres, qu'il s'efforça de changer en un sourire bienveillant. La charge, violente dans ses termes, était assénée sur un ton des plus affables, comme si Merula n'avait aucunement conscience qu'il manquait de respect à un invité d'Harmonia sous le toit de celle-ci. Gêné, Volcatius ouvrit la bouche comme pour dire quelque chose, mais il se ravisa, préférant sans doute se faire discret tant que la conversation naviguait sur des eaux aussi troubles. Ce qui laissa à Merula le loisir de continuer : « Moi, je te dis ça, c'est en toute amitié, parce que je te respecte trop pour te mentir. Jadis, tes pamphlets à Ruvia t'ont valu autant de gloire que de menaces de mort. Comment un homme si courageux en est-il venu à se complaire dans de telles niaiseries ? Comment peux-tu te satisfaire de ta petite existence, paisible et insipide ? Pense au Florus que tu étais à Ruvia, et imagine combien il serait furieux de voir ce que tu es devenu. »

Laissant le malheureux écrivain digérer sa diatribe, Merula jeta tranquillement son dévolu sur la salade. Et tandis qu'il se penchait pour se servir, il adressa ses compliments à Harmonia, parce qu'il était très attaché aux bonnes manières :

« Je te félicite pour ce repas, Harmonia. Tu sais choisir tes cuisiniers avec le plus grand soin ; par Alko, quelle merveille ! A profiter ainsi des charmes de ta maison, je ne peux qu'applaudir la matrone que tu es. J'aimerais tant être à la place de ton époux ! » Hum. « Enfin, je veux dire, il avait de la chance de t'avoir. Quand je dis être à sa place, je ne dis pas que j'ai envie d'être mort moi aussi », crut-il bon de préciser.
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeLun 27 Juil - 8:57

Merula semblait apprécier le festin, je le vis mâchonner longuement sa viande d'un air gourmand. Cependant, je me figeai lorsqu'il osa dire du projet d'écriture de Florus que celui-ci était "à chier". Parole de veuve, comment un patricien sortant d'une famille aussi distinguée que la sienne pouvait-il employer tel vocabulaire ? Etant en train de faire honneur à la salade au fromage frais, j'en manquai de m'étouffer avec une feuille. Je repris contenance et bus une longue gorgée de vin pour faire passer le tout. Néanmoins, je vis que mon ami ne se départit point pour autant de sa bonne humeur et répliqua aussitôt :

"Tu l'ignores peut-être, Merula, mais parfois, la fiction peut atteindre les esprits de manière bien plus efficaces que les pamphlets. Si mon épopée d'Aerus a eu autant de succès à sa sortie, c'est parce que le parcours du personnage faisait écho à celui du précédent imperator, et enseignait aux patriciens ce qu'était un bon souverain, en plus de les divertir. Je n'ai nulle honte, au contraire, je suis fier de mon parcours. Ce que tu viens d'entendre n'est qu'un ensemble de premières idées et je ne vais point manquer de les développer davantage. Ce n'est pas uniquement une malédiction que notre brave Aureus aura à combattre, bien entendu... Il devra aussi surmonter ses mauvais penchants, apprendre ce qu'est le vrai courage et la sagesse, qui feront de lui le roi puissant qu'il deviendra. Quant à l'amour, je ne pense point qu'il soit du genre à tomber du ciel pour un personnage qui a froissé les dieux.

Il marqua une pause :

- La gloire, n'est-ce pas ? En effet, j'en ai eu mon content. Aujourd'hui, j'estime qu'il est temps de laisser la place aux plus jeunes. J'ai bien assez marqué mon époque pour profiter des quelques années qu'il me reste et de quelques bons banquets comme celui-ci... Mais toi, mon cher... Qu'attends-tu donc pour briguer une charge à la curie, dis-moi ? Puisque tu as tant à dire ? A moins que cette jeunesse fougueuse se complaise elle-même à l'oisiveté qui conviendrait mieux à une personne de mon âge ?

Je faillis étouffer un rire à cette pique élégante. Mon ami avait bien assez de répartir pour moucher même un éloquent averti comme un curiate. De mon côté, je ne me privai pas de répondre :

- J'ai toujours estimé que les contes, les épopées et les poèmes étaient tout aussi importants que les discours et les pamphlets, Merula. C'est ainsi que les enfants comme Lucianus apprennent les vertus qui conviennent à un fier ruvien. Et crois-moi qu'en tant que mère d'un héritier, je veille à lire régulièrement et à m'assurer que le praeceptor que j'ai choisi pour mon fils lui donne accès à des oeuvres qui enrichiront son esprit et feront de lui un adulte éveillé et érudit. Je ne saurai supporter qu'il devînt un sot oisif se complaisant dans la débauche, comme c'est le cas de certains dans la cité..."

J'avais beau apprécier le fils du censeur pour sa spontanéité et son humour, je n'étais pas dupe quant au fait que Galba devait gémir s'il se comportait ainsi avec ses invités. Et j'avais eu le temps de comprendre qu'il devait passer son temps à s'amuser, au lieu d'aider son père à ses affaires comme le ferait tout bon patricien digne de ce nom. Comment un esprit comme le sien, capable d'apprécier l'art et la littérature, pouvait-il en même temps se complaire à l'enfantillage et à l'insolence ? C'était là quelque chose qui m'échappait.
Après un instant de silence, je rebondis avec un sourire triste sur sa remarque plaisante à propos de la chance qu'avait eu mon époux de m'avoir à ses côtés.

- Hélas, Merula, si tu savais... Si Lucianus Iustius Primus se considérait en effet comme le plus chanceux des hommes, je me sentais moi aussi la plus heureuse des femmes. Lucianus était un homme doux et bon. Nous sommes tombés amoureux l'un de l'autre dès que nous nous sommes vus la première fois, et si mon mariage avec lui était avant tout une alliance, j'ai eu le bonheur de ne point avoir à le redouter contrairement à d'autres demoiselles qui parfois, ne font la connaissance de leur mari que le jour de leur mariage. Un tel amour, je le crois, n'est accordé qu'une fois au cours d'une vie. Et il m'a été enlevé si vite...

J'esquissai un sourire :

- Mais notre fils bien-aimé me reste et je veillerai sur lui jusqu'à ce que Kuo rappelle mon âme."

Ma gorge s'était légèrement serrée à ces dernières paroles, bien que j'eûs depuis longtemps versé toutes mes larmes et retrouvé courage de façon à prendre soin de mon enfant. Lucianus... Il avait été le grand amour de ma vie, ce patricien aux valeurs nobles, de dix ans mon aîné, capable de tant de bonté et de sincérité hors de la curie... Jamais je ne retrouverai un tel homme, et je le savais. Les gens de notre classe apprenaient la fourberie aux langes. Quant à Merula, il me semblait avoir bon coeur, mais il était surtout demeuré un enfant gâté. J'en avais bien assez d'un seul.
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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeMar 4 Aoû - 7:32


Il me cherche des poux, ce trou de balle, pensa Merula, quelque peu décontenancé par la pique de Florus. Quoi, quoi, quoi !? Il allait lui rétorquer de façon poétique qu'il pouvait éventuellement aller s'envoyer en l'air avec un pot de fleurs, mais Harmonia eut la bonne idée d'intervenir. Au grand dam de Merula, elle se mit elle aussi à vanter les mérites de la pseudo littérature classique et de ses bienfaits pour la jeunesse... Il comprenait mieux, maintenant, pourquoi le jeune Lucianus était déjà un petit dictateur imbu de sa personne. Toutes ces œuvres qu'on imposait à la jeunesse patricienne n'étaient destinées qu'à perpétuer une façon de penser que Merula jugeait surannée. L'art était ailleurs, et si Merula ne se reconnaissait que dans ses formes les plus outrancières, c'est parce que la société ruvienne s'enfonçait dans un puritanisme malsain. Dans leur propre intérêt, les patriciens avaient bien besoin de se faire botter un peu le cul ; mais toujours de façon poétique, naturellement.

Hélas, Merula se trouvait bien isolé ce soir ; raillé par Florus, désavoué par Harmonia, voilà qu'il était maintenant lâché par son ami Volcatius. Comme la maîtresse de maison se répandait dans un vibrant hommage à feu son époux, Volcatius, ce faux jeton, se joignit à la glorification du défunt :

« J'ai eu le privilège de rencontrer Lucianus à quelques occasions. Oh, nous n'étions pas des intimes, mais nous avons eu quelques conversations, car il était d'une grande curiosité et qu'il savait se faire apprécier de tout le monde. C'était un patricien droit et juste comme la Curie en voit trop peu de nos jours. Soucieux de la chose publique. Nul doute qu'il fut un bon époux ; il n'est guère étonnant qu'un homme qui faisait passer les intérêts des autres avant les siens ait su faire preuve d'autant de générosité dans son couple. » Volcatius coula un regard plein de compassion à la jolie veuve, avant de conclure : « C'est cruel que les dieux te l'aient ôté si vite, Harmonia. »

Tandis que Volcatius débitait son baratin, Merula réprimait à grand peine un baillement. S'il était si parfait, il avait qu'à se débrouiller pour ne pas crever, pensait-il, la mine légèrement renfrognée, comme à chaque fois qu'on lui ôtait le privilège d'être au centre de l'attention - et dire qu'on faisait tout ce foin pour un mort ! Un amour unique, mes fesses ; elle a beau dire, je suis certain qu'il devait lui arriver de péter au lit, même discrètement.

Oui, en cet instant Merula était jaloux. Jaloux de Florus, qui l'avait mouché en faisant rire la belle qu'il convoitait ; jaloux de Volcatius, qui convoitait la belle qu'il convoitait ; jaloux de Lucianus, qui avait eu la belle qu'il convoitait et qui, même mort, semblait avoir si solidement planté son enseigne qu'il était bien parti pour se la garder pour lui tout seul, le fumier. Cette pointe d'agacement qu'il ressentait expliquait peut-être le léger dérapage qui devait s'ensuivre :

« Comme tu y vas, Volcatius ! N'en fais pas trop quand même », dit Merula lorsque le poète eut achevé de parler. « Tout gentil qu'il était, Lucianus n'en avait pas moins ses ennemis. Je me suis laissé dire qu'il y en avait plusieurs à la Curie que sa mort avait réjouis.
- Ne dis pas des choses pareilles »
, répliqua Volcatius en fixant Merula de ses grands yeux ronds, choqué de l'absence de tact du jeune patricien qui proférait ces mots devant la veuve. « Je doute fort qu'Harmonia ait envie d'entendre...
- Harmonia n'est pas en sucre, Volcatius ; c'est une femme solide. Elle peut entendre la vérité. »
Merula se tourna vers la maîtresse de maison. « N'est-ce pas, Harmonia ? Je suis certain, du reste, que tu en as déjà entendu parler. »

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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeMer 5 Aoû - 11:33

J'aurais mieux fait de tenir ma langue ! Point parce que le poète Volcatius se lança dans un éloge fallacieux et si mielleux de flagornerie que je fus étonné de ne point le voir se couvrir de mouches ; mais parce que Merula venait de le couper d'un ton tranchant pour explicitement parler de quelques patriciens de la curie qui s'était réjouis de la mort de Lucianus. Certes, entendre le fils du censeur confirmer ces rumeurs me fit comme un coup de marteau dans la poitrine et durant un bref instant, je faillis bien lui demander sur-le-champs de m'en dire davantage. Mais il n'était point temps pour une conversation aussi grave, d'ailleurs, si j'étais certaine de la loyauté de Florus à mon égard, je ne connaissais pas bien Volcatius et je ne pouvais clairement pas risquer que le poète s'hasardât à répandre que la veuve Iustia cherchait le coupable du meurtre de son mari ! La vengeance était un plat qui se mangeait froid. Et à plus forte raison, un projet à préparer sur peut-être des années.
Une femme solide, venait de dire Merula à mon propos. Je fus touchée par ce compliment et lui accordai un sourire.

- Merula a raison Volcatius, et j'avais ouï parler en effet de certaines rumeurs. Mais je vous en prie, messieurs n'en disons point plus ici. Lucianus Minor nous entend et il est encore bien trop jeune pour comprendre !

Mon enfant finissait de grignoter quelques gâteaux au miel. Comme il se faisait tard, j'en profitai.

- Aerona, il est temps pour ce jeune homme d'aller au lit. Regarde, ses paupières se ferment. Emmène-le, veux-tu ?
- Bien entendu Domina, répliqua ma jeune servante en s'approchant.

Avant que le petit ne protestât, je glissai encore trois gâteaux sur une petite assiette que je tendis à Aerona. "Dépêche-toi, emmène-le", sussurai-je d'une voix tellement basse que j'aurais pu douter qu'elle eût entendu si elle ne m'avait pas jeté un regard de connivence. Obéissant, mon petit trésor me jeta ses bras autour du cou et me donna un baiser tout collant de miel sur la joue. J'eus un petit rire tendre en le pressant contre mon coeur, ma poitrine s'emplit d'une bulle chaude. Par Kuo, jamais je ne pourrais supporter de le perdre. Il y avait des moments où j'avais envie de le garder contre moi ainsi éternellement, de le cacher sous mes cheveux, sous ma stola, le rendre invisible aux yeux d'un monde que je savais éminément cruel. Mes cauchemars étaient hantés par cette vision d'horreur, mon fils se mettant à cracher du sang après avoir bu une boisson, comme son père avant lui...
M'efforçant de garder contenance, je dis avec gaité :

- Parlons, s'il vous plaît, de sujets plus gais que la mort de mon cher époux. L'on va jouer une nouvelle comédie au théâtre la semaine prochaine. Florus, tu viendras ? Et toi, Merula ?
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Titus Sevinius Merula

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Titus Sevinius Merula

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MessageSujet: Re: La chèvre de Bassium [Harmonia]   La chèvre de Bassium [Harmonia] I_icon_minitimeSam 8 Aoû - 22:09


Un léger sourire aux lèvres, Merula observa l'enfant se blottir contre la poitrine ronde de sa mère, et il eut un petit rire tendre comme il s'imaginait, lui aussi, se presser tout contre ce cœur généreux. Par Kuo, jamais il ne supporterait de perdre cette femme - à moins d'en trouver rapidement une autre, bien entendu. Quand il la regardait ainsi, il avait envie de la garder contre lui éternellement, de se cacher sous ses cheveux, sous sa stola, de se rendre invisible pour mieux la suivre partout. Nul doute que cette nuit, ses rêves seraient hantés par une vision enchanteresse, celle d'Harmonia se donnant à lui après avoir bu une boisson alcoolisée...

S'efforçant de garder contenance, maintenant que le sale mioche était parti se coucher et qu'Harmonia ramenait la discussion vers un sujet moins dangereux, Merula lança avec gaieté :

« Venir avec toi, au théâtre ? Allons Harmonia ! Je t'accompagnerai jusqu'aux enfers s'il le fallait. Mais c'est gentil de ta part de ne pas m'y forcer ; quitte à choisir, le théâtre, c'est quand même mieux. »

Il jeta un regard délicieusement narquois à Volcatius, qui avait bien remarqué qu'Harmonia avait omis de le convier. Pauvre Volcatius ! Il frimait avec ses petites poésies, mais il ne jouait pas dans la même cour que lui, c'était ainsi. Il avait voulu jouer, et il avait perdu. Des deux, Merula restait le chouchou, et il en était très fier.
Restait Florus. Celui-ci était de toute évidence une vieille connaissance d'Harmonia, ce qui signifiait qu'il brûlait depuis longtemps de se fourrer entre ses cuisses. Mais puisqu'il n'était toujours pas arrivé à ses fins, il partait avec un handicap certain : Harmonia devait voir en lui une sorte d'ami ou d'oncle, gentil mais un peu rasoir. Et les femmes ont besoin de fantaisie.

« Viens donc aussi, Florus, je suis sûr que ce sera une soirée merveilleuse. Amène ta femme, ça lui plaira sûrement. Enfin, si tu as une femme... » Il se gratta le menton, pensif. « Et en espérant qu'elle ne soit pas morte ou qu'elle ait une maladie de peau dégoûtante qui l'empêche de paraître en public ; quand j'étais dans la Légion, la femme de mon centurion avait ce problème, c'est sans doute pour ça qu'il était ravi de ne jamais la voir... Mais je disgresse ! De quoi parle donc cette pièce ? »
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